Il
s'agit d'un documentaire sur les cloches de la cathédrale de Clermont-Ferrand,
et au passage, quelques aspects de la partie haute. La moitié des photos
a été réalisée par Sandy De
Wilde.
Un tout grand merci à Mme Mathilde
Lavenu, architecte des bâtiments de France et à M. David
Gary pour l'accueil à la cathédrale. Suivi du dossier administratif
: M. Philippe Piollet, M. André
Farrer pour le diocèse de Clermont. Le dossier a été
fortement complété par Daniel Fonlupt,
horloger à Charroux, notamment par l'ajout de bibliographies, corrections
et de photographies du jacquemart. Un grand merci à lui pour ce travail.
Il y a 7 cloches inventoriées dans la cathédrale. Cela exclut les cloches de chour et de sacristie, dont nous ne connaissons pas à ce stade l'existence. Ces cloches sont, sauf le jacquemart, installées dans la tour de la Bayette, à l'arrière de la cathédrale. Bien qu'il y ait des abat-son aux deux flèches au devant de la cathédrale (probablement des Hildebrand), il n'y a pas de cloche installée. Un assez grand beffroi est monté dans chaque flèche, mais ces dernières sont vides. Il n'y a aucun témoignage physique de cloche ayant pu être installée, pas de palier, pas d'encoche, rien... On peut supposer que Violet Le Duc avait prévu d'en déposer en cet endroit, ce qui peut sembler logique, et que ce ne fut jamais fait. Il n'existe aucune documentation en ma possession pouvant attester ou infirmer cette affirmation.
Le campanaire est subdivisé en deux catégories : les cloches d'horloges, les cloches de volée. Nous allons passer chacun de ces aspects en revue. Il existe à ce jour assez peu de documents sur la partie haute de la cathédrale, si ce n'est quelques mentions relativement brèves. Un seul document passe les cloches en revue, de manière succincte, c'est le livre de Bernard Craplet (voir bibliographie). Le texte ci-dessous est donc uniquement basé sur notre inventaire et notre interprétation, ce qui est sujet à caution.
Par ce manque de documentation, je suis incapable de dire quelles étaient les cloches de volée avant la révolution, et où elles se situaient. Cet aspect est renforcé par le fait qu'il n'y a aucun trou de cloche, qui laisserait par exemple supposer qu'il y a eu des instruments dans tel ou tel endroit de la cathédrale et à ce jour désaffecté. La seule référence existante (1) mentionne qu'en 1793, les communaux font de gros dégâts à l'édifice. Ils incendient la charpente. Ils reculent apparemment devant la démolition totale de l'édifice, vu le volume de gravats que ça engendrerait. Dans ce texte est brièvement mentionné que dans la tour romane, incendiée, un gros bourdon s'abat au sol.
(1) Paul Léon, Les monuments historiques: conservation, restauration - 1917.
Les cloches d'horloge
Il existe au sommet de la tour de la Bayette un assez gros timbre, datant de 1606. De fondeur non identifié, son épigraphie est plutôt riche et son état de conservation variant de bon à très bon. La face nord a subi un peu de corrosion. Il y a des coulures ferreuses autour des décors, et légèrement autour des parties verticales des lettrines.
C'est une belle cloche qui mériterait une certaine mise en valeur.
Son épigraphie est en grosse lettres romaines, de bonne qualité. La traduction de l'épigraphie est partiellement donnée plus loin dans le texte, tout en sachant que la bonne moitié est sibylline, ce sont des abréviations peu compréhensibles. Les décors sont soignés, mais ne font l'objet d'aucune fantaisie : blasons, croix, le tout reste simple.
Il
n'existe aucune piste, à mon niveau, pour identifier le fondeur.
Cette
cloche était visiblement reliée dans le passé à une
tringlerie d'horloge. En effet, au dessus de la porte de la salle des deux horloges,
il existe une équerre de renvoi, désaffectée à ce
jour.
Une deuxième série de cloches d'horloges, c'est le jacquemart. Il est fonctionnel. Les trois personnages du jacquemart sont chacun surmontés de petites cloches (diamètres 22, 35, 39 cm).
