Tchorski
Accueil - Urbex minier - Urbex industriel - Urbex religieux - Paysages sonores - Contact & achat - Politique de confidentialité

La Maison de Monsieur Launay

Ce reportage, largement augmenté en décembre 2010, a été réalisé par Nicolas et Vincent Duseigne. Que ce reportage soit dédié à Norbert Fichepoil et sa famille, comme quoi certaines passions se partagent par le plus grand des hasards.

Ce reportage est une description d'une maison abandonnée, située à Pierres, une commune accolée à la petite ville de Maintenon. Le primo-documentaire date de janvier 2006. A cette époque, la maison avait la particularité d'être camouflée dans une végétation très dense. De ce fait, comme elle n'intéressait personne, cachée derrière des lauriers débordants, elle était préservée. A la date de visite, tout était parfaitement intact. On est entré dans un monde pétrifié depuis 10 ans, peut-être 20, qui sait... C'était incroyable, la maison était une pierre morte de silence brut. C'était entrer dans un sanctuaire - il a fallu le faire avec un recueillement immense. Nul doute, la vieille bâtisse était une tombe.

Cette maison regorgeait de vieilles lettres, de photos et d'anciens souvenirs. Autant les étages étaient insipides, autant le grenier était incroyable, un musée débordant de toutes sortes de vieilleries. Le propriétaire était Monsieur Omer Launay. Il était domicilié à Pierres, près de Maintenon. Il avait apparemment la direction d'une scierie et d'une laiterie. Les archives parlent aussi d'Alfred Couvert.

Grâce aux connaissances d'Irène Ducrocq, nous en savons un peu plus sur Alfred Couvert, un texte dont je me permets de reproduire le contenu : Vous vous interrogiez sur Alfred Couvert. Il s'agit en fait du notaire, qui a racheté beaucoup de maisons à Pierres et à Maintenon, peut-être un vingtaine, peut-être une trentaine, qui sont vides aujourd'hui. Maître Couvert est décédé et a légué ses biens au diocèse de Bayeux en Normandie. On en parle encore avec beaucoup de déférence dans le village, bien qu'il n'ait pas entretenu ses maisons. Celles qui avaient des locataires ont été proposées en vente à leurs occupants, les autres se vendent peu à peu, quand elles sont en état, par l'intermédiaire de la notaire actuelle, Maître Munoz. Maître Couvert a une belle tombe au vieux cimetière de Pierres, au pied de l'église.

Voici donc un petit tour dans une maison recluse de silence, habitée par le fantôme de Monsieur Launay.
Les Images-Liens vous amènent dans des petits reportages.


Les photos de la maison
(Image-Lien).

En janvier 2007, nous avons constaté que la maison de monsieur Launay a été victime de vandalisme. Ils ont arraché les cheminées, enlevé le parquet, cassé les vitres. Par chance, ils ont oublié le grenier. Nous avons donc mené une opération de sauvetage pour préserver le patrimoine. Il était trop dommage que tant de belles choses partent au feu. Il est extrêmement difficile pour nous de prendre cette décision, car normalement nous ne modifions jamais la moindre poussière des lieux où nous entrons, mais ici... c'était une question de sauvetage. Toute cette vie est trop précieuse pour les laisser en pâture à des vandales. Nous avons donc sauvé 40 photos, 200 cartes postales et 2000 lettres. Certaines de ces lettres parlent d'amour, d'autres de la guerre 14-18, beaucoup parlent du mauvais temps ! Aujourd'hui, tout cela a été balayé, nettoyé et bien rangé dans un coffre. Le passé d'Omer Launay et d'Alfred Couvert a été sauvé de justesse.

Un container propose quelques centaines de scanners de ces documents, afin de vous donner une idée de ce à quoi ça peut ressembler. Le lieu de stockage n'est pas chez nous, malgré la récupération, ça ne nous appartient pas. Ces documents sont destinés à un musée, ça le vaut bien.


Le sauvetage des documents
(Image-Lien).

