Un compte-rendu rempli d'idées reçues absurdes, de gentils stéréotypes, de O barrés, d'un voyage complètement barré (un peu aussi, oui) et surtout, une symphonie spontanée - presque improvisée - de petits bonheurs simples, accompagnée tout de même de quelques A à rond ÅH ÅH ÅH ! Vendredi
Il est prévu que Nico arrive de Paris-Bercy par un Flixbus, à la gare du Nord de Bruxelles. Après avoir rendu une visite (tant attendue) à Mais Barakat à Molenbeek, c'est à pied que je traverse la ville, dans laquelle j'arrive encore à me faire alpaguer par un habitant de Court. Godverdomme ! A la gare, le Flixbus en question est absent et il fait un froid glacial balayé par le vent. Ca caille sa race ! Après une belle attente sans explication (grand classique du désastreux service Flixbus), Nico arrive enfin. Il est un peu plus de 22h30 lorsque nous sommes à Louvain-La-Neuve. Tout va bien ! Samedi Après quelques derniers préparatifs à la bourre, nous prenons la route à 8h30. Le trajet se passe agréablement jusque Maastricht. Ensuite à Venlo (NL), nous rencontrons des soucis majeurs. L'autoroute vers Duisburg (DE) est totalement fermée. Une déviation, indiquée par un seul panneau estampillé 11, fait faire un grand tour qui ramène au même endroit. Après de grandes difficultés, nous essayons de traverser Venlo en son centre-ville, mais au sein d'une circulation calamiteuse, ça ramène au même endroit. Duisburg est inatteignable. Ca devient critique, donc sans chercher plus au-delà, je vais en direction d'Arnhem. A Boxmeer, en improvisation désespérée, Margue est dirigée vers Oberhausen. Ouf sauvé et juste 1h30 de perdue pour cause d'incapables. Soit, passons cela. Il est clair que ça ne vaut pas le coup. A Bochum dans la Ruhr apparait presque immédiatement une circulation totalement bloquée, pour cause de (il-parait-d'après-les-voisins) un tunnel en feu. Le trajet devient très critique. Par chance heureusement ça se libère et il ne se passe rien. Sauvé. Après un trajet difficile, nous avançons enfin. Je prends de l'essence pour Margue à Vechta (DE). Au loin, je vois deux filles faire du stop. Je leur indique de monter. Elles vont à Hambourg, nous à Lübeck. Après vérification, il s'avère qu'on peut globalement assez bien les prendre et les avancer (1h50 de trajet) donc on le fait. Il s'agit d'Evelyn et de Noaa, toutes deux 19 ans, originaires de Warmond (NL) et Appeltern (NL). Elles sont 44 personnes à être parties ce matin, en stop, avec pour concours d'être le premier gagnant à arriver à Hambourg. Certains sont déjà arrivés et d'autres en galère. Nos deux voyageuses avancent bien. Elles disent aimer l'accent néerlandais de Belgique, soyeux, et disent avoir un accent qui cracotte, ce que j'avais d'ailleurs remarqué, voir le CR sur Den Haag. Elles disent vaguement comprendre le danois. L'une sort en néerlandais un Geef me een knuffel qui se dit en danois Giv mig et kram, puis se marre. Elle explique ne savoir dire qu'une chose en français, J'AI-DOUSSE-ANS ! Et précise que ce n'est plus d'actualité, ahah ;-) Comme la route où je devais les lâcher en périphérie d'Hambourg est un truc affreux & ignoble - et en travaux en plus - je les dépose à Anckelmannstraße sur un parking, donc quasiment au centre. Une caravane pourrie git à moitié morte : je leur dis : is dat uw huis om de volgende nacht ? Nous, du coup, on file vers Lübeck et ça se passe bien. La route défile vite, ce n'est plus bien loin. On va vite vérifier le squat, histoire de ne pas avoir de surprise, et comme tout va très bien, on stationne à Parkstraße. Endroit idéal, gratuit, tranquille. On descend dans la vieille ville. Immédiatement, la vieille cité hanséatique se révèle être un conte de fées. C'est très ancien, tout en briques dont un nombre non négligeable en glaçures. Les édifices sont nombreux, préservés, resserrés sur un tissu de ruelles piétonnes. La ville donne cette agréable impression de posséder mille et une strates d'histoire. Les villes de Hanse, Hansestädte, sont des cités dynamiques qui au moyen-âge ont tissé des rapports étroits en matière de navires marchands. C'est, pour reprendre ce qui a affublé Laon un certain temps, la New-York du moyen-âge.
Après un petit tour dans la ville, notablement glacial, nous allons au squat. Localisé dans les bois au fond de l'impasse Am Rittbrook, c'est en pleine forêt. Simplement ce lieu calme permet un 5 étoiles et c'est appréciable ma foi !
Dimanche
Le petit-déjeuner est ce qu'il s'appelle un doux moment où on se pèle les couilles, euh, pardon, on a froid ! Le café pris dans le sac de couchage fait du bien.
Au petit matin, on part visiter Lübeck. Avant de partir, je dis à Nico : on va vérifier l'horaire du Flixbus à destination de Copenhague. C'est à 15h05, c'est parfai Euh Oui sauf que c'était hier, samedi pas dimanche. Je me suis trompé comme un vrai-gros-idiot. C'est constaté dans un mélange d'horreur, de tristesse et de résignation. Je suis vraiment une patate. Echec total ?
Du coup on décide d'aller voir comment se présente l'arrêt Flixbus, tout à fait à l'autre bout de la ville. Précisons qu'il n'y a que 3 bus par jour, un arrêt complètement paumé sans information, localisé sur un bord de route non indiqué. Bref Flixbus... Par première chance, le bus de 8h50 est là, ça permet de voir où c'est (sinon on n'aurait même pas trouvé). Le chauffeur ne comprend rien et en gros nous envoie balader. Deuxième chance, une dame berlinoise prise de compassion nous aide, et dans une dextérité téléphonique affolante, nous trouve les trajets. Elle germanise la problématique avec le chauffeur. Ca s'arrange. Bref, ça devrait en principe le faire sur le 12h05. Nous serions sortis des ennuis.
