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L'industrie mancelle de fonte des cloches


Lorsque l'on parle de fondeurs de cloches durant l'époque moderne antérieure (1492 - 1792), il vient immédiatement à l'esprit les fondeurs du Bassigny et les grands fondeurs flamands. Ce point de vue n'est certainement pas biaisé vu l'importance des fabrications de l'époque, que ce soit en nombre, en qualité et en prouesse technique. Rechercher plus loin reviendra à citer les fondeurs savoyards (jusqu'alors pas français) et les fondeurs méridionaux. Toutes aussi indéniables, ces traditions relèvent d'une culture historique relativement bien connue. En contrepartie, s'il y a bien une corporation de saintiers dont on ne parle jamais ou seulement très peu, ce sont les manceaux, c'est-à-dire les fondeurs localisés à proximité ou dans la ville du Mans. Le hasard d'un passage dans la région a fait que nous avons recherché le pourquoi de cette lacune.

Encore que, dire jamais serait exagéré. Ce considérant que l'on évoque souvent les Bollée, principalement. Mais à ce titre, trois légères sources de confusion s'installent. La première, c'est que l'on parle souvent des Bollée "d'Orléans", oubliant que des éléments très importants de la dynastie proviennent du Mans : Ernest-Sylvain Bollée, Amédée-Ernest Bollée, Camille-Amédée-Alfred Bollée, (... Amédée Bollée père, Amédée Bollée fils). La seconde, c'est qu'on rapporte souvent Amédée Bollée à l'automobile, alors qu'il posséda un passé dans le campanaire (bien que n'ayant peu apprécié la période). La troisième et dernière, c'est que cette dynastie fait partie de la période " Époque moderne Première ", c'est-à-dire 1792 - 1920. Or, cela ne répond pas à notre interrogation, à savoir que dans la fin de l'époque moderne antérieure, il y avait 3 fondeurs manceaux influents pour 13 fondeurs lorrains de même stature, or donc, pourquoi les manceaux ne sont que rarement évoqués ?

A cela, nous pourrions évoquer une hypothèse, faible mais existante, c'est qu'il reste à ce jour très peu d'instruments et une quantité infime de documents. Nous évoquerons aussi les cas de pauvreté, de difficulté de paiement et de limitation géographique à cause des langages véhiculaires. C'est ainsi que nous proposons d'établir une très petite synthèse sur le siècle des lumières dans la province du Mans en matière campanaire. Ces quelques documents décrivent une activité campanaire qui n'a rien d'extravagante - elle est d'ailleurs réduite à une activité relativement artisanale, et même parfois accessoire, les fondeurs étant dinandiers par ailleurs - mais elle est un intéressant fragment d'histoire de nos cloches. La région est fortement dominée par l'activité de la dynastie Asselin.

Les fondeurs Asselin connus sont les suivants, (ils ont été triés afin de n'avoir que les fondeurs ayant gravité autour du Mans) : Asselin Charles 1er, Asselin Charles II, Asselin Pierre, Asselin Pierre-Louis, Asselin Sébastien. Les fondeurs manceaux de la même période - ce excluant donc les Bollée - sont les suivants : Brisson Jacques, Chaussard, Crepon Christophe, Dieuxyvois ou Dieuxyvoie, Duval Nicolas, Duval Ambroise, Galopin Roulin, Imbault Pierre, Lacoste Denis, Landouillette René, Leblond P., Lechesne, Montarou Noël, Moreau Pierre, Pierret & Quellier, Thibault Jean. Galopin est parfois orthographié Gallopin.

Nous ne répertorions aucun autre fondeur, sauf François Chauvel de Bonnetable, Thomas Chauvel même ville, Nicolas Bourgeois de Chérancé. Ils ne sont pas manceaux mais habitent dans des villages proches. D'autres noms émaillent ce document, mais nous pouvons établir pour chacun des doutes, c'est-à-dire qu'ils sont classés en tant que 'fondeur de cloche incertain'.

C'est presque devenu une tradition, ce type d'article est accompagné des portraits des fondeurs. Je dois bien mentionner qu'il s'agit d'imagination, il est rare de connaître le visage de nos artistes, sauf les Meesters et les Nobles. C'est donc à lire à titre de simple illustration.

Les Asselin

Il est inventorié les cloches suivantes :

-(53) Bree - Chapelle St-Fort - 1 cloche - 1695. Asselin G. Nous ne connaissons pas ce prénom et n'en trouvons aucune trace.

-(53) Sainte-Gemmes - Chapelle de Champfleury - 1718. Asselin Pierre.
A propos de cette cloche et dans une source bibliographique non identifiée, nous relevons le texte de description suivant :
L'abbé Angot constate que par une chance bien extraordinaire, au début du XXe siècle, cette chapelle de Champfleuri subsiste, de style roman (...) La cloche installée dans une petite baie à la pointe du pignon occidental est encore là pour attester que l'ermitage de Champfleuri resta jusqu'au XVIIIe siècle propriété de l'abbaye d'Étival. On y lit cette inscription : L'AN 1718 JAY ESTE DONNEE A CETTE CHAPELLE DE ST JEAN B DE CHAMFLEVRY PAR ILLVSTRE DAME RENEE CHARLOTTE MAGDELAINE DE PEZE, ABBESSE DETIVAL, ET BENITE PAR MESSIRE IEAN DAGAVLT, CURE DE STE-GEMME-LE-ROBERT, ET NOMMEE CHARLOTTE PAR MESSIRE RENE DIORE, PRESTRE, ET PAR DAMOISELLE RENEE DAVID DE MAVBOARD PIERRE ASSELIN MA FAITTE.