En décembre 2008, la maison a brûlé. Le 27 décembre, mon père Laurent Duseigne m'écrivait : Quelques nouvelles inédites de la maison Launay, très récentes puisque datant de ce matin. Cette maison avait été squattée depuis de nombreux mois par des sans-abris. Compte tenu du froid, sans doute ont-ils voulu se réchauffer en allumant un feu, (à moins qu'il ne s'agisse de vandalisme). En tout cas, la maison a brûlé ce matin. Plus de toiture, plus de plancher. Ne restent que les quatre murs. Du peu que j'en sache, pas de victime en tout cas. Aucun dégât dans les maisons voisines. Fin de l'histoire d'une maison, car si restant à l'abandon, les murs seront rapidement en l'état de péril et ne pourront à terme qu'être rasés.

Nous avions pourtant averti la mairie de Pierres du péril imminent, mais il est certain qu'ils ne pouvaient rien faire... C'est privé. Faute de bons contacts, nous avons probablement frappé à la mauvaise porte. En attendant,... La maison est morte mais pas son âme. On garde sa mémoire. Ca porte quelque chose de sentimental. La page ci-dessous montre quelques tristes photos de ce qu'il reste de nos jours.


L'incendie de la maison
(Image-Lien).

Les recherches de décembre 2010 ont consisté à retrouver si des descendants existent ou ont existé pour Alfred Couvert, Omer Launay, mais aussi étonnant que ça puisse paraître, une personne supplémentaire : mademoiselle Boine. En effet, à quelques pas de la maison Launay et dans un même cadre, on a retrouvé quasiment le même scénario ; des archives, des photos. Nous n'avons que peu d'idées de qui est réellement cette dame, si ce n'est que les photos anciennes montrent des personnes communes, dont Louis-Félix Boine. Etaient-ils liés par la famille, des amis, de simples voisins ?

Une enquête opiniâtre a commencé...

D'après les brèves recherches bibliographiques en archives menées en novembre 2010, Maître Alfred Couvert était notaire en Calvados. Les actifs de l'étude ont été repris à Merville-Franceville Plage, près de Cabourg, par maîtres Patrick Danjou et Fabrice Lesaulnier. D'après les dires, actuellement imprécis, maître Couvert serait décédé il y a une dizaine d'années. Il possédait un nombre important de maisons et de terrains. L'une vient d'être mise en état de péril par la mairie. Cela signifie qu'un périmètre de sécurité est installé, parce que la maison s'effondre. Quant aux terrains, ils sont en friche. La maison de monsieur Launay est toujours dans le même état fin 2010. Il court dans les rues l'information que la mairie souhaiterait exproprier pour en faire un terrain à bâtir.

En décembre 2010, nous avons quasiment réussi à percer le secret des Launay. Cette recherche a été longue et parsemée d'embuches, mais les faisceaux d'indices sont concordants. Que soient remerciés pour leur aide, leur enthousiasme et leurs informations : monsieur Jacques Brard du syndicat d'initiatives de Maintenon, brièvement madame Gallas-Duval de la Cavée de Bellevue, Maryvonne de la boulangerie de Pierres, monsieur Maurice Huberson de Pierres, brièvement monsieur Soudry de Pierres (malheureusement absent), madame Gallas de la mairie de Pierres et le service état-civil de la mairie de Pierres. Merci aussi aux anonymes et personnes déjà citées pour leurs informations complémentaires.

L'enquête a été menée avec Nicolas Duseigne.

Monsieur Omer Launay est né en 1873 à Pierres. Il était notaire. Il a possédé la maison décrite dans ce documentaire. Ca peut paraître une évidence, mais il est tout de même bon de l'attester. Maître Launay n'a pas eu de descendance. A son décès, la maison a été léguée à Alfred Couvert, son neveu. Il y a donc une relation Oncle-Neveu entre eux deux. D'après une seule information (non recroisée), Omer Launay aurait procédé à l'éducation de son neveu. On pourrait donc supposer un décès prématuré des parents. Cependant, nous ne possédons pas d'informations à ce sujet. Tout semble attester que le petit Alfred Couvert a passé son enfance dans cette maison.