Nous visitons Lübeck, dans une sorte d'attente mêlée d'incertitude et de chagrin. Il fait très gris, c'est couvert ce matin. Le vent balaye la ville dans une ambiance glaciale. La ville est belle mais purée ce qu'il fait froid. Et alors , que cette ville penche, on en parle ?? Les édifices sont curieusement penchés, mais dans une démesure qui effraie. Ca va tomber ?!?! Problème de portance du sol ? Problématique de bâtiments gigantesques en regard avec la construction en brique ? Problème de cuisson de la brique ? Ca oblique, ça incline, ça fait du dévers Des informations sur cette penchation, je n'en ai trouvées aucune. Ce serait dû au sol (sableux ou marécageux suivant les sources) d'après Les Astres.
De retour au parc municipal, on prépare les gros sacs afin de partir vers Copenhague, le tout dans un soupçon de point d'interrogation. Je m'enquiers auprès d'un vieux monsieur dévorant une banane si le stationnement pose un problème, à grand renfort de wanderung viertägige etc etc, le tout dans un allemand digne de Johann Wolfgang von Goethe. Il me dit qu'on peut rester une semaine sans problème (ah mais le filou, il n'avait pas parlé des fientes de choucas !!!). Bref on abandonne Marguarete à son solitaire sort, et allons tenter de rejoindre Margrethe !
Au Flixbus de 12h05, un conducteur semi-dépressif chipote pas mal, hésite car nous n'avons pas le compte juste, puis finalement dit qu'on changera de la monnaie au ferry à Puttgarden. Oh purée, on monte, on monte. Øøææææh ! Øn vå être des dånøis ! Quelle joie ! Sauvé sauvé sauvé !
Le trajet jusque Puttgarden est pas-mal-moche et morne. De là on embarque dans un ferry à destination de Rødby. Et donc oui, le ferry embarque bien des camions et des trains ! Le temps de la traversée du Fermer Bælt entre l'Allemagne et le Danemark, 40 minutes, on peut se promener sur le bateau. Ca ventile TRES fort ! Le ciel se découvre.
Au passage de la douane, ça se passe sans ennuis et le chauffeur déclare : bon, bah officiellement bienvenue au Danemark hein, en mode Droopy, mais on peut comprendre. Les paysages du Lolland et du Falster sont globalement vides et mornes. Dès Køge, ça se densifie et ça devient plus joli.
Une dame sur le siège de devant enchaine les shots alcoolisés. Elle nous déclare avoir vécu 27 ans à Hambourg et avoir adoré être revenue à Copenhague, la meilleur ville du monde. Je la charrie en disant que Bruxelles est la meilleure ville, mais elle rit et monte dans les tours : AH NON, c'est Copenhague ! Elle nous en promet des merveilles. Son Hygge (prononcer hüügg, sorte de bien-être danois, j'y reviendrai) et aussi, ah vraiment, la øøøøøøøøøøøl ! Ca se dit eul et ça signifie bière.
L'arrêt des Flixbus à Copenhague est totalement anarchique. C'est un bord de route pourri, encombré de gens qui débarquent sur la voirie.
On file vers un coin plus calme pour prendre une pause et un repas de midi à 16h45 ! Il fait très chaud très beau. A peine arrivé, ça gueule de partout, avec des sirènes de police, des véhicules de CRS qui roulent à fond, dont l'un a son pot d'échappement qui traine au sol. Au loin, une épaisse fumée monte. On interroge un passant, qui dépité dit : bah une manifestation quoi !
Ce furent des émeutes qui ont éclaté en réaction à une manifestation organisée à Nørrebro par Rasmus Paludan, fondateur du parti extrémiste Stram Kurs, connu pour ses sorties provocatrices à l'encontre de l'islam et des musulmans. Il souhaite, par exemple, interdire l'islam au Danemark ou encore annuler la citoyenneté danoise pour les immigrants non occidentaux. Auparavant, il avait recouvert la petite sirène d'une burqa. Loin de tout ça, on prend une pause ensoleillée à la Ny Carlsberg Glyptotek. Un petit chien rêve de manger mon repas ! Le musée est magnifique, émaillé de sculptures soignées.
C'est suite à cela que nous partons enfin visiter Copenhague, la ville aux mille orthographes. Copenhague en français, København en danois, Copenhagen en anglais, souvent CPH un peu partout, parfois aussi Kiøbenhafn en patois. Ca se prononce kbnHAvnn. Je sais ce n'est pas facile.
Idée reçue numéro 1 : Les piétons danois s'arrêtent aux feux rouges. Oui c'est terrible. Même au bord d'une route archi-déserte, si le feu piéton est rouge, ils attendront. Cela provient d'un civisme extrêmement développé chez le danois.
Au fil d'un parcours qui s'annonce comme immédiatement enchanteur, nous partons plein nord en longeant Sydhavnen, un canal-rivière-mer à l'eau extrêmement limpide. A 6 - 8 mètres, on voit le fond. On longe tout d'abord le bâtiment Nykredit, puis le Diamant Noir. La moindre des architectures, même de bêtes bâtiments financiers, est super soignée. Ca nous fait arriver à Christianshavn canal, un port de plaisance, où se trouvent des bornes à eau à profusion. A CPH, trouver de l'eau sera quasiment toujours aisé. A Hambourg quasiment impossible.
C'est à Trangravsbroen que nous faisons une pause repas, bien venteuse mais agréable. Des tables de pique-nique agrémentent les lieux. En réalité, mais j'y reviendrai en fait, 183.500 endroits sont érigés afin de glander en paix. C'est remarquablement agréable.
On longe tous les quais. Tandis que des gens font du sauna puis plongent dans Sydhavnen (oui en fait, en plein CPH, tu peux te baigner, mais si tu veux, va faire ça dans la Seine ou la Senne hein ) d'autres se promènent avec des bouteilles et chantent le long du quai, une quasi-constante d'ailleurs ! Une rebellette nous invite à chanter !
Le squat est un peu difficile à trouver, mais ça va. C'est donc nommé Amager Fælled. C'est une immense prairie, qui s'étale sur 223 hectares. Elle était vouée à la construction, mais les habitants d'Ørestad se sont rebellés en 2017, ce qui a conduit à la protection du site. Sacs de couchage donc.