-(72) Challes - Eglise - 1 cloche - 1710. Asselin (sans précision de prénom).

-(72) Pruillé-le-Chétif - Eglise - 1 cloche - 1728. Asselin Pierre. En place, 69 cm, 200 kg.

-(72) Sablé - Chapelle St Aquilin - 1 cloche - 1732. Asselin Pierre. 50 cm . Nous pouvons douter de l'existence de cet objet et qu'il s'agit en fait de la cloche de Solesmes

-(72) Sablé - Eglise St Martin - 1 cloche - 1722. Asselin (sans précision de prénom).

-(72) Savigné-l'Evêque - Eglise - 1 cloche - 1738. AsselinE. Le E supplémentaire provient assez probablement d'une erreur de lecture sur la cloche, ou d'une faute d'orthographe du fondeur, bien que sa signature laisse à penser qu'il sait écrire.

-(72) Solesmes - Chapelle St Aquilin - 1 cloche - 1732. Asselin Pierre. Hauteur 50 cm. C'est la cloche la plus connue des Asselin, étant donné qu'elle est reprise en Palissy.
Inscription : PIERRE ASSELIN M'A FAITE EN 1732, JESUS MARIA

-(72) Souvigné-sur-Sarthe - Eglise - 1 cloche - 1764. Asselin (sans précision de prénom).

A cela, nous ajoutons l'identification d'une anonyme :
-(72) Lombron - église - 1 cloche - 1736. Pierre Asselin. Nous aurions bien voulu le vérifier et ainsi annoncer une bonne nouvelle, mais le maire monsieur Gremillon et le prêtre monsieur Bregeon, sont incapables de répondre aux requêtes, année après année.

Selon mes sources, nous lisons en effet :
Le Dictionnaire des Artistes et Artisans Manceaux des abbés G. R. Esnault et T. L. Denis t. 1. p. 3-6, nous apprend encore que ces deux artisans fondirent nombre d'autres cloches mancelles. Sans compter celle qui, descendue du beffroi de Saint-Julien en Champagne, se trouve aujourd'hui chez le savant collectionneur M. Chappée. Nous pouvons citer encore, à l'actif des Asselin, les cloches de Brains en 1691, de Thorigné en 1694 et de Teloché où se voyait l'inscription suivante: Ora pro nobis, Sancte ?? L'an 1707 jai étté faicte. P. Asselin.

On verrait encore qu'entr'autres enfants, Charles Asselin eut un fils nommé Pierre qui devint aussi fondeur, et que ce dernier en Juin 1727, à Salle, dans la maison du Régiment, faubourg Saint-Nicolas, fond trois cloches pour la paroisse et fournit, l'année suivante, une clochette à l'église de Domfront-en-Champagne. En 1728, il refond pour Sargé une cloche « fellée sur laquelle il doit n'y avoir aucunes armes ni écussons et qui portoit seulement une inscription en ces termes : In nomine Domini, christiani festinent ad matris Ecclesiae gremium, et crescat in eis devotio. Sancte Albine, or a pro nobis. Anno Domini 1678 » avec une croix accompagnée de plusieurs fleurs de lys. Pierre Asselin fondit encore les deux grosses cloches de Martigné en 1729. Le 23 Janvier 1733, devant François Gendrot, notaire royal au Mans. Charles Le Febvre, marchand entrepreneur de bâtimens et Marie Cousturier, débiteurs de 225 l. audit Asselin pour avoir fondu la grosse cloche de la paroisse d'Yvré-le-Poslin, en conséquence du traité fait entr'eux, et dans l'impossibilité de le payer, lui constituent 111 l. de rente annuelle « attendu qu'ils éioient en société ». Le même fondeur exécute en 1734 les cloches de Connerré et en 1736, celles de Lombron. C'est de l'atelier de ce dernier que sortirent le 5 Mai 1738, trois cloches destinées à l'église de Savigné-l'Evêque. En 1741, il fournit une clochette et un timbre à la fabrique de Mézières-sous-Lavardin, en 1743, il travaille à la cloche de Montreuil-le-Henri. M. LEGROS, Curé d'Arçonnay.

A ces enregistrements, nous ajoutons aux diverses lectures qui précèdent et suivront :

-(72) Connerré - 3 cloches 1734. Pierre Asselin.

-(72) Savigné-L'Evêque - 3 cloches - 1738. Pierre Asselin.

-(72) Mézières-sous-Lavardin - 1 cloche - 1741. Pierre Asselin.

-(72) Montreuil-le-Henri - 1 cloche - 1743. Pierre Asselin.

-(72) Sargé-lès-le-Mans - 1 cloche - 1728. Pierre Asselin.

-(53) Martigné-sur-Mayenne - 2 cloches - 1729. Pierre Asselin.

-(72) Yvré-le-Pôlin - 1 cloche - 1733. Pierre Asselin. Nous en savons peu, si ce n'est que la cloche coûta 225 livres, et que le fondeur eut de grande difficultés à se faire payer (Delaperrelle).

-(72) Villaines-la-Gonais - 1 cloche - 1735. Pierre Asselin.


REVUE HISTORIQUE ET ARCHÉOLOGIQUE DU MAINE - TOME CINQUANTIÈME - ANNÉE 1901. SECOND SEMESTRE.
Copie de l'inscription de la grosse cloche: J'ay été notifiée par M. André Guyonneau, assesseur au Présidial du Mans, et par Anne-Renée de Bellardant, dame de Villaines-la-Gosnais, épouse de M. Gabriel-René de Moloré, écuyer, chevalier de l'ordre de Saint-Michel et président de l'élection du Mans. Honorât Drouard, prestre curé, La Lande, marchand, procureur de fabrique, Pierre Asselin nous a faite l'an 1735.

