Une cloche Drouot.
Photo : Irpa.
Réaliser la biographie des Drouot nest pas compliqué, comme peut lêtre létablissement des notices concernant les Chevresson. En contrepartie, cest dense. Les fondeurs sont dune part nombreux et dautre part, le nombre de cloches est très important. Il nest pas toujours établi qui des Drouot a coulé telle ou telle cloche.
Les Drouot sont originaires
du Bassigny. Ils sont très nombreux en ces quelques villages.
Ceux qui ont réalisé des cloches en Belgique et qui nous
intéressent sont les suivants :
- Clément 1 Drouot, Romain sur Meuse.
- Jean-Baptiste Drouot, Romain sur Meuse.
- Martin Drouot, Romain sur Meuse.
- Joseph Drouot, Harréville-Les-Chanteurs.
- Charles Drouot, Hâcourt.
- Clément-Vital Drouot, Hâcourt.
- Paul Drouot, Maisoncelles, Clefmont.
- Clément 2 Drouot, Huilliécourt.
De nombreux autre Drouot existent, quils soient ou non fondeurs.
Nous allons décrire ceux listés ci-après. Des passages
anecdotiques dautres fondeurs Drouot ont existé en Belgique.
Cela sera cité pour mémoire.
Les Drouot sont des fondeurs de la fin du 18è siècle et du 19è siècle. Ce sont des fondeurs majeurs pour la Belgique, autant en nombre quen qualité. Le plus gros bourdon de Belgique (Tournai) est une uvre des Drouot, principalement Jean-Baptiste.
Les cloches Drouot sont parfois qualifiées de qualité inégale. Cest notamment le cas de Joseph Berthelé. Une chose qui est certaine, cest quil y a beaucoup de fondeurs Drouot, dont certains ont exécuté un nombre incalculable de cloches, dautres des quantités minimes. Il y a eu aussi un certain nombre de collaborations, avec des fondeurs de renom : Regnault, Deforest, Simon ; dautres sont des jeunes, on pense à Clément Habert qui avait 15 ans à sa première cloche. Les cloches Drouot, cest donc une vaste entité disparate, il est difficile de juger lensemble. Nous ne pouvons contredire Berthelé quant à la qualité inégale, cest un fait probable. Signalons à simple titre dinformation que jusquici, toutes les cloches Drouot qui furent analysées étaient de très bonne qualité, autant du point de vue métallurgique que du décor et de la sonorité.
Une vue de Romain-Sur-Meuse.
Photo : Google.
DROUOT Clément
1er
Né à Romain sur Meuse le 20 mai 1756 et décédé
en même lieu le 27 avril 1820. Fils de François Drouot,
meunier et non fondeur de cloches.
Il représente nous concernant lorigine des cloches Drouot
en Belgique. Ses travaux sont assez peu répandus et de fait,
peu connus. Il n'est pas le premier des fondeurs Drouot, mais le premier
à avoir réalisé des campagnes en Belgique.
Le 16 novembre 1779, il se marie avec Anne Garnier, la sur du
fondeur François Garnier. Il collaborera de temps à autre
avec Garnier et Simon.
Il n'est pas étudié par Henry Ronot.
DROUOT Clément
II
Né en 1770 à date et lieu inconnus, décédé
le 2 décembre 1821 à Huilliécourt.
Fils de Joseph Drouot (un autre) et dAnne Noël.
Le 31 janvier 1792, il se marie avec Catherine Cornevin. Il a quatre
filles, qui se marieront toutes avec des fondeurs de cloches.
Ses travaux campanaires sont très mal identifiés et quasiment
impossibles à distinguer de son homologue Clément I Drouot.
La signature de Clément II Drouot.
Un second acte,
il est témoin au mariage de Joseph II Perrin.
DROUOT Jean-Baptiste
Né à Romain sur Meuse le 18 septembre 1785 et décédé
à Willemeau (Belgique) le 17 octobre 1845. Fils de Clément
I Drouot et de Anne Garnier.
Il se marie avec Anne Dauvoin le 17 février 1813, à Hâcourt,
où il sinstalle.
Il travaille en collaboration avec Martin et Joseph, ses deux frères, au gré de travaux itinérants. Ce sont ce quon appelle des fondeurs ambulants, qui passent de lieu en lieu à la recherche de commande. Il leur est connu des travaux magistraux en Belgique. Au fil de commandes de plus en plus régulières en Belgique, il finira par sinstaller en Belgique, à proximité de Tournai. Cet emplacement est probablement le lieu-dit appelé Pic-Au-Vent, à côté de Willemeau et de Tournai. Il ne reste à ce jour strictement rien dépoque en ce lieu. Il était en effet réputé y avoir une auberge. De celle-ci il ne reste rien de reconnaissable.
Nous recueillons aussi linformation (daprès le DFIM), que lintéressé loge par périodes dans un établissement appelé « Le Lion dOr », situé rue des Sept Fontaines à Tournai. Ce lieu ne nous est plus connu à ce jour, la rue en question, située à côté de la Rue Saint-Eleuthère, est uniquement résidentielle. Nous pouvons imaginer quil sagit dun hôtel, dont il ne resterait rien à ce jour vu la destruction majeure de Tournai durant la seconde guerre mondiale.
