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Les cloches d'Ostiches (1/3)

 

Cette page est un documentaire sur les cloches d'Ostiches, un hameau de l'entité de Ath. Un tout grand merci à Pascaline Flamme pour l'invitation, merci aussi à Mr Manca pour l'autorisation de faire ces photos. Coordination et aide au reportage : M. L'abbé Marc Lamotte.

Le clocher d'Ostiches comporte trois cloches. Deux d'entre-elles sont tout particulièrement intéressantes. On y trouve donc une cloche de Marcel Michiels Junior (1952) et deux cloches Regnault-Habert de 1808. Ces dernières proviennent d'une collaboration entre les fondeurs Louis-François Regnault et Clément Habert, des fondeurs itinérants du Bassigny. Ces fondeurs font partie de l'équipe des Drouot. On peut clairement émettre la supposition que ces cloches ont été réalisées sur site et qu'il subsiste quelque part au pied de l'église d'Ostiches le vestige d'un ou deux fours. Les cloches Regnault sont devenues très rares dans le paysage campanaire de Belgique.

La cloche Michiels est un remplacement de dommages de guerre. Elle date de 1952. De bonne facture, très classique dans l'art campanaire de Michiels Jr, elle ne possède rien de particulier quant à sa décoration. Au sujet de l'enlèvement de 1943, nous citons l'abbé Lamotte : En 1942, l'abbé Acheroy, curé d'Ostiches, apprenant que l'occupant procède à l'enlèvement des cloches des églises décide d'enlever et de dissimuler une cloche, Séraphine. L'abbé prenait un grand risque, son geste aurait pu être dénoncé aux autorités ce qui lui aurait attiré de funestes représailles. Le 4 septembre 1944, elle sera replacée dans le clocher. C'est le 3 septembre 1943 que l'occupant enleva la cloche Jeanne en laissant Catherine à sa place. En 1948 le ministre de la reconstruction fait savoir que la cloche volée sera remplacée par une nouvelle cloche fondue avec les débris retrouvés de l'ancienne.

A propos de la cloche Jeanne de Regnault-Habert (objet Irpa 10010348), nous constatons qu'elle possède une décoration tout à fait similaire aux deux autres cloches encore présentes en clocher. La sonnerie initiale d'Ostiches était donc trois cloches Regnault-Habert de 1808.

Les deux cloches Regnault sont assez semblables dans leur décoration.
- Une estampille conjointe des Regnault-Habert, nous y reviendrons sous peu.
- Un rinceau sommital géométrique, avec des ovales et framboises pour l'une, un rinceau de framboisiers pour l'autre. Dans les deux cas, les rinceaux sont soignés.
- Un rinceau inférieur constitué par de délicates feuilles de chêne et des glands.
- Des mains indicatrices en début de dédicace constituées par des framboises.
- Une figure de christ en croix, avec une personne implorante, Golgotha figuré avec trois palmettes.

A propos de l'estampille : cette estampille est assez particulière. De grande taille, elle se trouve en fourniture. Elle représente une cloche en haut, un canon en bas. Ce canon est placé sur un objet non identifié : une balance (?) ou éventuellement un socle de canon. Le tout est enserré dans un délicat liseré de lauriers. Si l'on effectue une comparaison avec la cloche de Bouvignies, provenant de Clément Habert seul, on constate la présence d'une estampille tout à fait semblable. Seul le canon et la balance sont absents. On en déduit que :
1/ Le laurier est un élément décoratif qui permet d'enserrer l'estampille.
2/ La cloche du haut représente l'estampille du fondeur Clément Habert.
3/ Le canon du bas représente l'estampille du fondeur Louis-François Regnault. Nous savons en l'occurrence que Regnault était fondeur de canons.

Les harmoniques de ces cloches sont les suivantes :
CL1, Regnault-Habert
Analyse /// Hum : 238 Hz - Prime : 520 Hz - Tierce : 588 Hz - Quint : 729 Hz - Nominal : 971 Hz - Superquint : 1460 Hz - Oct Nom : 2010 Hz.
Nb d'harmoniques détectées : 13
Si l'on compare la fondamentale à l'octave nominale : C(2)-10, C(4)+47, il s'agit d'une cloche moyenne
CL2, Regnault
Analyse /// Hum : 273 Hz - Prime : 572 Hz - Tierce : 667 Hz - Quint : 820 Hz - Nominal : 1106 Hz - Superquint : 1664 Hz - Oct Nom : 2302 Hz.
Nb d'harmoniques détectées : 9
Si l'on compare la fondamentale à l'octave nominale : D(2)-45 et D(4)-34, c'est une cloche franche, bonne, mais pauvre en harmoniques.
CL3, Michiels
Analyse /// Hum : 217 Hz - Prime : 436 Hz - Tierce : 526 Hz - Quint : 667 Hz - Nominal : 898 Hz - Superquint : 1346 Hz - Oct Nom : 1875 Hz.
Nb d'harmoniques détectées : 18
Si l'on compare la fondamentale à l'octave nominale : A(1)-13 et Ab(3)+32, c'est une cloche fort moyenne. Sa sonorité est affectée de battements. Elle est toutefois riche en harmoniques.