-(53) La Bazouge-de-Chemeré - 2 cloches - 1701. Charles Asselin I et II.
Le lundi deuxième jour de janvier l'an mil sept cent deux, les deux cloches de la Bazouge de Chemeré ont esté bénies par Me Germain Gohier prestre curé de Bazouges et doyen rural de Sablé, après avoir esté fondues par Pierre et Charles Asselin père et fils, fondeurs de la ville du Mans, le vendredi vingt et cinq novembre mil sept cent un sur le soir, en la grange du presbytaire. Ont esté parreins et marreines, sçavoir de la grosse cloche messire Christophe Jacques de Sevigné, comte de Mommoron, seigneur de ladit Bazouge, et dame Françoise Margueritte Anthoinette de Thibaud de la Roche Thulon, et de la petite messire Pierre Emmanuel de Thibaud, seigneur marquis de la Roche Thulon, ancien colonnel de Dragons, et demoiselle Françoise de Sevigné. Et ont esté nommées sçavoir la grosse, Christophlette Françoise par ledit seigneur comte de Mommoron et demoiselle Françoise Lepage, niepce de venerable et discrept messire Michel Lepage prestre curé de ladite Bazouge, au nom et par representation de ladite dame de Thibaud de la Roche Thulon, marreine, et la petite a esté nommée Perrinne par ledit sr marquis de la Roche Thulon et honorable femme Magdeleine Coüesme, espouze de Me François Raison, notaire royal, et procureur fiscal de ladite Bazouge et Chemeré, au nom et par representation de ladite demoiselle Marie Françoise de Sevigné marreine.
Journeil, pretre
M. Lepage, pretre, curé de la Bazouge

Selon le très long extrait qui suivra, pour une rare cloche connue de Charles Ier Asselin seul, nous pouvons localiser une cloche qui fut fondue pour l'abbaye de Saint-Vincent du Mans.

-(72) Le Mans - lycée Bellevue (ancienne abbaye de Saint-Vincent du Mans) - 1 cloche - 1673. Charles Asselin.
LES ANNALES FLÉCHOISES ET LA VALLÉE DU LOIR - SOCIÉTÉ D'HISTOIRE, LETTRES, SCIENCES et ARTS DE LA FLECHE
L'Ancienne Abbaye de Saint-Vincent du Mans (Sarthe) [extraits]

L'une d'elles surtout, la cloche des heures, de 0m62 de hauteur sur 0m80 de diamètre me frappa par son laconique mais si suggestif langage :
FAIT LAN DE GRACE 1073.

[Ensuite, l'écrivain décrit l'erreur de lecture, il lit alors].

FAIT LAN DE GRACE 1673 DANS LE TEMPS DE
LA SUPÉRIORITÉ DE LA MÈRE MAGDELEINE
LETOURNEUX JÉSUS MARIE JOSEPH
ST AUGUSTIN ST URSULE PIERRE ET CHARLES
ASSELIN NOUS ONT FAIT.
Emblème : une croix d'ornementation à quatre gradins.

Ne savais-je pas, en effet, que de la fin du XVIIe au milieu du XVIIIe siècles, les Asselins, Pierre, Charles ou Sébastien, avaient peuplé de leurs produits campanaires nos clochers du Maine ? Ce Pierre Asselin précisément, fils d'un maître fondeur, Sébastien Asselin et de Jehanne Moreau n'avait-il pas, par un contrat passé devant François Bouvier, notaire au Mans, épousé Charlotte Le Masson, fille des défunts Charles Le Masson et Marguerite Jousse, et que tous deux, habitant paroisse de Saint-Jean-de-la-Chevrerie, prenaient à bail, en 1669, de Marguerite Le Batteux, une chambre haute et une cave, situées paroisse de Saint-Benoît, à la charge « qu'ils ne pourraient faire fondre de leur mestier dans la cave ny chambre, comme aussy ne pourroient vendre aucune boiture au pot ou pinte, sinon du consentement de Marie Trahan », et que l'année suivante, de la même « Marguerite ils louaient une petite boutique, en la rue Dorée, pour trois ans, à raison de six livres par an »

Puis, en 1683, ne le voit-on pas couler deux cloches pour l'église de Souillé, et en 1685 recevoir du procureur de fabrique de Chevaigné-sur-Sarthe la somme de 120 l. pour la façon et le métal d'une cloche neuve que six ans plus tard il remettra au moule.

Par acte du 24 Juillet 1688, il faisait traité avec Pascal Le Roy, curé de Trangé, et s'obligeait « à refondre bien et duement les deux cloches de ladite paroisse qui étoient cassées, réfère icelles, fournir de hunes et de bastans, les rendans sounantes et concordantes poids pour poids, les replacer dans le clocher, à ses despens, risques, périls et fortunes, et de graver sur le bronze l'inscription que lui fourniroit ledit curé, mais sans avoir à payer le charoy pour les aporter au Mans et les raporter à Trangé. »

Entre temps, son fils Charles épousait, en février 1702, Marguerite Hochette, fille des défunts Charles Rochette, marchand poislier et Michelle Compain, et l'année même de son mariage ce dernier fondait avec son père la grosse cloche de Sargé qui deux fois avait été manquée par un autre fondeur nommé Maillard. (1) Or, c'est l'année suivante que, tout en la marquant d'une date fautive, ils fondaient la cloche qui nous occupe.

Notons que ce texte mentionne une source incohérente pour la cloche de Sargé.