Il a été compliqué d'établir si c'était autorisé ou pas. A priori plutôt oui. Le camping sauvage au Danemark est autorisé, et des milliers de lieux sont aménagés pour. Ce sont les Lille lejrplads. Des cartes les répertorient. Quant à dormir à l'arrache, la réponse est oui, mais au maximum 2 nuits. La réglementation officielle est : You are allowed to sleep on the forest floor on a mat, in a sleeping bag, with a blanket or tarpaulin, a hammock or the like. Your tarpaulin must not work as a tent, and you are not allowed to damage trees or anything else.
Reste à savoir si Amager Fælled est une réserve naturelle faisant exception, je l'ignore. A priori non.
Le lieu s'avère super. Cependant à cause de la manifestation, et des heurts violents ayant éclaté à Amager-øst encore en soirée, les flics et les hélicos ne cessent de tourner. A cause de cela, nuit 2,5 étoiles. La nuitée est glaciale, la bâche est recouverte de glace.
Lundi
Le petit-déjeuner gelant est baigné des cris incessants des oies qui nous survolent. Constante du pays, il y a des oies partout ! Quittant la prairie dans un soleil qui se promet généreux, le but est de visiter le centre de Copenhague. Une large partie du matériel est planquée dans les roseaux, ça fait un sac moins lourd.
On débute par le fameux Bryggebroen, un pont qui enjambe le mer-canal-truc-beau. On est en heure de pointe, il y a très peu de voitures.
Idée reçue numéro 2 : Les danois font tout en vélo ? Oui ! Premièrement parce que c'est écologique, deuxièmement parce que ça va plus vite pour aller au travail, troisièmement parce que le vélo au Danemark c'est une institution. Ils possèdent des vélos-caisses, créés à Christiania. Avec ça on fait TOUT ! On transporte les courses et les paquets, les mômes, et même Madame conduit Monsieur qui picole allègrement dans la caisse, véridique !
Les vélos ne sont pas aussi dangereux qu'à Amsterdam. Une voie pour eux, une voie pour les piétons, et ça va c'est sympa. C'est un véritable déluge de vélos !! Hallucinante heure de pointe le soir. Les feux rouges lâchent 200 vélos, puis plus rien Ah c'est rouge Ah 200 vélos, c'est vert ! A savoir aussi qu'à Copenhague, il ne faut absolument pas s'étonner si un gars circule en vélo en costard-cravate et une dame avec des talons hauts. C'est normal !
Longeant les quais côté nord du canal, c'est une féérie de beauté. L'architecture est souvent audacieuse, légère, de verre. La vue dans les bureaux, les cantines, les réceptions, donnerait presque envie d'aimer son travail. C'est généralement épuré, blanc, baigné de grandes baies. Peu de bâtiments se cantonnent à une architecture basique. La recherche est partout où pointe le regard.
Plus loin, nous arrivons dans le centre-ville. Alors déjà c'était un peu étonnant, mais en plein centre et face à la gare se trouve le Tivoli. C'est un vaste parc d'attraction où les danois vont se marrer dès les beaux jours arrivés. Dans une ambiance très dense, d'un côté ça crie dans les montagnes russes, de l'autre les gens vont au boulot.
Un train à destination de Holbæk va partir. L'aiguille
de l'horloge fait klonk sur 9h07, paf coup de sifflet, le train
part. Un train à destination de Helsingør a une
minute de retard. Une annonce longuette et contrite s'excuse
pour cet impardonnable retard. Je sens que Les Åstres
vont attraper des envies d'expatriation.
Presque au hasard, mais il faut dire que ça donne envie d'aller gravement partout, nous allons au vaste et magnifique parc Ørstedsparken. Traversée des quartiers anciens, calmes, une synagogue gardée par des militaires, nous arrivons au splendide parc Kongens have, les jardins du roi. Au milieu trône un château élancé, tandis que des militaires font la garde de l'établissement.
A deux pas de là, nous allons au Botanik have, superbe jardin botanique émaillé de serres, de fleurs, havre de paix. Plus loin, nous arrivons au terriblement beau Sortedams Sø, sorte de grand lac traversant la ville. Au loin, un hôpital. Il s'y trouve un curieux ballet d'hélicoptères. Les personnes malades sont acheminées ainsi à l'établissement. Bonjour la nuisance pour le voisinage.
Redescendant vers le bas de la ville, nous traversons un petit cimetière, le Garnisons Kirkegård. Il est magnifique. C'est très boisé. Les tombes sont petites, parfois un simple caillou, d'autres fois des plantes ou des arbres. Ca donne une idée étonnante de la mort. C'est comme un grand jardin de beauté, où chaque petite parcelle est un étal de nature heureuse.
Idée reçue numéro 3 : Les danois sont stricts quant à la mort, car c'est un peuple scandinave rigide. Bah en fait non, vraiment pas. La mort fait partie de la vie, et donc dans les cimetières on pique-nique, on court, on vélote, on bronze. Et quelque part, c'est bien !
En traversant encore, c'est cette fois-ci le Østre Anlæg qui nous accueille, parc émaillé de lacs bucoliques, d'abeilles et d'oies. On y prend notre repas de midi, fameusement ensoleillé, sous les sonorités des trains de la gare Østerport ; un train toutes les minutes, au minimum. On y est bien, c'est amusant, c'est dépaysant.
Plus bas, nous arrivons au secteur des casernes. Les élèves aspirants sont logés dans de vieux bâtiments typiques et esthétiques. C'est beau et on se demande si au final, peu de gens passent par là ; ça a l'air. Ca vaut la peine. Plus bas au Kastelet, c'est une vaste forteresse de type Vauban. Au loin, je vois un attroupement et je devine !
Le paysage change. Une large route permet le stationnement d'une tornade de bus, le tourisme de masse se fait présent. C'est le monument de la petite sirène : Den lille havfrue. C'est le symbole de Copenhague. Les centaines de touristes se bousculent sans ménagement pour faire un selfie devant la statue. Ca dégaine de partout. Il n'y a que deux cons pour photographier non pas la sirène, mais dans l'autre sens, la masse de touristes ;-)
La statue est une copie, tant elle a subi des déprédations au fil des années. On se fait la malle ! Ca ne fait pas de mal, c'est bien, allez hop-hop.