Comme nous le verrons plus loin (Chapitre 'Charles'), il travaille en collaboration au gros bourdon de la cathédrale de Tournai.
Berthelé, dans Campanographie ancienne et moderne, nous apprend que : Jean-Baptiste Drouot a été enterré dans le cimetière de Willemeau.
Berthelé dans le
même ouvrage le décrit comme : Fondeur ambulant pendant
au moins 35 ans ; vraisemblablement élève de son père
Clément Drouot et de son oncle François Garnier. Travailla
en société, mais pas d'une façon régulière,
d'abord avec son frère Martin, ensuite quelque peu avec son frère
Joseph.
Il n'est pas étudié
par Henry Ronot.
Une vue de Hâcourt.
Photo : Google.
DROUOT Martin
Né à Romain sur Meuse le 26 octobre 1788 et décédé
en même lieu le 2 octobre 1831.
Fils de Clément 1.
Le 7 février 1821, il se marie avec Marguerite Dauvoin, la soeur
de Anne Dauvoin, femme de Jean-Baptiste Drouot. A noter pour l'anecdote
combien les mariages hivernaux peuvent être fréquents chez
les fondeurs du Bassigny. En hiver, on n'a pas le temps de s'occuper
de la famille, on se trouve dans les voyages campanaires.
A cette occasion, il se domicilie à Hâcourt, comme son
frère, lieu où il restera jusqu'à son décès.
Mort à 42 ans, ce qui est encore jeune.
Il travaillera essentiellement en association avec son frère Jean-Baptiste, on lui connaît assez peu de travaux : Mons (1820), Tournai (1825), éventuellement Merelbeke. Une note est mentionnée à ce sujet dans les carnets de Joseph Drouot.
Une vue de Harréville-Les-Chanteurs.
Photo : Google.
DROUOT Joseph
Né à Harréville-Les-Chanteurs le 28 janvier 1797
et décédé à Maisoncelles le 14 juin 1864.
Il s'agit du fondeur Drouot ayant eu l'activité la plus prolifique
en Belgique. Le nombre de cloches est énorme.
Joseph Drouot se marie le 7 avril 1823 avec Marie Perrin, la sur de Joseph Perrin, au village de Maisoncelles. Il est domiciliée à Maisoncelles toute la durée de sa vie.
Fondeur de grande réputation, à la production intense, il « partira en campagne » durant 45 ans, se consacrant à litinérance et à la fonte des cloches. Entre 1821 et 1823, il effectuera des collaborations avec Clément Habert, dit le Clémentin. Celui-ci est encore jeune. 1823 sera la fin de la collaboration, inopinée, par le décès de Clémentin, lequel a 33 ans. Il nest pas connu la cause de ce décès, si ce nest que cela se situe en Belgique. Par la suite, Joseph Drouot collaborera avec Pierre Courteaux. Il est notamment connu une période de collaboration entre 1824 et 1827.
Entre 1842 et 1845, celui-ci sinstalle à Saint-Martin au Laërt, à côté de Saint-Omer, à la limite entre le Nord et le Pas-de-Calais. « Il est fait élection de domicile chez le sieur Beauchamp, aubergiste à Saint-Martin au Laërt ». Plus tard, il migre vers Leuze en Hainaut, « où il fait élection de domicile chez le sieur Leclercq, menuisier et cabaretier rue du Bois-Blanc à Leuze ». Cette déclaration date de 1850. A ce jour, il ne reste absolument plus rien d'époque à la rue en question à Leuze. Encore plus tard, on le verra dans lactif de Paul Drouot, dans la fonderie de Sin-Le-Noble.
Il abandonne le métier en 1862. Durant ses activités, il a tenu à jour un (ou des) carnet(s), qui permettent d'apprécier très précisément les fontes réalisées, seul ou avec ses frères ou en collaboration.
Un élément qui permet de reconnaître une cloche Drouot est lutilisation quasiment systématique de ce quon appelle dans le jargon « la palmette Drouot ». Les échanges de matrices étaient plus que fréquents, mais disons que la présence de cette palmette est déjà un élément favorable.
La palmette Drouot
Joseph Drouot. Source : Berthelé.
DROUOT Charles
Né à Hâcourt
le 15 octobre 1814 et décédé en même lieu
le 2 décembre 1847.
Sa production est peu importante.
En cause inévitablement, son décès à lâge
de 33 ans. La seule chose que nous relèverons à son sujet
nous concernant : il participe à la fonte du bourdon Marie-Pontoise
de Tournai.
DROUOT Clément-Vital
Né à Hâcourt
le 24 novembre 1821 et décédé à Saint-Thiébault
le 6 août 1870. Fils de Martin Drouot et de Marguerite Dauvoin.
Il se marie le 28 janvier 1845 avec Marie-Anne-Antoinette Damian (ou Damont), à Insming et a un fils, Charles-Ferdinant Drouot.