-(72) Souillé - 2 cloches - 1683. Charles Asselin I.

-(53) Chevaigné-du-Maine - 1 cloche - 1685. Charles Asselin I.

-(72) Trangé - 1 cloche - 1688. Charles Asselin I.

-(28) Authon Du Perche - 1 cloche - 1763. Pierre-Louis Asselin.

Que savons-nous des Asselin ?

BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE, SCIENCES ET ARTS DE LA SARTHE - T. XXXV, FASCICULE 1.
1767. 23 mars. Pierre Asselin, 23 ans, fondeur de cloches.
1702. 27 février. Charles Asselin, fondeur, épouse Marguerite Rochette.
1743. 30 avril. Pierre Asselin, fondeur, fils de Charles Asselin, marchand fondeur, et de Marguerite Rochette, épouse Anne-Madeleine Le Biais, fille de M. François Le Biais, maître boulanger, et d'Anne Gagnot.

Charles Asselin et Marguerite Rochette sont les parents de Pierre Asselin.
Pierre Asselin nait en 1744, c'est-à-dire 42 ans après le mariage de son père. Source incohérente ! D'autant plus qu'en 1743, il se marie avec Anne-Madeleine Le Biais.
Nous pouvons imaginer qu'il est né 'vers' 1723.
Sébastien Asselin est le grand-père de Pierre Asselin.

La mention discrète du nom de la rue Dorée dans les annales fléchoises ne manque pas d'être intéressante. En effet, tout comme pour les Dieuxyvois que nous verrons ensuite dans ce texte, cette localisation se trouve en premier lieu : à proximité immédiate de la Sarthe, et en deuxième lieu près du clergé, et plus précisément du pont Perrin et donc de l'église Saint-Benoît. On voit que les fondeurs ne perdent pas le nord. Ils s'installent, comme on le devine, de manière précaire, mais dans l'attente quand même, c'est près du client et près de l'eau, les deux étant nécessaires à l'activité.

Quand l'on regarde la rue Dorée d'aujourd'hui, l'on ne peut s'empêcher de penser que ça a peu changé. On se plait à imaginer alors Pierre Asselin en ces lieux.

Si l'on analyse le rayonnement des cloches connues, on remarquera une chose très frappante : elles sont localisées dans un rayon d'action faible, un triangle qui va de Laval à Le Mans à La Flèche. Il n'y a quasiment aucune exception à cette règle. C'est avec difficulté qu'on se porte à Saint-Calais. L'état des chemins n'est certainement pas étranger, il devait y avoir de rudes conditions de transport, quand le fondeur n'était simplement pas obligé d'être itinérant, vagabondant au gré des commandes.

Voilà certainement pourquoi ces fondeurs manceaux sont moins connus que ceux du Bassigny. La réponse est très simple, ils n'exportaient pas. A la même période, les Van Den Gheyn exportaient en Espagne, De Haze aux Pays-Bas. Une déduction simple est de dire que ces fondeurs étaient ce qu'on appelle dans le jargon des FL, c'est à dire des fondeurs locaux. Ils étaient probablement assez pauvres et exerçaient le métier de saintier de manière complémentaire. A côté de ça, ils étaient probablement dinandiers, voire même chaudronnier, c'est attesté pour certains d'entre eux vu les contrats passé avec les échevins et quelquefois portés devant les magistrats. En Belgique, cela se fit beaucoup pour les fondeurs locaux de Dinant, d'où d'ailleurs le mot dinantier, devenu dinandier, technique qui s'est largement popularisée en Auvergne. Par contre, ils n'étaient pas forgerons. Visiblement, il y avait deux corporations, les fondeurs de rouge et de jaune, et les fondeurs de fer. Ils n'étaient à ce titre pas placés sous le même patronage.


Le fondeur François Chauvel.

Les Dieuxyvois / ou / Dieuxyvoie

L'orthographe avec un E à la fin semble plus répandue dans le département du Mans.
De ce fondeur, il n'est connu qu'un nombre infime d'instruments. Nous localisons une cloche à 72, Saint-Mars-d'Outillé. Cette cloche, de 1660, aurait été éventuellement refondue en 1701. Nous relevons ce texte assez intéressant sur la question : 3 mai 1660 - La bénédiction de la grosse cloche a été faite par moi curé soussigné, laquelle a été nommée Madeleine, par messire Urban de Bastard, sieur de La Paragère, parrain, et par dame Madeleine Le Boucher, veuve de messire Louis de Segrais, marraine. Et a été faite par un fondeur, nommé Dieuxyvoie, de la ville du Mans, qui avait marchandé à en faire deux accordantes. Il n'en a fait que celle-là ; il a manqué l'autre, et ce, pour le prix de 50 livres et moi, curé, l'ai nourri pendant 7 semaines avec son compagnon. Signé M Deneu.

Cela signifie donc qu'il y a eu une coulée qui a raté.

Dans le Cartulaire du chapitre royal de Saint-Pierre de la Cour du Mans, G.577. - Registre in-folio, 56 feuillets papier (1606-1607), il est mentionné : 60 sous pour mener lesdits enfants en vendange, 60 sous pour avoir un chapeau à l'un des enfants, 45 sous à Dieuxyvoie, fondeur, pour avoir fondu la petite cloche, 47 livres ; etc. Vu les dates, nous ne pouvons que penser qu'il s'agit de Dieuxyvoie père (?) ou en tout cas d'un ascendant. Quand on compare les prix, il devait s'agir d'une petite cloche.