Omer Launay n'était ni crémier ni bucheron. Il était notaire. Il possédait par contre une laiterie et une scierie. Cela explique le nombre important de comptabilité dans ces deux domaines. La laiterie était située en face de la salle des fêtes Leblond. Il n'en reste que très peu d'éléments reconnaissables. La laiterie était située en lieu et place de l'école maternelle du Potencourt. Il n'en reste strictement rien.

Alfred Couvert a pris la succession de son oncle et il a donc a son tour officié comme notaire. Peu de traces attestent qu'il aurait exercé à Maintenon. Chose sûre en tout cas, il est devenu propriétaire de la maison Launay. Nous ne possédons que peu d'informations au sujet de cette personne. Nous savons en tout cas qu'il était propriétaire d'un nombre important d'habitations à Pierres, les dires diffèrent entre 13 et 14 maisons. Une personne nous déclare qu'il allait en personne frapper à la porte pour réclamer les loyers. Comme notaire, il a exercé à Merville-Franceville et donc les informations de reprise de l'étude en Normandie sont correctes.

A son décès, Maître Couvert a légué le patrimoine au diocèse de Bayeux. Cela est une certitude car tous les indices convergent. La plupart des maisons ont été mises en location, celle de monsieur Launay le fut à Bernard Gomez, personne qui nous est inconnue. Nous ne savons pas quand il a quitté les lieux et pourquoi il a laissé le grenier à ce point intouché de toutes les archives. Nous ne possédons pas la date de décès de Maître Couvert, cependant les témoignages visent à converger vers une date située aux environs de 2000. Il est enterré à Bayeux. Il reste là-bas un très beau manoir, lui ayant appartenu. D'après Norbert Fichepoil, le ou les Couvert présent(s) dans cette région ne serai(en)t pas directement apparenté(s).

La succession était donc universellement léguée au diocèse. Cependant, trois personnes nous ont évoqué la présence d'une soeur secrète. Alfred a eu une sour et cela serait resté longtemps secret dans le village. C'est probablement ce qui a rendu la succession si difficile.

Au cimetière de Pierres autour de l'église, Alfred Couvert n'est donc pas présent dans le tombeau. Le tombeau récent identifié comme « Famille Couvert » ne possède aucune information complémentaire, pas de prénoms, pas de dates. D'après certains dires, ce serait - aussi étonnant que ça soit - Omer Launay qui serait présent. Au cimetière de Pierres (route vers Néron) et au cimetière de Maintenon, il n'y a aucun membre de la famille inhumé.

Le mystère ne restera pas complet, grâce à ces quelques maigres informations. En contrepartie, il ne sera probablement que peu complété, étant donné que toues les membres de la famille seraient désormais disparus. La succession est d'après les rumeurs close. Les maisons doivent désormais se trouver un meilleur avenir, ou mourir. Que ces quelques mots puissent préserver un petit pan de mémoire longtemps resté entre quatre murs abandonnés.


L'école maternelle. Avant, il y avait ici la scierie.

En janvier 2011, les recherches en sont à ce point ; Nicolas Duseigne m'écrit : Avec la journée supplémentaire, j'en ai profité pour parcourir de manière approfondie les correspondances de M. Launay. En gros, deux périodes de correspondances sont disponibles : de 1912 à 1914, lorsqu'Omer faisait son service militaire, et de 1930 à 1932, lorsqu'Omer était en mauvaise santé. Omer, propriétaire à première vue d'une scierie, a rencontré et aimé Jeanne (Couvert ?) vers 1910, qu'il aura épousée. En regardant les correspondances de Jeanne, nombreuses sont celles provenant d'une laiterie. Il est possible que sa famille où elle même fussent la propriétaires de la laiterie.