Il subsiste dans une salle proche de la Bayette deux horloges désaffectées. La première est un vaste ensemble, relativement bien conservé, datant à peu près du 18ème siècle vu l'aspect. La seconde, d'apparence nettement plus moderne et moins sale, est une Lussault de Tiffauges, en Vendée. Aucune de ces deux horloges n'est à ce jour maintenue en fonctionnement. L'heure est commandée par une petite horloge mécanique minimale, des Ets Thiriot, accrochée à un mur. Il est bien que les deux horloges anciennes puissent être conservées dans de bonnes conditions.
Les cloches d'horloges sont donc au nombre de quatre : un gros timbre, trois clochettes.
Les cloches de volée
Elles sont au nombre de trois. Elles pèsent, d'après les inventaires pour les LH1 et LH2, 2500 et 2200 kg. Cela semble des mesures estimées et non réelles, c'est trop rond. Dans tous les cas, ça parait proche de la réalité. Ce sont de petites cloches pour un tel édifice. C'est une sonnerie modeste en poids et de surcroît modeste en nombre.
La troisième cloche, de 1581, est située sur la plateforme du sommet de la Bayette. Comme c'est un lieu touristique, la cloche a été protégée, elle est encagée. Comme c'est un lieu fréquenté, elle fut dégradée. Sa robe est gravée de multiples noms, des machin je t'aime et toutes sortes d'idioties criminelles de ce genre.
Elle est de fondeur non identifié. Il n'existe aucune piste pour en savoir plus. Ce que je peux dire, c'est que l'épigraphie est d'une qualité située entre le bon et le moyen. Si les lettrines sont assez bien appliquées, les figures sont frustres, peu lisibles et parfois un peu inclinées. On observe de fortes dégradations dans les bords des personnages, dont notamment des coulures ferreuses.
Dans son aspect, elle a de fortes ressemblances avec la 1609 d'Amiens, de Melchior Guerin. Les figures notamment sont similaires. Cependant, nous n'attribuons pas cette cloche à ce fondeur. Les analogies ne sont pas suffisantes. De plus, c'est fort éloigné en distance, Guérin était amiénois. Les remarques concernant l'épigraphie sont les mêmes que pour cette cloche d'Amiens, il est étonnant pour cette date que ça soit une textura qui soit utilisée (bien que ça soit moins marquant, elle précède la Guérin de 28 ans).
Elle est en lancé franc. Il n'y a pas de mouton. Une cale en bois surbaisse la couronne par rapport à l'axe, afin de renforcer la sonorité de cette petite cloche, placée en hauteur et assez éloignée des bords de la tour.
Les LH1 et LH2 sont, elles, situées dans la salle de cloches de la Bayette.
Ce sont des cloches modestes, visiblement en profil léger, de réalisation soignée. Elles sont en lancé franc allégé par un mouton assez faible. Il reste sur la LH2 deux pédaliers, qui témoignent du mode de volée passé... au pied donc.
L'épigraphie est riche. La dédicace est longue, 5 et 6 lignes respectivement, avec en plus des noms de parrainage en faussure. Cette épigraphie est assez fortement vert-de-grisée sur le cerveau. C'est une dédicace en latin. Le nom Lhéritier-Dubois est mentionné en fourniture, avec la date 1827. Les épigraphies sont entourées de plumes très symboliques.
Le beffroi n'est pas forcément en très bon état. Il est légèrement branlant, la vidéo en témoignera. Cependant, il n'y a pas à ce stade de mise en danger des instruments et de l'édifice. Comme ces cloches sont assez peu équilibrées et que la volée est lourde, un système "Bach" aide le moteur de traction. C'est un bloc (photographié) qui tracte et repousse. C'est assez original. Les moteurs quant à eux sont des Mamias classiques. Le système de traction Bach semble provenir d'une firme campanaire nommée "Frères Bach" à Metz, c'est en tout cas la seule référence de catalogue existante me concernant..
La volée est assez peu utilisée. Il n'y a pas d'angélus. Visiblement, seul l'appel aux offices serait sonné.
Relevé d'épigraphie
Timbre,
sommet de la Bayette.