Dans l'inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790. Série G - G. 91. (Liasse.) - 11 pièces, parchemin, 45 pièces, nous lisons :
Accord entre Bertin Dieuxyvois et la Confrérie pour une nouvelle délimitation d'un jardin dépendant de ladite Confrérie, situé au-dessus de la Fontaine-Habert, sur lequel avait empiété ledit Dieuxyvois (1617). - Baux. - Plan dudit jardin et des propriétés adjacentes. - Maison située rue du Port à l'Abbesse.

Là-encore, la date précoce nous fait penser à un Dieuxyvoie père. Ce qui est très intéressant, c'est que comme pour les Asselin, les Dieuxyvoie se placent près du cours d'eau. En effet, la rue du Port à l'Abbesse existe toujours au Mans, et elle est située à proximité immédiate de la Sarthe. Ceci était conçu, comme nous l'avons vu, afin de pouvoir éteindre les incendies, la fonte des cloches n'étant pas une activité anodine, ce d'autant plus qu'une partie non négligeable du vieux Le Mans était à colombages à cette époque. Notons, là aussi, que l'habitation est située à grande proximité de la cathédrale, ce qui est une manifestation évidente d'une volonté de se rapprocher du clergé, principal commanditaire.

Gallopin Roulin (A ne pas confondre avec les Galopin du Var)

Très peu d'informations existent sur ce fondeur, à peinte quelques mentions éparses, si ce n'est la fonte de la cloche de Congé-sur-Orne. Par contre, ces informations sur la méthode artisanale sont passionnantes ! Elles donnent un bel aperçu des étapes de réalisation d'une cloche, et des dépenses afférentes, en ancien français.

REVUE HISTORIQUE ET ARCHEOLOGIQUE DU MAINE - TOME T39 - P311.
Si, sur ce point, la simplicité était en quelque sorte générale, il y en avait un autre où, tout au contraire, chaque paroisse se piquait d'émulation, c'était à qui aurait la plus belle sonnerie. Pour y arriver, il n'y avait dépenses lourdes et répétées que l'on ne s'imposât, à Congé comme ailleurs. De 1493 à 1558, on y renouvela quatre fois les cloches. Ordinairement l'opération se faisait sur place. Une seule fois, la fonte eut lieu chez un fondeur du Mans, Roulin Gallopin.

Habituellement, le fondeur, ayant fait marché avec les paroissiens, s'établissait dans une hôtellerie du village, et secondé par les ouvriers qu'il amenait avec lui, procédait à la fonte de l'objet dont le poids avait été soigneusement déterminé d'avance. Il arrivait parfois au dernier moment que, poussé par la gloriole de clocher, on se déterminait à en augmenter le volume et la pesanteur. Ainsi, en 1558, sur une observation faite par l'archidiacre dans l'une de ses visites, que pour une paroisse telle que celle de Congé, la sonnerie n'avait pas assez d'importance, on avait résolu de briser la plus petite des cloches pour en utiliser le métal dans la refonte d'une plus grosse cloche. Quand elle fut descendue du beffroi, le remords prit les paroissiens, ils décidèrent de l'y replacer, et l'on alla se pourvoir au Mans de cuivre et d'étain.

Ces matières amenées, le fondeur se mettait à l'ouvre ; on l'approvisionnait de tout ce qui lui était nécessaire pour établir son fourneau, pour façonner son moule. Nos comptes, à ce sujet, entrent dans les détails les plus infimes. Le jour de la fonte une messe était dite, pour en assurer le succès. Retirée du moule, la cloche était bénite, puis montée dans la tour par une escouade d'ouvriers qui, leur travail terminé, se rendaient dans une hôtellerie où, manouvres, procureur et notables de la paroisse, festoyaient aux dépens de la fabrique.

« Item, en l'an du présent compte ledit procureur avecques plusieurs des paroissiens de ladite paroisse, marchanda avec les fondeurs pour refaire la cloche laquelle estoit cassée et convint audit procureur fournir lesdits fondeurs de toute matière nécessaire comme après s'ensuit.
« Item, en faisant le marché de fondre la cloche dudit lieu de Congé, fut despendu par ledit procureur et Roullin Gallopin.
« Item, ledit procureur est allé par un jour pour fere mener ladite cloche au Mans pour ce, en paye et despens.
« Item, à Louis Cabaret qui amena ladite petite cloche de Congé au Mans pour la fondre, et a ramené la première cloche pour ce, en paye et despens.
« Item, pour le coust des cinq cens cinquante livres de métal.
« Item, pour la journée dudit procureur, du huitiesme jour de mars cinquante sept, qu'il se transporta exprès à cheval de sa maison jusques en la ville du Mans acompagné d'un homme de pié pour achapter ledit nombre de trois cens cinquante livres de métal dudit Chaudronnier, marchant, pour ce.
« Et premyer, demye livre de chandelle que ledit procureur bailla auxdits fondeurs pour venir besongner au soir et au matin, pour ce.
« Item, pour un jour de hernoys qui amena de la terre pour faire le moulle de ladite cloche et la fournaise pour la fondre, pour ce.
« Item, payé à Maleffre quinze deniers pour avoir amassé des crotes de cheval pour aider à faire le moulle de ladite cloche, pour ce.
« Item, vingt deniers pour deux livres de bourre pour mectre audit moulle.
« Item, payé pour six livres de suif à Guillaume Péan et à Jehan Moullay, pour servir audit moulle, pour ce.
« Item, troys deniers au petit Royer pour estre allé quérir un bousseau de cendres chez Jehan Bataille pour mettre audit moulle.
« Item, après que ladite cloche fut marchandée, ledit procureur alla à Saint-Mars pour emprunter le noyau du moulle pour faire ladite cloche et les chaires à mettre sous les souftletz pour fondre ladite cloche.
« Item, poyé deux sols six deniers pour ceulx qui firent la fosse pour enterrer ledit moulle.
« Item, pour Jehan Laboureur qui ramena la première cloche neufve au Mans et a ramené l'autre, pour ce en paye et despens.
« Item, a payé à Roulin Gallopin, saintier, comme appert de la quittance, la somme de cinquante livres tournois.
« A payé ledit procureur, en vin de marché, quand les paroissiens marchandèrent avec celuy qui a fait icelle cloche.
« Item, à payé ledit procureur, pour une messe qu'il fist dire le jour de la fonte de ladite cloche et par l'ordonnance des paroissiens, pour ce.
« Item, a payé ledit procureur à ceulx qui tirèrent de terre ladite cloche.
« Item, a payé ledit procureur es despence aux prestres et paroissiens le jour que ladite cloche fut bénis.
« Item, à souper, celui jour pour le soupper dudit fondeur, de son valet et de M. Boutier qui besongnaient à l'esseul de ladite cloche.