Comme c'est géographiquement adapté, on se dirige vers Christiania. C'est un peu dans un sentiment d'appréhension qu'on franchit la porte symbolique de ce lieu, comme la vieille ville d'Ankara : derrière c'est un autre monde. C'est une communauté autonome, libre, assez anarchiste. Ils ont pris possession d'un terrain militaire abandonné en 1972.
Loin d'être un truc à friches, il s'agit plutôt d'un secteur boisé ancré autour de lacs. Les habitations sont pour la plupart légères, surtout faites de bric et de broc.
L'entrée est un site tagué rempli de nombreux passants. C'est immédiatement désagréable. On y découvre de gros et nombreux panneaux explicites comportant l'interdiction de photographier, de très nombreux dealers (c'est officiel, ou disons toléré), de l'alcoolisme. La défonce aux drogues dures y serait interdite. L'afflux de touristes est clairement axé sur la déglingue, nous restons peu.
Sortant de là en quelques minutes à peine, nous orientons nos pas sur une seconde entrée, qui a l'air moins déglingo. Le paysage s'améliore notablement, car plus aucune défonce n'est présente. En corollaire, le flux de tourisme disparait. Ce sont de longues allées bordées d'habitat léger. C'est le secteur des habitations de Christiania. C'est plus simple, plus sain.
Ce qui est à la fois étonnant et appréciable dans Copenhague, c'est cette systématique simplicité partout. Nous sommes à 1 kilomètre du centre historique et c'est verdoyant, laissé à une nature luxuriante. Les moineaux se bastonnent gravement dans les haies, autrement c'est le silence et la paix. Des vélos passent, des piétons se promènent. Un mec vaguement-punk marche avec une queue de chat (?!?). Tous les moineaux se taisent, puis piou ? Ca reprend. On est dans une capitale ?
L'établissement est envahi de jeunes ados, qui ont un comportement tapageur plutôt amusant. Ca braille, ça rigole, on sent la bonne ambiance. Lorsque l'un sort, il lance un au revoir à Nico, ce qui se dit 'Ses snart' et se dit en abrégé argotique jeune 'Vi Ses', prenant la forme de V'ses.
Idée reçue numéro 4 : Les danois sont froids et distants, car c'est un peuple nordique. Archi faux. On y a étonnamment trouvé un peuple festif. Discret c'est sûr, respectueux encore plus sûr, mais en tout cas loin de la grisaille de l'individualisme parisien. Ils ne te marcheront pas dessus, ne te bousculeront pas, voire même seront prévenants.
L'exemple le plus typique, entre autres il faut le dire, fut cette petite ruelle de Christiania une heure auparavant. Sortant sur un gros boulevard, Kløvermarksvej, un skateur avait mal calculé l'arrivée rapide d'un scooter. Il tombe en arrière, tandis que son skate vole et traverse la route. Un gars arrête le skate du pied et ramasse l'objet. Un attroupement se forme. Les gens voient si tout se passe bien, le gars dit que tout est ok. De la prévenance assez commune, certes, mais soudainement une fille prend le gars dans ses bras et lui fait une accolade, pour le réconforter. Ca se termine comme ça, c'est normal. C'est une ambiance de bienveillance qu'on a retrouvé à pas mal d'endroits.
Nous terminons le parcours de cette journée dans le cur du centre-ville de CPH. On constate qu'il nous manque beaucoup et l'on reviendra. Lorsque je fais une photo en pause longue d'un incroyable clocher tors à pattes de dragons, une dame passe en vélo et fait un grand sourire amusé, le plaisir d'être sur la photo !
Nous rentrons en longeant les quais, toujours aussi agréables. En face, des gens boivent et chantent à tue-tête. Au squat, exactement localisé là : 55.654541, 12.576058, la nuit est 3,5 étoiles. Elle est bien, mais le froid est saisissant. Il gèle. Ca ampute de l'étoile d'avoir aussi froid, mais autrement c'est un bivouac parfait.
Mardi
Le petit-déjeuner est désormais traditionnellement survolé par les oies. C'est agréable. Au cur de cette végétation sobre et belle, on a une difficulté simplement énorme à s'imaginer être dans une capitale urbaine.
Aujourd'hui, nous allons visiter un peu plus des arrières de Copenhague. Nous avons l'intention d'aller voir les quatre statues d'éléphants, massives, situées à la brasserie Carlsberg de Valby. C'est localisé à Ny Carlsberg Vej. Le chemin ne manque pas de piquant, car on s'éloigne de sentiers balisés. Arrivé sur place, c'est une désolation. Le site est au cur d'un gros chantier de rénovation. Les éléphants sont imbriqués dans des coffrages en bois. Ils sont peu visibles. Les gars permettent qu'on rentre dans le chantier, mais ça n'en change pas grand-chose au fond. Dommage !
Du coup, nous prolongeons le parcours par le parc Frederiksberg Have. C'est verdoyant, des lacs au creux de la verdure, des choucas, des oies et l'île aux hérons : 17 compères en train de dormir !
Un curieux monument émaille le parc. Il s'agit d'un arbre à bébés. Ces choses là sont des Suttetræet, un sujet qui fait intégralement partie de la vie courante des danois. Durs à trouver, ils sont essentiels dans leur culture. Ce sont les arbres où les tututes des enfants vont mourir. On les appelle aussi les pacifiers tree. L'enfant ayant grandi, la tute est abandonnée à l'arbre, vers une nouvelle vie qui grandit.
Un groupe de chinois arrive. Ils sont une quarantaine. Ils restent moins d'une minute sur place, dévorent des explications au gré de selfies en avalanche, puis partent.
Nous orientons la promenade vers Nørrebro, dont j'attends pas mal, au vu que le site internet 'Visit Denmark', remarquablement bien fait d'ailleurs, le conseillait en tant que pôle multiculturel coloré et enchanteur. Le parcours au sein de Frederiksberg est assez austère. Au gré des rues, je suis temporairement malade, mais ça ne dure pas.
Nous arrivons graduellement sur Assistens Kirkegård, qui est un vaste cimetière abritant des célébrités. A peine entré, on se fait mettre dehors, comme tout le monde d'ailleurs, car la police l'a ordonné. On constate alors que des flics circulent avec des chiens. Aucune idée de ce qu'il se passe à ce moment là. En réalité, c'était une big-connerie. Ils avaient découvert un mec avec une grenade à Blågårds Plads. Du coup ils ont fouillé pour voir s'il n'y avait pas une planque dans le cimetière. Ils n'ont rien trouvé. On visitera le site plus tard en soirée.