Diamètre : 145 cm
Tangentielle : 114 cm
Nombre
de filets à la fourniture : 9
Nombre de filets à la pince : 6
Anses
possédant chacune un visage, dont la bouche crache une palmette.
Epigraphie
/ au cerveau : VOTV ET COM SVMPTV DICATVM *S.F.DET DECORO INCLYT AE ET IVICTISS.
CIVITATIS ARVERN. En faussure : (ligne du haut) CLAM TACITIQVE DIES PEREVNT ET
MVTA FERVNTVR SECVLA PER VIGILI SED VOCE SILENTIA RVMPAM. 1606 *. (ligne du bas)
NOB.P.BONNAFOS.V.BEGON.E.MEYRAND ESCHEVINS. DE. LA. VILLE. CAPP-ALLE. D'AVVERNE.
Sous
la dédicace : Blason avec 4 fleurs de lys et en dessous, la date 1606.
Blason reproduit 4 fois.
Une croix ornée à quatre branches égales,
reproduite 4 fois.
Blason avec 3 fleurs de lys, reproduit 4 fois.
Epaisseur
au bord : approximativement 17-18 cm.
Le battant possède à sa
chasse un trou de l'ave.
La traduction de l'épigraphie n'est donc pas très évidente, d'autant plus qu'il y a manifestement des fautes d'orthographe.
VOTV
ET COM SVMPTV DICATVM *S.F.DET DECORO INCLYT AE ET IVICTISS. CIVITATIS ARVERN.
Votu
= faire un vou ? - Sumptu = dépenses, frais. - Dicatum = dédier.
- Inclyt ae = inclutus ?? = célèbre.
Ivictiss = invincible ?
- Civitatis = cité ?
Sous
la décoration de la célèbre et invincible cité d'Auvergne,
dont je suis le vou, exécutée aux frais de, et dédiée
à.
CLAM
TACITIQVE DIES PEREVNT ET MVTA FERVNTVR SECVLA PER VIGILI SED VOCE SILENTIA RVMPAM
1606
Clam = en secret. - Tacitique = plural perfect participle passive masculine
nominative of taceo. ~ Taceo = garder le silence. - Dies = jour, dans le sens
de « un jour ». - Pereunt = +/- le datif de Periens. ~ Periens = disparaître.
- Muta = changer ?? - Feruntur = third-person plural present passive indicative
of fero. ~ Fero : souffrance, ou faire attention à. - Vigili = la veille.
En
secret et silencieusement, disparu du jour, je fais attention, je veille mais
la voix du silence est rompue.
C'est une traduction TRES TRES aventureuse !!!
NOB.P.BONNAFOS.V.BEGON.E.MEYRAND
ESCHEVINS. DE. LA. VILLE. CAPP-ALLE. D'AVVERNE.
Les Nobles P. Bonnafos, V.
Begon et E. Meyrand, échevins de la ville, capitale d'Auvergne.
La dédicace pourrait être reformulée ainsi, mais dans ce cas, il n'existe plus aucun lien littéral avec le texte réel : Je suis le vou de la célèbre et invincible cité d'Auvergne et j'y suis dédiée. J'ai été exécutée aux frais de cette cité. Ma décoration est celle de cette ville. J'avais disparu dans la discrétion. De retour, je veille sur le peuple, la voix du silence est rompue, 1606 (date de fonte). Les nobles (cités) sont mes commanditaires.
Cette idée de veille sur le peuple, bien que très difficilement traduite, pourrait faire penser que ce timbre est donc effectivement un tocsin, cette cloche ayant alors le but de « veiller » au peuple, et donc de prévenir des incendies, des invasions, des guerres, etc.
Les échevins de Clermont-Ferrand : P. Bonnafos, V. Begon, E. Meyrand, sont les probables donateurs. Ils sont aussi peut-être les commanditaires. Cela fixe en tout cas de manière claire qu'il s'agit d'une cloche civile, elle n'a rien à voir avec une cloche religieuse. Il a été évoqué oralement que cette cloche a servi de tocsin durant une période. C'est entièrement possible, mais ce n'est pas un tocsin à la base. La cloche n'a pas la forme d'un braillard mais celle d'une cloche conventionnelle. En contrepartie, on remarquera qu'il y a une bélière et un battant. Curieux pour un timbre... Le baudrier est inexistant, le sommet de battant est un crochet plus que sommaire. En bas de chasse, il y a un anneau avec un trou (le trou de l'Ave est le nom littéral de cette particularité), ce qui fait penser - comme dans un carillon en somme - qu'il s'agissait d'un battant tiré. Il s'agit peut-être là, justement, du battant permettant de sonner le tocsin. Cependant, il faut bien préciser que ce battant n'a rien d'une fabrication médiévale.