La sonnerie est en La-Do-Ré. C'est un accord relativement harmonieux. Le système de volée est en rétro-mitigé pour l'ensemble de la sonnerie.

CL1 - CATHERINE
PARRAIN MAXIMILIEN JOSEPH DELTENRE PROPRIETAIRE ET CENSIER
MARRAINE CATHERINE DELTENRE PROPRIETRICE ET CENSIERE
1808 FAITE PAR L.F. REGNAULT ET J. HABERT.

CL2 - SERAPHINE
PARRAIN ISIDORE THIMOTE COUPEZ PROPRIETAIRE ET CENSIER
MARRAINE SERAPHINE DELTENRE PROPRIETRICE ET CENSIERE
J.F. DETRAUX CURE 1808.
FAITE PAR L.F. REGNAULT ET J. HABERT.

A propos de Clément Habert
Son nom complet est Clément-Joseph-Nicolas Habert. Dans certaines sources, il est mentionné son nom raccourci comme étant Joseph Habert. Nous estimons que c'est un facteur d'erreur, bien qu'il signe parfois (et ici cas présent) de la sorte. Il est souvent appelé « Clémentin ». Enregistré en Refond français car originaire du Bassigny, nous constatons que sa production est essentiellement belge, ou pour ainsi dire exclusivement. En effet, il n'est enregistré aucune cloche de sa part en France. Reste que c'est compliqué à établir étant donné qu'il a collaboré avec Louis-François Regnault, que nous connaissons, Nicolas Thouvenel, Joseph Drouot, soit la belle équipe du Bassigny. De plus, épousant Marie-Rose Bastien, il est le beau-frère du fondeur Jules Bastien, que nous appelons parfois James Bastien. Vu la mixité, autant dire qu'il s'agit plus d'un travail d'équipe qu'une production autonome. Louis-François Regnault est l'oncle d'Habert, il fut son apprenti de 1808 à 1810.

Il nait à Huilliécourt en Haute-Marne le 8 avril 1790. Il décède en Belgique en 1823. Sa vie aura été brève étant donné qu'il décède à 33 ans. Il se marie le 18 novembre 1817 avec Marie-Rose Bastien, ses cloches seront dès lors signées Habert-Bastien. En apprentissage auprès de Regnault provenant du village voisin d'Illoud, il constituera une sonnerie de trois cloches pour Saint-Elisabeth de Mons en 1808. Nous imaginons que ces cloches sont parfaitement similaires à celles d'Ostiches. La plupart de ses collaborations seront effectuées avec Joseph Drouot, dont nous retrouvons une cloche (Drouot seul) à Isières. La cloche de Bouvignies est une collaboration Drouot-Habert. Mis-à-part de dresser une liste de cloches existantes et enlevées, nous ne savons pas grand-chose de plus au sujet de ce fondeur, si ce n'est qu'il sera maire d'Illoud.

A propos de Louis-François Regnault
Bien qu'étant un fondeur à la production relativement soutenue, sa biographie nous est peu connue. Son nom est parfois orthographié Regnaud, la bonne orthographe semble être avec LT à la fin. Fils de Joseph 1er Regnault, il est né à Huilliécourt en Haute-Marne en 1770. Il décède à Illoud le 23 décembre 1856, à l'âge respectable de 86 ans. Dans la tradition séculaire du Bassigny lorrain, il s'installera comme fondeur de cloche jusqu'en 1836. Il s'occupera ensuite sporadiquement de travaux de tuilerie. Il ne fond pas seulement des cloches mais aussi des canons et des statues. Comme évoqué, il s'occupera de l'écolage de Clément Habert, son neveu. Les Regnault sont nombreux en Bassigny, en diverses périodes d'activité. Concernant Louis-François Regnault, il ne lui est pas actuellement connu de cloche en France. En Belgique, ses travaux sont épars et souvent le fruit de collaborations, avec Habert, Thouvenel ou Drouot. Il travaillera en itinérance en Bavière, en Allemagne.


L'église d'Ostiches.


L'abside, dont les travaux viennent d'être récemment achevés.


Pour la montée au clocher, les travaux sont encore en cours.


Vue de l'église depuis le jubé.


Nous voici à quelques pas des cloches.


Il subsiste une armoire à horloge monumentale, mais elle est vide.


Vue d'ensemble du clocher.


Dans un coin reste un ancien volant en bois, parfait témoin du passé. Il faut surtout le conserver.

Les deux cloches Regnault


Voici la première des cloches Regnault.


La seconde est d'une décoration assez proche.


La robe.


L'estampille des deux fondeurs.


Détail sur le canon de Regnault.


La même estampille, sur la seconde cloche.


La signature du fondeur. En dessous, le rinceau de chêne.


Monsieur est propriétaire, madame est propriétrice !

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