Après un repas de midi où on est un peu fatigués, on migre sur le centre de Nørrebro. Au gré du parcours, on arrive dans la rue des bébés. On y croyait plus, mais donc oui c'est vrai !
Idée reçue numéro 5 : Les danois abandonnent leurs bébés. Mais oui ! Bon donc en gros, c'était la grosse idée reçue qui choque les touristes. Les danois laissent le landau en vrac dehors, le temps des courses, parce que ça viendrait jamais à l'idée de quelqu'un de voler et de rançonner. Curieux quand 100 mètres avant, on discute de grenade, enfin soit. La délinquance est zéro parait-il.
Du coup dans cette rue où les magasins 'aide à maman' fleurissent, les landaus sont bien présents. Ca nous fait marrer comme des baleines. D'ailleurs aide à maman, c'est un peu faussé, car l'égalité est de mesure au Danemark, et donc il est très fréquent de voir papa promener bébé-viking.
C'est de la sorte que graduellement, nous approchons le centre de Nørrebro. Il fait très beau, très chaud, on est bien. La place du quartier est un vaste ensemble de jeux pour les mômes, envahi de gamins heureux et d'adultes heureux. Dans une myriade de quartiers d'ailleurs, on verra une profusion incroyable de jeux : des toboggans, des balançoires, des tyroliennes, des cabanes, des trampolines, des cages à écureuil, des skatepark, des terrains de foot, des tables à ping-pong, et honnêtement j'en passe.Tout est gratuit, propre, entretenu, joli. Purée quelle énumération. En résultante, ce sont simplement des mômes qui jouent de partout plutôt que de rester scotchés à leur téléphone. Le Danemark le pays le plus heureux du monde ? Je prenais ça pour un dicton à la con, mais ici ça prend pleinement sa force et ça se laisse comprendre.
Alors que nous regardons le plan de ville sur un papier, une dame s'arrête spontanément pour nous aider à nous orienter. Plus loin, une dame découvrant que nous parlons de-chez-frankrig nous informe que Notre-Dame de Paris a brûlé. Ca fait bizarre d'être au courant comme ça.
Nous jouons sur des espèces d'anneaux sur lesquels il faut se pendre, tandis que je me gaufre au sol telle une vieille confiture. Ca provoque une légère élongation au mollet mais ce n'est pas grave.
Le cur de la place de Nørrebro est célèbre car des lignes ondulées ont été peintes au sol. Ca fait un curieux paysage zébré qui ne manque franchement pas d'esthétisme. Sur cette fameuse pente, des jeunes gens font de la trottinette à fond la caisse et de fameuses figures de skate. Comment ont-ils encore toutes leurs dents ? La question reste posée, mais ça marche !!
C'est en cet endroit que nous faisons la photo de groupe destinée à être envoyée à Evelyn et Noaa, lesquelles feront de même à Hamburg. On pensait que ce serait vite fait, mais cela fait déjà bien deux heures que nous naviguons dans le quartier, envahi de belles peintures murales.
A peine plus loin, nous arrivons dans Østerbro, un quartier peut-être moins exubérant, mais en tout état de cause, aussi accueillant et chaleureux. Au sein d'un magasin de quartier d'une surface de 10 mètres carrés, très accueillant, nous achetons une øl, car il faut bien gouter ça ! Une seule, partagée, au vu des prix élevés, on le comprend.Nous dégustons cela dans un vaste parc, le Fælledparken. C'est accueillant, calme, vert partout. Des gens glandouillent au soleil. Une fois encore, nous sommes dans une capitale ?
Après le repas, nous allons dans les lointains arrières de la capitale, vers la méga-superbe centrale thermique nommée Svanemølleværket et la gare Svanemøllen. On pourrait croire que c'est un bout de la ville tant c'est loin, mais même pas ! Au retour, on traverse un curieux hôpital psychiatrique désert à cette heure. Ambiance bout du monde.
Une chose est certaine, nous avions mal calculé que le logement pour la nuit est à 9,2 km ! Après une journée à pas loin de 30 km, autant dire que ça tire sévère. Petite erreur d'appréciation, mais ce n'est pas grave.
Nous longeons les 5 lacs Peblinge Sø et voisins. C'est invariablement super joli. A partir de Halmtorvet, ça se dégrade un peu. Un mec défoncé joue de la guitare électrique tout en improvisant des chants déglingos. On arrive sur le Tivoli, puis enfin les quais. Comme hier, les gens chantent et boivent. Il est 22h22 lorsque nous arrivons, c'est parfait !
Nuit à 3,5 étoiles. Froid, mais un peu moins.
Mercredi
Le but de cette journée est de faire une excursion en Suède. De ce fait, après un petit-déjeuner traditionnellement glacial, nous montons vers la gare en prenant cette fois-ci plein nord dans les quartiers. Au gré des cours, de multiples jouets de qualité sont laissés en vrac. Qui viendrait les voler ? Nous traversons le fort fréquenté Langebro et arrivons à la gare.
Au guichet, nous sommes accueillis par du personnel méga-prévenant, qui nous explique ce que nous devons faire. Nous prenons le train de 8h27 et 0 seconde et 0 centième et 0 millième ! Ce train traverse le détroit Øresund, sous et sur la mer, tout d'abord en tunnel au Danemark et 'dans' un pont en Suède. Ca reste assez bref, 15 kilomètres, mais original et impressionnant.
Arrivé à Malmö, l'atmosphère est curieuse car immédiatement différente. Au fil d'une ambiance ensoleillée, nous cuisinons un café auprès d'un port de plaisance. Il y a très peu de monde. Les gens n'ont plus l'apparence de vikings barbus, grands et musclés. Ce sont des guitaristes hard-rock nordique, efflanqués, discrets et fuyants. Ahah les gros stéréotypes :-P
La promenade est guidée vers le Torso, une uvre de Santiago Calatrava. La tour est audacieuse et elle est devenue une sorte de symbole de la ville.