Il est mentionné : Capitale d'Auvergne, en abrégé et avec des fautes d'orthographe.
Les blasons, avec les fleurs de lys, ne représentent rien de connu à mon niveau. Ce n'est ni le blason de Clermont, ni celui d'Auvergne, ni celui du Chapitre.
Selon Gilbert Rouchon (Notre-Dame de Clermont, son chapitre, sa cathédrale, son quartier. Clermont-Ferrand, Imprimerie Générale, 1934), la traduction serait assez différente de ce que nous donnons, ce qui peut se comprendre sans difficulté. Nous ne possédons pas cette publication. Cette cloche aurait été fournie par un horloger de Ruffec (lequel, Charente ou Indre ?), nommé Louis de Marcq, pour la somme de 500 écus.
Notre
lecture de la dédicace diffère légèrement de Craplet
et Aleil, notamment parce qu'ils donnent lecture des mots suivants : INVCLYTAE
[nous sommes d'accord sur le AE collé au bout, par contre il y a un V de
trop]. CONSUMPTU [Pour notre part, nous lisons COM SUMPTU, éventuellement
en un seul mot]. FERENTUR [Nous lisons FERUNTUR]. Pour eux, les figures sont :
les armes de Clermont-Ferrand, entourées de laurier, les armes de France
et une croix décorative. Ils citent Rouchon eux aussi : En l'année
1608 (SIC), la ville décida de placer à la Bayette une cloche qui
annonçât les heures au dehors. Un horloger de Ruffec, Louis de Marcq,
fit marché avec les échevins de l'établir au prix de 500
écus. De Marcq fondit et plaça la cloche qui existe encore.
La
Bayette, cloche encagée.
Diamètre et tangentielle inconnus, il n'est pas possible d'ouvrir
la cage sans travaux. Le diamètre fait 68 cm (source,
PF. Aleil et B. Craplet, Les cloches du Puy-de-Dôme, 1995, Asbla
de Clermont).
Nombre
de filets à la fourniture : 5
Nombre de filets à la pince : 3
Anses
sans décoration, assez rondes.
Epigraphie en textura / au cerveau :
IE FUT FAICTE EN L'AN (coquille Saint-Jacques) 1581 (coquille Saint-Jacques)
Médaillons
: Saint-Michel, un christ en croix frustre et abîmé, Saint-Martin
qui coupe son manteau, une vierge à l'enfant (?), Saint-Paul (?), un chevalier.
Les
deux Lhéritier-Dubois : 1827. Dans la tour de la Bayette.
LH1 -
Diamètre : 158 cm, Tangentielle : 123 cm. Epaisseur au bord : 14,5 cm.
LH2
- Diamètre 140 cm, tangentielle : 112 cm. Epaisseur au bord : 13 cm.
Anses
possédant des visages, les LH1 et LH2 sont différents, les visages
de la LH2 sont plus bouffis.
LH1
CHRISTUS
REGNAT VINCIT IMPERAT IN HAC BASILICA BEATAE VIRGINIS AD USUM ECCLESIAE CATHEDRALIS
/ CLAROMONTENSIS BENEDICTIONEM AB ILLUSTRISSIMO ET REVENDISSIMO DD EPISCOPO C
A H DUVALK DE DAMPIERRE / SUSCEPI ET NOMEN AD STEPHANO CAILLOT DE BEGON VICARIO
GENERALE ET DA ARMANDA MARIA LUDOVICA ELISABETH DALLONVILLE UXORE COMITIS ALEX
LUDOV DALLONVILLE REGI A CONSILIIO PROVINCIAE VERO PODII DUMENSIS PROEFECT ORDINE
REGII S. LUDOVICI EQUITIS NECNON LEGIONIS HONORIFICAE PRAEPOSITI.