Pour un passionné de cloches, les techniques mises en oeuvre n'étonneront nullement, c'est ce qui se pratique encore aujourd'hui, à quelques détails près. Ce qui est par contre impressionnant, c'est de voir la liste et la somme folle de dépenses prises en charge par le clergé. Cette force de détail nous permet bien de comprendre les étapes, la lenteur, et quelquefois les tractations tendues, égrenées de marchandages. Comment s'étonner alors de difficultés de paiements, jugées à tour de bras et plusieurs fois de suite par les magistrats ou les eschevins ?

Continuons le voyage chez les fondeurs sarthois en mentionnant tout d'abord ces fondeurs mineurs ou peu connus :

Landouillette René : Il est (bien) connu de lui deux cloches à la cathédrale de Nantes, et à l'église Sainte-Croix de Nantes. La première, 1658, a été enlevée à la révolution, la seconde de 1663 et 8069 kg, est toujours en place. Cependant, de nombreuses sources concordantes le mentionnent non pas comme manceau, mais du nom de Landouillet, fondeur de cloches et de canons, originaire de Nantes.
Montarou Noël : Aucune information, si ce n'est qu'il fut apprentis chez les Asselin.
Lacoste Denis : Idem précédent.
Imbault Pierre : Aucune information, si ce n'est que (Delaperrelle), il poursuit en justice en 1677 Pierre Asselin (ne serait-ce pas Charles I ?), et Thibault Lacoste, fondeurs, pour demander "réparation face à des injure proférées". Il désirait qu'ils "le reconnaissent pour homme d'honneur et bien vivant dans sa profession".
Brisson Jacques : aucune information.
Lechesne : Ce fondeur est tardif nous concernant (1820-1840), il se rapproche plus des Bollée que des Asselin. Nous citons pour mémoire : Evaillé, 2 cloches de 1840 - La Guierche, 1 cloche de 1823 - La Milesse, 1 cloche de 1839 - Oizé, 1 cloche de 1822 - Thorée-Les-Pins, 1 cloche non datée - Tresson, 1 cloche de 1842.

Duval Nicolas, Duval Ambroise

Les enregistrements suivants peuvent être faits, probablement incomplets :
-(72) - Crissé - 1 cloche - 1674. Nicolas Duval.
-(72) - Ruillé-en-Champagne - 1 cloche - 1651. Nicolas Duval.
-(72) - Saint-Cosme-en-Vairais - 1 cloche - 1649. Nicolas Duval.
-(72) - Sargé-lès-Le-Mans - 1 cloche - 1633. Ambroise Duval. 350 kg.

Nous ne savons que peu de choses sur les Duval. De manière certaine, nous connaissons comme fondeurs Nicolas et Ambroise, par l'épigraphie sur les cloches connues. Sont répertoriés dans la littérature de manière complémentaire, mais dont nous ne savons pas vérifier la source : Bertin Duval et Marc Duval. Il est tout à fait envisageable que ces deux derniers aidaient à la fonte de manière sporadique.

Quelques brefs extraits de littérature nous donnent des bribes sur ces fondeurs.

HISTOIRE COMPLETE DE LA PROVINCE DU MAINE - TOME SECOND - A. LEPELLETIER.
Duval Ambroise, né au Mans, dans la paroisse de Saint-Benoît, vers 1670, fondeur et sculpteur en bronze, très célèbre, se rend en Angleterre, exécute plusieurs beaux ouvrages pour le roi Charles II. Mais, Colbert alors au ministère, et trop intelligent protecteur des arts pour laisser un Français de ce mérite au service d'une cour étrangère, le fait revenir à Paris, lui confie l'exécution d'une partie de ces beaux groupes qui décorent les jardins et les musées de Versailles. Il avait une fille habile dans l'art de son père, et dont les connaisseurs admirent également plusieurs bas-reliefs délicatement fouillés.

Laisdouillette, né au Mans, dans la paroisse du Crucifix, à la fin du XVI e siècle, gendre d' Ambroise Duval, et, comme lui, fondeur très-habile, fut également remarqué par Colbert, qui le mit à la tête de l'importante fonderie de canons, etc.