Plus loin au bord de la mer, l'ambiance est agréable. Une fille prend en photo des centaines de fientes de mouettes. Projet Malmö-Guanö ? Pas compris. Au gré du parcours, on arrive au Slottsparken. Sous le généreux soleil, nous faisons sécher le couchage. Une petite fille nous désigne et les parents nous regardent absolument horrifiés. Plusieurs personnes ont regardé, gênées. C'est ce qui me pousse à déménager afin d'aller à l'abri des regards.En Suède à Malmö, nous avons ressenti l'impression d'un cadre normatif extrêmement sévère voire même écrasant. Dès que l'on s'éloigne d'une ligne de conduite, on est stigmatisé. Ce qui fut désagréable et réellement vécu dans toute la ville, c'est que cette apparente conduite est superficielle : consommation de masse dans des magasins de chaînes, repas au KFC, fringues de mode et en quelque sorte : Svenska-Saint-Tropez. Cela n'est probablement pas toute la Suède, mais honnêtement Malmö ne fut pas agréable.
Au vu de la pression, je me lave dans Parkkanalen, ne trouvant rien de mieux. Un bateau de touristes passe durant le bain. Mode turbo-clochard enclenché. Pas super.
Dans le centre-ville, toutes les terrasses sont bondées et les rues commerçantes prises d'assaut. Durant que nous donnons quelques miettes à des canards, nous sommes sévèrement jugés par des filles à glaces industrielles häagen-dazs, qui elles préfèrent leur filer des coups de latte, crier sur les mouettes et jeter des cailloux.
Nous poussons la promenade jusqu'au cimetière Sankt-Pauli mellersta kyrkogård. Rien de bien meilleur ne s'offre, du coup nous partons de la ville et retournons à Copenhague en soirée. Le train est rapide et confortable. Arrivé à CPH, l'ambiance immédiatement saine nous fait un bien énorme.
Nous prenons un kebab à emporter au Uludag de la Viktoriagade, truc sans prétention mais qui a l'avantage de proposer des durums pleins de légumes. Nous partons le dévorer au Vesterbro Søfront. C'est extrêmement agréable. Une mouette nous dit qu'elle est ARCHI-mignonne, car elle aimerait bien une part non négligeable du repas. Et c'est vrai qu'elle est chou ! Cela me fait parler du hygge.
Idée reçue numéro 6 : Les danois sont de gros glandeurs ! On ne pourrait leur reprocher. Quand il s'agit de travailler, ils sont sérieux et bosseurs. Quand il s'agit de glandouiller, ils font ça avec soin. Ils ont un climat assez froid et venteux une bonne partie de l'année.
La pratique du hygge [rester positif lors des longs hivers danois] consiste à allumer des bougies, avoir un habitat super chaleureux, soigné, accueillant. On y boit des øl, on y est bien. La période printanière donne l'impression que le moindre morceau de muret sert de hygge. Marche d'escalier, tables à foison, rebord de canal, les gens se mettent ensemble par petits poquets et sont bien. Ce mode de vie hyggelig est difficile à saisir car il est informel. On voit peu de touristes danois car ils sont bien chez eux, au contraire des allemands.
Du coup là où nous sommes, c'est à ce point bien que c'est un conte de fées, encore ! Couleurs, apaisement, ensemble, harmonie. Ca fait un peu penser à cette ambiance du bord du lac à Louvain-La-Neuve, où l'on glande avec le thé ou la Cara tous ensemble, une des rares choses qui va me manquer ici. Réellement Copenhague offre quelque chose de différent de Malmö, même si de tout cela nous n'avons fait qu'effleurer - à peine à vrai dire - la vérité.
Nous migrons brièvement sur le centre-ville, puis afin de ne pas faire comme la veille (c'était quand même éreintant), allons un peu plus tôt au squat. Tout est très bien. Nuit 3,5 étoiles.Jeudi
La ville est déserte car c'est férié, c'est le jeudi saint (Skærtorsdag). Nous prenons une douche de clochard dans un wc près du Langebro. Ca fait du bien de faire un shampoo ! Nous visitons le centre-centre car nous avons toujours circulé autour. Nous passons par le palais, le Christiansborg Slot, puis rejoignons Rådhuspladsen. J'aurais quasiment tendance à dire que tout cela est dispensable. Des flots de tourismes de masse parcourent l'axe commercial linéaire de Rådhushaven à la petite sirène. Une rue à côté égale plus rien. Soit passons, c'est bien comme ça. Ils sont dans ce secteur restreint, allons ailleurs.
Nous prenons une nouille express à Nytorv, puis à l'arrache, partons prendre notre Flixbus à midi. Le départ est tout aussi anarchique que l'aller. C'est une confusion géante.
Le trajet se passe sans encombre, même si c'est un peu longuet du fait que le conducteur a raté le ferry. C'est sans conséquence. A côté, deux filles méga-peintes s'emballent des bouteilles de champagne. Nous on est méga-sales ! C'est un peu les opposés. Nous arrivons à Lübeck à 16h40.
Alors que l'ambiance est franchement ensoleillée, nous complétons les photos. Celles de dimanche étaient marquées par la grisaille. Une mémé à vélo appelle à l'aide car elle est épuisée. On organise le stationnement de son vélo et elle a l'air tellement soulagée. C'est bien. Elle rentre chez elle. Lübeck offre un paysage résolument attractif, cette cité médiévale est belle.
Au parc, je retrouve Margue recouverte de chiures de choucas !! Nous faisons sécher le couchage au soleil. Une dame passant en vélo fait un sourire amusé, ce qui change de Malmö (et fait du bien). Nous prenons un repas au même lieu que dimanche. Arborant un allemand magistralement désastreux, le cuisinier me félicite d'essayer de parler son langage. Il est visiblement touché.
En soirée, nous faisons le trajet vers Hamburg. Ca se passe bien, il y a un peu moins d'une heure. En face c'est méga encombré. Je soupçonne qu'avec le jour férié, les Hamburger vont à la mer, Travemünde probablement. La ville est tentaculaire.
Notre squat à Hamburg se situe à Neuwiedenthal, exactement en 53.465427, 9.873446. Etant donné que la ville d'Hambourg est énorme et glauque, je préférais m'éloigner. Ce secteur forestier est parfait, ce d'autant plus que la liaison ferroviaire de Neuwiedenthal permet de rejoindre le centre en 24 minutes, directement et sans encombre.