ECCLESIAE
PROCURATORIBUS E CLERO ECCLESIAE PROCURATORIBUS E LAICIS
CAIO DE BEGON VG BOIROT
RAYMOND
COLLIN DE GEVAUDAN VG RISPAL
ARRAGONES DE LAVAL CC BLATIN
DANGLARD
DE BASSIGNAC C DE PROVENCHERES
GIRAUD PARROCHO MAUGUE - BELLEAU
COUDERT
C
LHERITIER-DUBOIS FR 1827
LH2
DEO
OPT. MAX. + IN HAC BASILICA BMV LT AD USUM PARROCHIAE CATHEDRALIS CLAROMONTENSIS
BENEDICTIONEM ILLUSTRISSIMO ET REVENDISSIMO DD EPISCOPO C A H DUVALK DE DAMPIERRE
SUSCEPI ET NOMEN AD BENEDICTO BONNADIER VOILLIAT TRIBUNALIS COMMERCII PRESIDE
ET A D^ MARIA ARCHIMBAUD LAGARDE DAUBUSSON.
ECCLESIAE PROCURATORIBUS E CLERO
ECCLESIAE PROCURATORIBUS E LAICIS
CAIO DE BEGON VG BOIROT RAYMOND
COLLIN
DE GEVAUDAN VG RISPAL
ARRAGONES DE LAVAL CC BLATIN
DANGLARD DE BASSIGNAC
C DE PROVENCHERES
GIRAUD PARROCHO MAUGUE - BELLEAU
COUDERT C
LHERITIER-DUBOIS
FR 1827
Les trois cloches du jacquemart
: non relevé par nous-mêmes.
-Une anonyme de 1503.
-Une
Claude Seurot de 1722.
-Une Claude Seurot de 1729. Tout laisse à penser
que c'est celle la plus à droite.
Tout ce que je puis dire, c'est que
ces trois cloches possèdent de l'épigraphie. La Seurot de droite
possède des blasons sur la faussure. Elles ont l'air toutes trois délicatement
réalisées.
Epigraphie
(d'après Craplet et Aleil).
1 - L'AN MIL CCCCC III MARIA.
2 - A DD
FRANCISCO DE CREPAT CANONICO ET AEDIFICIORUM MAGISTRO CLAUDE SEUROT.
3 - ANNO
DOMINI 1729 CLAUDE SEUROT.
Nous citons Ungerer : Cette horloge, dont ni l'auteur ni l'époque d'exécution ne sont connus, se trouvait précédemment au monastère d'Issoire, d'où elle fut enlevée en 1577, à la suite du siège de cette ville. Deux clermontois, Anne Rigoulet et Antoine Chassalaix, s'en emparèrent et la vendirent à la ville de Clermont-Ferrand, qui la fit d'abord installer à l'église de Saint-Genès, aujourd'hui détruite, et lorsque en 1794, celle-ci fut fermée, l'horloge fut transférée à la cathédrale. En 1844, l'horloger Fois, dit Laroze, l'installa à son emplacement actuel. Il en entreprit, à cette occasion, une réparation complète avec remplacement de différentes pièces usées, à raison de 240 fr., y compris l'entretien et le remontage de l'horloge pendant un an.
Daniel
Fonlupt ajoute : Le mécanisme
originel du jacquemart existe toujours et fonctionne, il a été récemment
restauré (une dizaine d'années). Le remontage est fait électriquement
et la roue d'échappement dit "Thiout" a été refaite.
Relevé des harmoniques
Vous
pouvez écouter chacune des cloches ci-dessous :
https://tchorski.fr/audio/clermont-cl1.mp3
https://tchorski.fr/audio/clermont-cl2.mp3
https://tchorski.fr/audio/clermont-volee.mp3
Enregistrement n°1 : la sonorité éteinte du timbre.
Enregistrement n°2 : Mise en volée de la petite cloche encagée.
Enregistrement n°3 : Volée des deux Lhéritier-Dubois.
CL1,
le timbre. Ses harmoniques sont très très peu développées.
En cause, les deux marteaux sont stationnaires et collés sur la pince.