Ce document nous apprend en outre que, comme les Asselin, les Duval se trouvaient dans la rue Dorée ou dans ses environs immédiats (paroisse de Saint-Benoît). Le quartier devait être tout particulièrement animé par ces coulées, que ce soit pour de la dinanderie, de la sculpture ou du campanaire. On apprend aussi que les Duval n'étaient pas seulement artistes campanaires, mais exécutaient aussi des pièces de bronze dédiées à la sculpture. Cet intéressant document nous complète les données sur Landouillette, et permettrait ainsi de distinguer celui-ci (Laisdouillette), de son homonyme de Nantes (d'où éventuellement et même probablement, une confusion concernant le fondeur de Nantes, qui n'intéresse pas cette étude). La paroisse du Crucifix mentionnée est celle de la cathédrale du Mans, c'est donc très proche géographiquement. Ceci-dit, comment cela pourrait l'être dans cette petite cité médiévale... !

PAROISSE DE CRISSE (Crissé).
Le septième jour de janvier 1674, a esté bénite et baptisée la petite cloche de nostre église, par nous curé soussigné, et a esté nommée Magdelaine par René de Sallaines, escuier, sieur dudit Sallaines et par demoiselle Magdelaine Claire de Sallaines de Lespinay Ladite cloche pèse 511 livres et a esté fondue par M Nicolas Duval ; maître fondeur demeurant au Mans.

REVUE HISTORIQUE ET ARCHÉOLOGIQUE DU MAINE - TOME QUARANTE-HUITIÈME - ANNÉE 1900 - SECOND SEMESTRE.
Les paroissiens ainsi encouragés par l'exemple de cet ecclésiastique ne voulurent pas se montrer moins généreux, et la fabrique bénéficia de leurs largesses. Leurs dons permirent au procureur de faire peindre en 1620 par Simon Girard, une litre armoriée autour de l'église (1) ; de faire refondre, par Nicolas Bourgeois et Ambroise Duval, la grosse cloche (2), en 1626, et la petite en 1628 (3) ; d'agrandir le petit cimetière et d'en achever la clôture, en 1630 (...) L. FROGER.

(2) Les fondeurs reçurent « douze vingt douze livres huit sols tant pour le mestail par eux fourny, pour faire la grosse cloche que pour la fonte d'icelle. » Mêmes archives. Nicolas Bourgeois résidait à Chérancé, et Ambroise Duval au Mans. Cf. Dictionnaire des artisans Manceaux, t. 1, p. 79 et 231.
(3) Les mêmes fondeurs reçurent pour ce travail, cinquante livres. Mêmes archives.

Un terme nous étonne, c'est celui de Maître Fondeur. En effet, en Flandre, le qualificatif Meester n'est donné qu'aux très grands : Van Den Gheyn, De Haze, Dumery, etc. Or nous pouvons douter que Duval soit un maître, vu la peu abondante production ; nous pouvons croire qu'il s'agit d'une erreur involontaire de dénomination.

Moreau Pierre
-(72) - La Ferté-Bernard - 2 cloches - 1689. Pierre Moreau du Mans et François Chauvel de Bonnétable.

Leblond P. : Nous est inconnu.
Crepon Christophe : Nous est inconnu, mentionné dans l'article de Caroline Delaparrelle.
Pierret & Quellier : Nous est inconnu.
Thibault Jean : Nous est inconnu.

Chaussard ou plus souvent Chauchard.
Chauchard Jacques, Chauchard Guillaume, Chauchard Pierre I, Chauchard Pierre II.

Nous mentionnerons aussi les enregistrements suivants, balisés sur la Sarthe et la Mayenne.
-(72) - Assé-le-Riboul - 2 cloches - 1723 et 1773.
-(72) - Auvers-le-Hamon - 1 cloche - 1772.
-(72) - Chérancé - 2 cloches - 1 cloche - 1771.
-(72) - Conlie - 1 cloche - 1782.
-(72) - Moitron-sur-Sarthe - 1 cloche - 1781.
-(72) - Saint-Calais - 1 cloche - 1721.
-(72) - Savigné-l'Evêque - 1 cloche - 1783.
-(72) - Auvers-le-Hamon - 1 cloche - 1772.
-(53) - Beaumont-Pied-De-Boeuf - 1 cloche - 1768.
-(53) - Blandouet - 2 cloches - 1783 et 1786.
-(53) - Martigné-sur-Mayenne - 3 cloches - 1740, 1741 et 1757.
L'étude ne sera cependant pas plus étendue étant donné que ces fondeurs se sont implantés en Lorraine par la suite.

Chauvel François ou Chauveles François, Chauvel Thomas

Ces enregistrements, relevants nous concernant, méritent d'être mentionnés :
-(72) - Beillé - 1 cloche - 1694. Chauvel François.
-(72) - Chérancé - 2 cloches - 1652. Chauvel Thomas et François.
-(72) - La Ferté-Bernard - 2 cloches - 1689. Mentionnées chez Moreau.
-(72) - Vezot - 1 cloche - 1645. Chauvel Thomas et François.
-(27) - Appeville-Annebaut - 1 cloche - 1660. Chauvel François.
-(27) - Les Préaux - 1 cloche - 1669. Chauvel François.
-(28) - Authon-du-Perche - 1 cloche - 1714. Chauvel François.
-(76) - Rouen (St-Ouen)- 1 cloche - 1651. Chauvel Thomas et François.

