L'église
Saint-Saturnin dans le passé.
Ce documentaire est une exploration campanaire du clocher de l'église Saint-Saturnin, à Tours (37), France. Le documentaire a été réalisé par Nicolas Duseigne et Yann Dubois. La moitié des photos est respectivement de chacun d'eux. Un grand merci à monsieur Alain Devineau pour l'autorisation, au service Patrimoine et Urbanisme de la mairie de Tours et à monsieur Jean-Luc Porhel pour son accueil. L'église Saint-Saturnin, située rue Littré, est en état de péril. Elle est, pour cette cause, temporairement fermée au public. Pour un très bref cadre historique, l'église des Carmes, devenue Saint-Saturnin après la révolution, a été construite en 1473 grâce au soutien du roi Louis XI. Il lui donna le titre de 'Chapelle du Roi'. Elle est composée de trois nefs, de différente hauteur, ne possédant pas de transept. La voûte ogivale de la nef du milieu repose d'un côté sur des arcades à plein cintre, de l'autre sur des arcs en tiers point.
A propos du campanaire
Il y a deux cloches dans cet édifice. L'une d'entre-elle particulièrement est difficile d'accès. Les données d'inventaire existantes actuellement sont très confuses et le resteront partiellement.
La cloche Osmond
La première cloche date de 1829. Elle provient de la fonderie Osmond-Dubois de Paris, nommé le fondeur du roi Charles X. Elle a un diamètre de 81 centimètres et un poids estimé de 280 kg. C'est une cloche qui n'est pas rare. Cette fonderie est en effet vieille de 6 siècles, et a réalisé grand nombre d'instruments. Elle était installée dans le IIIème arrondissement de Paris. La fonderie provient de l'association de Robert Osmond (1713-1789) et Denis-François Dubois (1732, au moins 1791). Notre cloche, postérieure à ces dates, provient du fils, dont nous ne connaissons pas le prénom. Il fut partiellement associé à Hildebrand. La fonderie Osmond-Dubois était située au n°187 de la rue Saint-Martin, la fonderie Hildebrand au n°202 de la même rue. Il est décrit dans les « annales des mines », tome 2, de 1827, que : M. Osmond Dubois (.) emploie annuellement 500 quintaux métriques de métal de cloche. C'est dans ses ateliers que l'on a fondu eu 1825 les deux bourdons de l'église Saint-Sulpice à Paris. Il a récemment fourni un grand nombre de cloches pour diverses communes de la France.
Cette cloche ne comporte pas le nom Dubois, mais seulement l'inscription : OSMOND FONDEUR DU ROI A PARIS.
Du point de vue des épigraphies,
elle se reconnait aux aspects suivants :
- 5 lignes de dédicace au cerveau, en lettres romaines, rien au
dessus, un rinceau de palmettes en dessous. Les anses sont fort carrées.
- 3 filets à la pince, 3 filets à la fourniture, une ligne
de signature, surmontée d'une ligne à la jonction de faussure.
Le battant est usagé.
- Un blason strié de lignes horizontales, entouré d'une
couronne de lauriers, le tout répété en faussure.
Ce blason est surmonté d'une couronne et en dessous, il porte une
croix maltée. Il y a fort à parier qu'il s'agit de l'insigne
de fondeur d'Osmond. Un christ en croix à proximité du blason.
- Des fleurs de lys en milieu de robe.
- Une assez grande figure de Saint-Saturnin en pied de faussure.
La cloche disparue
Joseph Berthelé identifie parait-il un fondeur intitulé « Richard » pour cet édifice et une cloche de 1769. Ne possédant pas l'Ephemeris Campanographica, aucune vérification de concordance ne nous a été possible. Nous ne possédons strictement aucune information sur un fondeur Richard dans ce créneau de date et de région.
La cloche inventoriée en MH-PM37000577, actuellement présente au beffroi, tour de l'horloge, à la rue des Halles, provient a priori de Saint-Saturnin. Elle date de manière concordante de 1769. L'église Saint-Saturnin ayant été partiellement détruite à la révolution en 1789, la cloche a probablement été déplacée. Cet instrument sert aujourd'hui de timbre pour l'heure.
Ce que nous pouvons affirmer de manière certaine par ce document, c'est que cette cloche Richard a disparu du clocher de Saint-Saturnin à ce jour.
La
cloche de remplacement
La cloche de remplacement à celle disparue est une Bollée. Vu ses conditions d'accès relativement difficiles, il n'y a pas de détail disponible quant à savoir s'il s'agit d'une Georges, d'une Louis, etc. Il pourrait s'agir d'une Bollée du Mans, datée de 1844. Cela parait tout à fait concordant avec l'aspect et la décoration que l'on peut voir sur les photos.
Du point de
vue des caractéristiques, elle se reconnait aux aspects suivants :
- 3 lignes de dédicace au cerveau, en lettres romaines. Cette dédicace
est surmontée de palmettes descendantes au sommet de cerveau, d'une
guirlande végétale en dessous. Au bas de cette guirlande
figure une lyre incrustée dans le motif végétal.