Si le premier est à peu près fonctionnel (actionné en manuel),
le deuxième est impossible à faire bouger. De ce fait, les harmoniques
sont éteintes. Comme on le comprend bien, ce timbre n'est pas en fonctionnement.
Sans ce défaut, il est assez probable que cette cloche donnerait un son
agréable, et serait largement entendue depuis la place et les rues environnantes.
CL2,
l'encagée. Elle part en volée sur commande au tableau, mais semble
ne plus être tintée.
CL3,
la Lhéritier-Dubois 1.
CL4, la Lhéritier-Dubois 2.
CL1
- Hum : 272,5 Hz. Prime : 424 Hz. Tierce : 522,5 Hz. Quint : 780 Hz. Nominal :
918,5 Hz. Superquint : 1379 Hz. Oct. Nom. 1917,5 Hz. Note : Ab(1)+35.
Au diapason,
C(2)-2, ce qui est la valeur de tierce. Il n'est pas étonnant pour un instrument
médiéval, et de plus bien faussé par un marteau collé,
que la note soit difficile à déterminer. Un do(2) parait raisonnable,
bien que beaucoup d'avis puissent diverger...
CL2
- Hum : 267 Hz. Prime : 543 Hz. Tierce : 636,5 Hz. Quint : 804 Hz. Nominal : 1065,5
Hz. Superquint : 1598 Hz. Oct. Nom. 2205 Hz. Note : Db(2)-35.
Au diapason,
C(3)+31, ce qui est la valeur de la nominale. C'est un instrument médiéval
aussi, donc je n'affirme rien quant à la détermination. Un do(3)
me semble adapté à la taille de l'instrument.
CL3
- Hum : 119,5 Hz. Prime : 262 Hz. Tierce : 297,5 Hz. Quint : 378,5 Hz. Nominal
: 501,5 Hz. Superquint : 749,5 Hz. Oct. Nom. 1032 Hz. Note : C(1)+2.
Au diapason,
plus ou moins C. Curieusement, j'ai eu du mal à déterminer la note.
Cependant, à la volée, elle semble effectivement être un ton
au dessous de sa petite soeur, donc do(1).
CL4
- Hum : 138,5 Hz. Prime : 287 Hz. Tierce : 339,5 Hz. Quint : 433 Hz. Nominal :
570 Hz. Superquint : 850,5 Hz. Oct. Nom. 1169,5 Hz. Note : D(1)-39.
Au diapason,
D très clair, donc ré(1).
Le jacquemart : non relevé. Il est situé à l'intérieur de la cathédrale, dans un bras du transept près d'une entrée. L'une des cloches a un profil assez particulier, elle est évasée. Son profil est celui d'un tocsin, bien qu'il est parfaitement impossible qu'elle ait eu cette fonction. Il est très surprenant que cette sonnerie soit interne à la cathédrale. Quelle était donc la fonction envisagée ?
La sonnerie de volée est donc en do(1), ré(1), do(3). Le timbre serait en do(2). Concernant la volée, un plenum des trois est absolument horrifique. Il est donc clair qu'en code de sonnerie, les deux Lhéritier-Dubois sont utilisées pour les appels aux offices et la petite encagée pour... des occasions particulières, une volée angélus par exemple ? Il est à déplorer que le timbre ne soit plus en fonctionnement et qu'aucun angélus ne soit tinté. Ce document plaide en la faveur d'un rétablissement ! Un 'trois fois trois coups' sur le timbre et une volée sur l'encagée serait peut-être un code intéressant. Dans une utilisation plus restrictive, les LH1 et LH2 donnent très bien ensemble. La CL2 toute seule donne bien aussi. En utilisation séparée, c'est une sonnerie qui ne manque pas d'être agréable.
Les
deux Lhéritier-Dubois.