Auxquelles nous ajoutons :

-(72) - Préval - 1 cloche - 1695. François Chauvel.
Préval, Eglise Saint-Pierre et Paul - Le vendredi 18 novembre, le jour de l'octave de st-Martin 1695 sur les 9 heures du soir la grosse cloche de nostre eglise fut refondue par François Chauvel, fondeur de Bonnétable sous le ballet ; le fourneau était mis (...) La petite porte de la dicte église ; et le trou du moulle sous le sict ballet au devant du siège, le prix faict avec le dit fondeur à la somme de 70 livres sans la nourriture donnée à luy par nous Curé soussigné ; et lui qui a fourni de provisions , scavoir le métal le bois, brique et terre à faire le dit fourneau. Et le dimanche ordinaire la dicte cloche fut béniste par mtre Etienne Dolbeau pêrtre curé et doyen de la Ferté, le parrain à été messire Philippe Jean Guesne Abbé de Perseigne et seigneur de cette paroisse, qui a donné 28 livres, pour son absence nous prêtre curé de la dicte paroisse soussigné l'avons nommée Pierre Philippe, et monté au clocher le mesme jour en foy de quoi avons signé le 3 décembre 1695. M Leoner (paraphe)

-(76) - Jumièges - 1 cloche - 1666. François Chauvel et Thomas Chauvel.
François Chauvel et son fils, fondent la grosse cloche de Jumièges, en 1666.

-(28) - Arrou - 1 cloche - 1705. François Chauvel et Thomas Chauvel.
Assemblée des habitants d'Arrou, faisant un traité avec François Chauvel, fondeur de cloches à Bonnétable, pour fondre la grosse cloche du clocher de l'église d'Arrou et celles des chapelles de Notre-Dame-de-Pitié et de Saint-Benoist, qui estaient cassées.
Réparations : (D'après les assemblées de communautés d'habitants dans l'ancien comté de Dunois par M. Merlet, publié en 1887). C'est encore en vertu de la même décision (délibération du 30 juin 1765) que le 4 mai 1783, ils firent marché avec Joseph Collin et Nicolas Husson, fondeurs du pays de Lorraine, pour refondre la grosse cloche de l'église, moyennant trois cents livres et que, le 26 avril 1789 ils conviennent de donner aux mêmes fondeurs la somme de deux cents livres pour la refonte de la seconde et moyenne cloche de ladite église (G. 4253). Ce n'est pas la première fois d'ailleurs que l'on s'occupait de la réparation de cloches et il fallait que l'ouvrage fût assez mal fait pour durer aussi peu de temps. Le 9 août 1705, à l'issue de la grand'messe trente trois habitants, assemblés « à la tablette du chapiteau de l'église » sous la présidence de Lubin Martin, bailli d'Arrou ont fait marché avec François Chauvel, maître fondeur de cloches à Bonnétable, « pour fondre la grosse cloche du clocher d'icelle église et celles des chapelles de Notre Dame de Pitié et Saint Benoist qui estaient cassées » (E. 3739).

Extrait des minutes des notaires :

E. 2503. (Registre.)- In-4°, papier, 114 feuillets.
1627 (11 déc.)1629 (2 oct.). - Edouard Cheron,tabellion du Chapitre de Chartres.
Procès entre les gagers de Bailleau-le-Pinet Thomas Chauvel, maître fondeur de cloches, pour une somme de 80 liv. réclamée par ledit Chauvel.

E. 3201. (Liasse.) - 138 pièces, papier.
1602 (sept.-oct.). - Barthélémy Guichelin.
Traité des gagers de Saint-Denis-les-Châteaudun avec Michel Chauvel, maître fondeur de cloches à Chartres, pour fondre la grosse cloche qui est de présent au clocher dudit Saint-Denis.

Que peut-on apprendre de ces documents ?Tout d'abord, comme ces fondeurs étaient situés à Bonnétable, on peut imaginer qu'ils sont encore plus marqués par le patois manceau, qui se situe principalement dans une poche située entre Laval et Le Mans. Ca leur a peut-être posé des difficultés en matière d'exportation. Cela dit, ce n'est que pure spéculation.

Une autre référence mentionne des difficultés de paiement. C'était légion à l'époque. De Haze rencontrait des problèmes tout aussi ardus, bien qu'il soit anversois (ce qui est donc éloigné). Asselin se retrouva lui-aussi en difficulté de paiement, ce qui le propulsa quasiment à la faillite. Etaient-ce, comme on vient de le voir, les tractations et les accords oraux qui mettaient ces travaux en difficulté de paiement ?

On remarquera que si le secteur d'activité des Asselin était assez délimité (et justement dans cette zone d'extension du patois du Maine, les Chauvel eux iront jusqu'en Eure-&-Loir (actuelle), assez bien dans le secteur de Courtalain, et jusqu'aux boucles de la Seine vers Rouen.. Au Refond, nous ajouterions de manière hypothétique un certain Michel Chauvel, qui nous est entièrement inconnu.

***

Il ne nous semble pas à l'heure actuelle qu'il y ait d'autres fondeurs manceaux qui soient connus pour cette période de l'histoire. Peu de ces cloches ont survécu aux enlèvements de la révolution, ce qui de manière indubitable, complique toute recherche, ne serait-ce que parce que les cloches ne sont plus visibles en clocher. Cet artisanat campanaire rural ne manque pas d'intérêt et place Le Mans sur un piédestal de ville fort intéressante d'un point de vue campanaire. Il serait difficile de dire que ces petits fondeurs préfiguraient les Bollée, mais ils formaient en tout cas un vivier et des racines pour une industrie qui pris un grand essor quelques décennies plus tard, sans cependant qu'il n'y ait la moindre transition.

Bibliographie En plus de ce qui est mentionné dans le texte :
- Caroline Delaperrelle, La Vie mancelle et sarthoise n°359, Les fondeurs de cloches manceaux du XVIe au XVIIIe siècle.
- Mentionnons qu'il serait intéressant de prendre connaissance d'un récent document (2012), de Bernard Hachin : Baptême et bénédictions de cloches du département de la Sarthe antérieurs à 1790.

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