Le squat, pour une agglomération de 3,5 millions d'habitants, est excellent. C'est une nuit 4,5 étoiles, moins froide. A 3 heures du matin, un chevreuil nous découvre et gueule sa mère !
Vendredi
Lors du petit-déjeuner, il fait bon. Ca change du gel ! Un geai essaie de nous chasser en imitant la buse et en tournoyant autour de nous. La gare de Neuwiedenthal est juste à côté donc c'est facile. Les lieux ne sont pas avenants. Lorsque je pisse dans un bosquet, deux rats douchés se font la malle à toute vitesse. Le train est quelque part comparable à un métro. Beaucoup d'arrêts, rythme rapide. La ville qui défile est énorme et très urbaine.
A la gare centrale, Hamburg HBF, l'ambiance est sévère et oppressante. Un gars court et crie HAAAALT. Le train ICE part sous ses yeux. Le gars s'effondre au sol à la limite de pleurer.
Dehors, le secteur de la gare est repoussant. C'est à forte pression urbaine. Des centaines de clochards squattent dans le moindre recoin. Nous atteignons la place centrale, Rathausmarkt, qui est complètement déserte étant donné que c'est férié : le vendredi saint. Nous orientons la promenade vers la 'Evangelische Hauptkirche Sankt-Michaelis', dont la cloche Jahrtausendglocke de 9040 kg en tonalité f° du fondeur Bachert de Karlsruhe, fait très plaisir. C'est soyeux.
Plus bas, nous arrivons sur l'Elbe, dont le quai est envahi de touristes sortant d'un bateau Costa ou du genre. Le site n'est pas spécialement plaisant.
C'est en suivant le quai que nous arrivons auprès du magnifique bâtiment Elbphilharmonie, dont l'architecture audacieuse forme des vagues. Contrejour pour moi, mais joli en fin de soirée. Alors que nous faisons une pause auprès d'un embarcadère, charriant des bateaux à touristes, une dame nous interroge si nous sommes sûrs de ne pas monter, parce qu'ils vont partir. Malgré la forte pression urbaine, ça a l'air prévenant.
Plus loin et presque midi, nous prenons un repas à emporter au Café-Brasserie Wildes Fräulein (bonjour Frau De Wilde !). Le service est là-aussi prévenant. La pause de midi est agréable et très ensoleillée. Il doit faire 27 degrés, les vêtements sont un peu inadaptés et excédentaires, mais on est bien. Je prends un hamburger chez les hamburger. Pain traditionnel, sésame, brie allemand, plein de légumes, sain et très consistant. Quelle dose de bonheur !
Dans l'après-midi, nous partons vers les parcs. Cependant, jour férié oblige et soleil radieux, le plan d'eau Binnenalster arbore une infestation touristique de masse écrasante. C'est blindé, fabuleusement en toc. De nombreux clochards font la manche et vendent des conneries de contrefaçon. Au parc Alter Botanischer Garten, c'est encore pire. L'infestation est énorme. Des gigantesques troupeaux bloquent tous les passages, on n'arrive plus à marcher. Normal après tout, certes que leur reprocher en ce jour de congé ensoleillé ?Comme je craque, nous partons quasiment en état de fuite, vers la grosse antenne télé. On est un peu dégradés par l'ambiance de cette ville, mais on va se retrouver, complètement par hasard, sauvés de justesse. Oui donc, je parle réellement de justesse. Depuis la Heinrich-Hertz-Turm, on ne sait pas trop où on est. La consultation des plans génère de la mauvaise humeur assez brutale, étant donné que de ce tourisme de masse, trop c'est trop. Puis sans avoir de plan de visite, on tourne dans la Karolinenstraße.
Soudainement, c'est une transformation complète du tissu urbain. Ca ne gueule plus de partout vulgaire et moche : du calme et curieusement, un quartier anarchiste. C'est le quartier Karoviertel, réputé pour son ambiance décontractée, libertaire, taguée, indépendante.
On y prend une bière dans un petit magasin de quartier,
minuscule mais sympathique. La dame nous donne des capsules
pour Marie-Claire. A ce titre, Hamburg est un délire
de capsules menant Marie-Claire à un stade proche de
l'overdose. Ca boit de partout-partout-partout. Nous dégustons
une IPA dans une cour d'immeuble où des enfants jouent
à chat et souris. Ca fait du bien, franchement.
On termine la visite de la ville par le fameux Elbtunnel, qui traverse la rivière Elbe au gré d'un passage esthétique et original. Dehors, l'infestation touristique est gigantesque et au-delà du soutenable. Les magasins de camelote sont assaillis par des autobus complets. Dans le tunnel qui est moins connu, c'est bien, il n'y a pas foule. Ouf !
Le tunnel est une curiosité. Piéton, il peut à peu près accueillir une voiture via deux ascenseurs. C'est surtout utilisé par les piétons et les vélos. Les murs sont décorés de céramiques arborant les animaux de ce secteur : les silures, les soles, les rats. De l'autre côté, c'est relativement calme. Regarder la berge touristique au loin est effrayant. C'est mégabondé.
Loin de cette agitation, nous remontons les pentes, vers un quartier hype, un peu du genre Toison d'Or à Bruxelles. Ca rigole pas mal et ça picole. Dans une rue peu fréquentée, nous prenons un repas à Shikara, Taubenstraße 21, un restaurant indien. Ca à l'avantage d'être une petite clientèle locale. C'est sans prétention, calme et franchement, en ce dernier aspect, c'est important pour nous en ce moment.
Bon allez, Hambourg on a eu assez, on file vers la gare. La traversée va prendre une bonne heure tant c'est vaste. A la gare centrale, l'ambiance est très hostile. Foule, bruit, oppression, flics, pompiers, c'est une chance que l'on attrape un train immédiat. Super !
Dès l'arrivée à Neuwiendenthal, on se sent mieux. Donc Hambourg, oui bof. Trop urbain pour nous probablement. On établit le squat, toujours en belle étoile, au même endroit. Deux personnes discutent, puis s'approchent. Ils sont à 5 mètres, sur le banc, sans nous voir. Je dis à Nico, fais pas de bruit, mais deux minutes ensuite, il lâche de terribles ronflements !!