Quoi qu'il en soit, il est fait mention très régulièrement de Félix, le frère de Jeanne, celui-là même qui a fait son service avec Omer. Omer et Félix étaient très proches. Et, détail important, le petit Alfred, dont il est fait mention très régulièrement dans les lettres, semble être le fils de Félix. Jamais il n'est fait mention de la femme de Félix (la mère d'Alfred donc), il se peut qu'elle soit décédée prématurément. Vivant ensemble ou étant très proches, le petit Alfred passait énormément de temps avec sa tante Jeanne. On peut en déduire qu'à la mort de Félix (vers 1932 en l'occurence), Alfred ait été recueilli par les Launay.

J'en conclus et dans un faisceau d'indices assez resserré, qu'Alfred Couvert est le fils de Louis-Félix Boine, ce qui corrobore en nos indications au sujet de Madeleine Boine en tant que soeur du premier. La scierie serait un patrimoine Launay et la laiterie un patrimoine Couvert, le contenu aurait été fusionné lors d'un mariage Launay-Couvert, éventuellement avec Jeanne, soeur de Félix et Omer Launay. La plus lourde probabilité, c'est qu'Alfred Couvert n'était pas attendu, il serait né d'une relation hors mariage. Dès lors, pour des raisons qui nous échappent encore (et le resteront probablement longtemps), Louis-Félix Boine n'a pas reconnu son enfant, ce qui explique 1/ qu'il ait été élevé hors du contexte familial, 2/ qu'il y ait eu un secret de famille longtemps conservé à propos de la soeur de sang, Madeleine Boine. Là où ça pose de sérieuses questions, c'est que si Alfred Couvert n'a pas été reconnu, il était alors extérieur au patrimoine familial des Boine, ce qui exclut Madeleine Boine d'un héritage dans le cadre de la succession Launay-Couvert. Les recherches seraient certainement encore longues.

Nicolas à ce point de l'enquête, a rédigé un vaste document d'étude. Ces deux longs chapitres font le point en matière des connaissances que nous possédons à ce stade. Le premier document présente les documents d'étude et son cadre. Le second document est une succession d'affirmations, déductions et théories sur le destin des Launay-Couvert.

A ce sujet en juin 2012, nous avons reçu le document suivant de la part de madame Gois :

M. Alfred Couvert notaire à Merville Franceville plage était le neveu de mon grand-père : M. Emile Derolez. Quand vous mentionnez Mme Desolez, je pense que c'est DeRolez. Emile Derolez s'est marié en seconde noce avec ma grand-mère Lucienne Soulié, qui avait une fille Suzanne Lefèvre, ma mère. Mme Derolez que vous mentionnez serait-elle peut-être sa première femme (?).

Omer, Jeanne, Félix Couvert, Launay et Boine sont des noms que j'ai entendu prononcés par mon grand-père. Il y avait deux enfants de chaque côté : un garçon et une fille. Omer ou Félix + soeur Emile (1891/1970) + soeur (Jeanne ?). Leurs parents se sont mariés.

Alfred correspondait avec son oncle Emile. Après la guerre d'Algérie, craignant une réquisition, il avait invité son oncle à résider quelques temps dans une de ses maisons de Pierres. C'est à cette occasion que nous y avons séjourné pendant un week end. J'ai vu Alfred Couvert une seule fois, lors de l'enterrement de mon grand-père. Mon grand-père travaillait comme comptable aux fermiers réunis rue Louis Blanc. Le patron était quelqu'un de sa famille. Son demi frère ou son beau père ?


Il va de soi que nous ne pourrons pas aller plus loin dans les recherches, le sujet ayant été analysé dans de nombreuses de ses possibilités. Rajouterons-nous une date postérieure à juin 2012, révélant de nouvelles découvertes ? Ca serait beaucoup de hasard... Mais après tout, n'est-ce pas l'entièreté de cette recherche qui est un grand hasard ? On peut se permettre de rêver quant à des suites...

ACCUEIL