- 4 filets resserrés à la fourniture, un rinceau de "feuilles
de vigne + raisin" en dessous. Le battant est récent.
- Un médaillon rond sur la faussure, et un christ en croix à
côté.
En résumé donc : une Osmond de 1829, une probable Bollée du Mans de 1844.
L'édifice
L'édifice a très fort souffert de la révolution. Aujourd'hui, l'ensemble est esthétique, malgré la situation de non affectation. Un point à relever, c'est l'étonnante voussure de la nef. Elle est datée de 1864. Elle reproduit avec une exactitude très troublante la voute des grands hospices de Beaune. Si on retrouve à peu près le même lattis, ce sont surtout les entraits de consolidation qui sont copiés. Quant aux engoulants, ce sont pour ainsi dire presque les mêmes ! A titre de comparaison, voici les deux côte à côte.
Les stalles
Là encore, le point mérite d'être soulevé... Nicolas me disait, c'est fou ce que les accotoirs sont semblables à d'autres que tu as pu voir... Ce n'était pas qu'une simple vue de l'esprit.
Les stalles de l'église (actuellement) Saint-Saturnin sont à de nombreux titres exceptionnelles. Elles proviennent de l'ancienne abbaye de Cormery, entre Loches et Tours. Ces stalles, encore partiellement présentes à Saint-Saturnin, sont en départ. En effet, six stalles ont réintégré le chour de l'église Notre-Dame-du-Fougeray à Cormery en 2006, après restauration par un spécialiste, Michel Prieur. Ces stalles datent du XVème siècle, en principe une période étalée de 1452 à 1476. Dix-huit autres stalles attendent leur rénovation, actuellement stockées en Saint-Saturnin. Les conditions initiales de transport de ces stalles de Cormery à Saint-Saturnin ne sont pas encore bien connues. Elles auraient éventuellement été acquises par l'abbé Voisine vers 1843, date à laquelle il a été nommé curé de la paroisse, cependant elles avaient déjà transité après la révolution.
Ce qui est donc assez troublant, c'est la ressemblance effective des accotoirs et les miséricordes, entre le site de Saint-Saturnin, Tours (37) et Saint-Martin-Aux-Bois (60). A titre de quelques exemples, j'ai disposé en comparaison quelques éléments de Tours à gauche, Saint-Martin à droite.
De là à dire que c'est le même sculpteur, il n'y a qu'un pas, et il est vite franchi. Il n'y a pas d'élément parfaitement identique entre les deux sites. De plus, les parcloses ne sont pas les mêmes, les recouvre sièges sont légèrement différents, les sellettes aussi. L'oeuvre de Saint-Martin est celle de Pierre Samyon, ou plutôt attribué à, pour être exact. Jacques Baudoin, dans La sculpture flamboyante en Normandie et Île-de-France, relève une activité des Samyon, père et fils, en 1493. Je cite : Celle (l'activité) des Samyon débute avec Pierre Samyon et son fils, qui taillaient en 1493 les stalles et le jubé de Saint-Sauveur de Beauvais. Les Samyon ont même exercé leur talents de menuisiers jusqu'à Creil (1510-1516) et Coulommiers (1513). Cela ne conforte pas spécialement l'attribution de celles de Saint-Saturnin à Samyon, étant donné que la période de sculpture identifiée est de 1452 à 1476. C'est légèrement antérieur. En attendant, il faut bien reconnaître que certaines analogies peuvent être troublantes. Nous ne prenons pas le risque d'attribuer ces stalles à un sculpteur particulier pour le moment.
Bibliographie
- Médiévales, n°49, 2005, Hélène Noizet,
De l'église au territoire : les paroisses à Tours (XIe-XIIIe
siècles).
- Hélène Noizet, La fabrique de la ville : espaces et sociétés
à Tours, IXe-XIIIe siècle.
- Tours ses monuments, son industrie, ses grands hommes, guide de l'étranger.
Alex G. 1844.
- Saint Grégoire et les origines de l'église de Tours, Abbé
Rolland.
- Ministère de la culture, base Palissy.
- Notice PM37001235 des MH, Notice IM37000218 des MH.
Nous allons à présent visiter l'édifice !
Ouvrons
des portes depuis longtemps fermées.
Voici
Saint-Saturnin.
Le chemin vers les cloches
L'église
étant abandonnée, ou du moins plus en usage actuellement, certains
passages sont dans un état de délabrement assez avancé. C'est
malheureusement la menace qui pèse sur un bon nombre d'édifices,
en France comme en Belgique.
Un
locataire.
Il
faut passer dans ce comble.
C'est
un comble à plancher plat posé sur le bateau renversé de
la voute de nef.
Vu
son âge, ce chemin est devenu un peu hasardeux.
Pourtant,
il est relativement récent vu qu'il a été entièrement
incendié à la révolution.
A
l'abside, aux faux entraits et sous le chevron.
Vertigineux...
Au
dessus du choeur.
Ca
commence à être habité !
La cloche Osmond
Les
cloches sont dans un clocheton, pas facile pour les photos...
Nous
voilà partis à la découverte des cloches.