Les fondeurs
A propos de Lhéritier-Dubois : il ne s'agit pas d'un seul fondeur mais d'une association de M. Lhéritier et de M. Dubois. Le nom « Lhéritier-Dubois » seul, est rare. L'association semble être celle de Gabriel Lhéritier, son frère Gaspard Lhéritier, et François Dubois. Très très peu d'informations sont disponibles sur les Lhéritier, si ce n'est qu'ils sont connus comme des fondeurs locaux (surtout le Puy-De-Dôme, un peu la Corrèze). Les anses sont presque toujours d'une extrême finesse, avec des représentations de visages et même des têtes de vaches (Aix en Corrèze). A propos de François Dubois, je n'arrive pas à faire la part des choses étant donné que son nom est répandu. Ca fait très peu d'information pour deux fondeurs vivants en 1827, ce qui fait supposer un appel aux mauvaises sources bibliographiques.
A propos de Claude Seurot : ce fondeur nous est assez peu connu. Il fait partie d'une famille de fondeurs, qui comprend Mathieu Seurot, Jean Seurot, Jacques I Seurot, Jacques II Seurot, Blaise Seurot, Blaise II Seurot, Blaise III Seurot, Claude II Seurot, Claude III Seurot, Antoine Seurot, François Seurot, Guillaume Seurot. Les variations d'orthographe sont Cereau, Seurat, Saurat, Suvrot, Sevrot et éventuellement Cero. Les Seurot sont assez disséminés, puisque certains proviennent du Bassigny lorrain. Concernant Claude, Mathieu et Jean, ces trois fondeurs ont parfois réalisé des instruments ensemble, cloche de Marat (63) par exemple, et visiblement nous concernent plus que les autres. A propos de Claude, (plus précisément Claude III), il est originaire de Javaugues en Haute-Loire. En généalogie, il est relevé que ses parents seraient Blaise Surot et Anne Duclaux. Il aurait pour frères et sours Catherine Surot, Jean Surot, François Surot. Sa période d'activité est le début du XVIIIème siècle, certains rares instruments vont jusqu'en 1758 (cela provient probablement de confusions entre les 3 Claude au moins, identifiés, car ça parait long). Il semble se cantonner à une production exclusivement régionale, ses instruments sont inventoriés dans le Puy-De-Dôme, le Cantal, la Corrèze, la Creuse ; donc les régions Auvergne et Limousin à notre connaissance. La cloche de Bredons (relevé de Jean-Louis Philippart), porte une inscription assez inusuelle : « + IHS. Maria. Pierre je m'appelle, je marche sur les eaux. Précipite les magiciens. Inspire dévotion. Appelle aux offices divins. Par la fabrique. L'an 1715. ». La mention des magiciens n'est peut-être pas unique, mais en tout cas très rare et fort intéressante. D'après les divers relevés d'inventaires, il ressort que les épigraphies sont la plupart du temps excellentes, la qualité sonore très bonne. Ce sont de belles cloches, ce que Clermont-Ferrand confirme. Sa production semble être en nombre assez important.
Nous allons nous promener dans la cathédrale afin de découvrir tout ce beau patrimoine ! La vidéo a été réalisée en manuel, au tableau. Elle n'est pas une volée d'office, j'ai simplement lancé une volée de deux minutes, afin de montrer à quoi ça ressemble, et accessoirement enregistrer. Il en est de même pour l'encagée. Cela explique que ces volées sont courtes, il n'y a pas d'office prévu.
La
volée des Lhéritier-Dubois.
Les photos sont disponibles ci-dessous, classées par thèmes. J'avertis que c'est énorme, il y en a des centaines. De la même manière que plusieurs autres édifices français, la remarque préalable à l'attention des éditeurs est la suivante : Les images présentées ci-dessous ne sont pas libres de droits. Si vous souhaitez les utiliser, il faut prendre contact avec le Service Départemental Architecture Patrimoine, au préalable. Ce travail est à tous points de vue à but non lucratif. Il ne vise pas à remplacer le travail d'un photographe professionnel. Ces photos sont disponibles gratuitement au besoin, mais cela ne prévaut en rien sur les droits que vous devez acquitter auprès du SDAP.
Bibliographie
- Les cloches
du Puy-de-Dôme - Bernard Craplet, Pierre-François Aleil.
Académie des sciences, belles lettres et arts de Clermont-Ferrand,
Mémoires, tome LIII. P296 et suivantes.
- Les horloges astronomiques et monumentales les plus remarquables, de
l'antiquité jusqu'à nos jours. Alfred Ungerer. Strasbourg,
1931. Compte d'auteur.