Daprès le DFIM, il est lélève de son oncle Joseph. Peu de temps après, il prendra le métier de fondeur ambulant, ses campagnes se situent essentiellement en Lorraine. Il collaborera de temps à autre, les épigraphies en témoignent, avec Antoine-Joseph Hémery. Il abandonnera très rapidement le métier de fondeur, quittant les fontes à l'âge de 32 ans.
Un point nous intéressant : cest lors dune coulée à Deux-Acren, en 1849, quil initiera Léopold Marquebreucq au métier de fondeur. Ce dernier est non-fils de fondeur.
Nest pas un fondeur majeur. Il a collaboré à la coulée du bourdon de Tournai, avec Jean-Baptiste et Charles. Il décède lui aussi assez jeune, 48 ans.
Une vue de Clefmont.
Photo : Google.
DROUOT Paul
De son véritable prénom
Paul-Denis Drouot, il naît à Maisoncelles le 8 avril 1832
et décède à Clefmont le 4 janvier 1906, alors âgé
de 73 ans. Fils de Marie Perrin
(les Perrin étaient eux aussi fondeurs de cloches), il montera
au cours de sa vie deux fonderies transfrontalières et constituera
discrètement la bagatelle de 200 et quelques sonneries de cloches.
Les Drouot perpétuent depuis laube de la tradition campanaire en Bassigny une coutume de fonte en itinérance, comme les Hemony, les Causard, les Farnier. Ils passent de village en village à la recherche de commandes auprès des fabriciens et des évêchés. Cest ainsi que Paul commence le métier, alors âgé de 17 ans, aux côtés de son père Joseph Drouot. Ces voyages sétabliront jusquen 1855, où des cloches dassez faibles tonnages voient le jour. Lavènement des chemins de fer le poussera au choix judicieux détablir une fonderie à Douai, au faubourg Notre-Dame. Auparavant, son père y avait acheté un lopin de terre, dans le clair espoir de sédentariser un atelier. Cette petite usine sera finalement assez rapidement installée à Sin-Le-Nôble, une petite ville du pourtour de Douai, pour des raisons de praticité. Sans pour autant posséder dacte écrit, il est certain quen 1857, cet atelier était fonctionnel.
Joseph Drouot abandonnant le métier en 1862, les travaux mèneront par nécessité vers une courte collaboration avec son frère Charles-Clément ; Par la suite et dès 1863, la fonderie sera dirigée seul et de main de maître jusquen 1883. Les années séchelonnant au gré de commandes toujours plus pressantes, dautres collaborations auront lieu de manière éparse, dont celle avec son neveu Charles Drouot. Lactivité sans cesse grandissante provoque un certain nombre de bouleversements majeurs imminents, la fonderie de Sin-Le-Nôble devant peu à peu exigüe.
En 1886, une succursale est crée à Tournai, elle était située à la rue du Nord. Pleinement investi en ce projet, cest en cette période que la fonderie de Sin-Le-Nôble sera cédée à Charles Drouot. La fonderie de Tournai, pleinement établie en 1893 et par suite de diverses contributions, verra naître lactivité de très grande réputation des Marcel Michiels, père et fils.
Cest en 1895 que Paul Drouot, encore assez jeune, cessera toute activité.
Du côté de la fonderie de Douai en pleine effervescence, Charles Drouot sassociera avec le fondeur Georges Thurin, sous le nom Drouot & Thurin. Après des années deffervescence et au décès de Charles Drouot, latelier sera repris par Charles Wauthy Junior.
***
Afin de conclure sur les
Drouot, nous pouvons avancer les affirmations suivantes :
- En RECIB, il est connu 307 cloches Drouot, à l'exclusion de
celles fondues avec Habert, Regnault, Courteaux, Gaulard, c'est-à-dire
beaucoup. Au total avec eux, la somme avoisine les 500. Ce sont donc
des fondeurs importants en nombre.
- Les Drouot ont fondu des bourdons importants, ce sont donc des fondeurs
prestigieux.
- Ces valeurs sont à l'exclusion des cloches suspendues en France
ou en Allemagne, innombrables.
- En Belgique, les Drouot ont collaboré avec : Clément Habert, Pierre Courteaux, Etienne-Louis-François Regnault, François Lainville, Louis Lainville, Louis Simon, Joseph Simon, Jules Bastien, Jean-Baptiste-Nicolas Gaulard, Joseph Perrin, Nicolas-Bonnaventure Thouvenel.
- Si l'on doit résumer : Joseph Drouot était dans tous les coups, Clément II dans de nombreux. Paul-Denis a fondu les plus récentes.
Il s'agit d'une lignée passionnante !
Bibliographie
-Dictionnaire des facteurs d'instruments de musique en Wallonie, Malou
Haine, Nicolas Meeùs.
-Dictionnaire des fondeurs de cloches du Bassigny, Henry Ronot.
-Base de données de l'IRPA reprenant le fonds De Beer.
-Joseph Berthelé, Mélanges, Campanographie ancienne et
moderne. 1906. Belgique et Prusse rhénane.
-Maurice Thouvenin, relevés généalogiques sur les
fondeurs du Bassigny. Edité au profit des chercheurs.