Samedi
Comme le réveil a été oublié, on se lève sans heure aux alentours de 5h50. Déjà plusieurs promeneurs arpentent les chemins, sans nous voir. A deux heures et quelques du matin, un chevreuil nous a découvert et a aboyé sa race durant presque 10 minutes. Ahah le pauvre ! Alors que je m'éveillais, un oiseau s'est posé sur moi, avant de se dire que c'était éventuellement un peu anarchiste comme comportement. Ca vaut bien une nuit 4,5 étoiles.
Nous prenons la route de retour. Nous faisons une mission Edeka afin de prendre quelques aliments typiquement allemands, puis faisons une pause à Haltern-Aan-See. Bien que ce soit longuet, le trajet est sans souci majeur, sauf un merdage temporaire où je rentre dans une zone Umwelt à Bochum.
Il est plus ou moins 16 heures lorsque nous sommes de retour.
Ce voyage donne l'impression d'avoir survolé le sujet, tant à Copenhague il y a à voir et tant c'est agréable. Je crois bien qu'au bout de deux semaines, le sujet ne serait pas encore épuisé. C'est après ce séjour que l'on comprend mieux les paroles de la dame du bus, c'est la meilleure ville du monde. Même si ce sont immanquablement des traits grossis, il est vrai que l'on s'attache sans détour à cette ville et cette philosophie. Ailleurs, les inconvénients prennent soudainement de l'ampleur, ce qui s'est retraduit sans fard à Malmö ou Hambourg, pourtant loin d'être des purgatoires.
Oui sincèrement Copenhague vaut un séjour et de l'attention. Probablement plus que la ville en tant que telle, les gens apportent beaucoup, de par leur mode de vie décalé, certainement pas parfait mais qui donne un modèle que l'on envie.
Au-delà du voyage, inévitablement superficiel, c'est cette philosophie qui est touchante. Pourquoi pas être sereins, tout comme ces nombreux inconnus, être ensemble, s'inspirer d'eux quant au monde qui nous entoure, chanter au bord des canaux, donner nous aussi cette bienveillance et/ou la simplicité ? Renommer Raymonde en Hygge Ræmønd ? Nous sommes de tous petits moineaux. Nous grapillons les minuscules graines. Cela peut donner de grands arbres.
Paysage sonore - CopenhagueAu sein de cette page et dans le compte-rendu se trouve le paysage sonore de la ville de Copenhague. Afin de ne pas encombrer le texte, déjà touffu, je n'ai pas disposé les titres de l'album. Pour qui souhaiterait identifier plus précisément les sonorités, les titres sont les suivants :
0:00
- Christiansborg Slot - On the center of Copenhagen, distant
sound of the bells, ringing 9AM. The courthouse walls make a
curious reverberation.
0:52 - Kapelvej - Into a small street corner, some children
playing football. They are happy and make a lot of noise !
5:12 - Christiania, Nordområdet - A bunch of sparrows,
discussing into a grove. Lot of bikes passing, and some pedestrians.
As there's no road, the ground is gravels.
7:56 - Christiania, Gaden - A short walk into the Christiania
district, a free area motivated by anarchism. People discussing,
drinking a lot, and buying drugs to sellers.
14:44 - Christiania, Kaninøen - Sounds of the birds swimming
: Eurasian Coot, Common Moorhen, Greater White-fronted Goose.
At the backyard, the bells ringing 6PM. Pleasant distant sound
with the lake ambiance.
19:28 - Den Lille Havfrue - Posed on a rock, the little mairmaid
is the symbol of the Copenhagen city. A lot of tourists are
trying to make a selfie, while jostling themself unceremoniously.
This is the daily nowadays tourism. A friend said me that Den
Lille Havfrue (the name in Danish) is a tourist trap, but he
said more : it's a black hole ! It was true.
24:28 - Nordre Fasanvej - The Copenhagen metro, into the Fasanvej
station. It's very quiet because Danish people use bikes to
commute.
26:48 - Torvegade - Into the kebab snack restaurant, a lot of
young people are discussing and joking. A teenager is phoning
just near the microphones, inviting a friend to come to the
barbecue.
33:28 - København Hovedbanegården - Walking into
the main Copenhagen station. Some trains are leaving. The station
is globally quiet as a large part of commuters use bike into
the city.
41:08 - Kongens Nytorv - Near a big road, a red light indicates
to pedestrians they can cross. It's a typical sound of Copenhagen.
41:52 - Bryggebroen - During the rush hour, no need to search
the cars, there's very few. In Copenhagen, the rush hour is
simply a downpour of bikes. It's of course very pleasant. Sound
of the bikes on a pedestian and cycling bridge.
45:56 - Nyhavn - During a day off, the main tourist avenue of
Copenhagen called Nyhavn. Most people are discreet.
52:28 - Den Røde Plads - Nørrebro is a funny disctrict.
It's said that Denmark is the happiest country in the world.
We can understand this as you can play (and drink and fraternize)
at every street corner. Here is the sound of children playing
in the swings.
55:04 - Sankt Jørgens Sø - Near a big lake, a
group of Spanish tourists is drinking and screws around the
water.
59:36 - Frederiksberg haves suttetræ - This is a tree
called Suttetræ. It's very common in the Danish culture.
This is a special place where 3 year olds give up their dummies
on graduating to kindergarten from babyhood at the day nursery.
A lot of dummies are hanging on the branches. When we were near
the tree, a group of Asian tourists came, having a very quick
look, and went to the next spot.
Total duration : 61:12 mn
Paysage
sonore - Hambourg
Soundscape of the Hamburg city
Hamburg Geräuschlandschaft
Afin de ne pas encombrer le texte, les titres de l'album sont suivants :
0:00
- Hamburg Hauptbahnhof. The gigantic main station of Hamburg.
Arriving by the S3 line, sounds of the trains. An ICE train
leaving to Karlsruhe and a completely desesperated guy missing
his train.
11:20 - Binnenalster, Ballindamm. On the dock, pigeons flirting.
12:48 - Binnenalster, Alsterpavillon. The Elb (or Elbe) river
is like a big lake. Its extremely traveled by tourists.
This is a short walk in the middle of a devastating mass tourism.
Huge amounts of tourists drinking, people in the bars, regular
calls from tourist boats.
21:44 - On the pontoon. Landungsbrücken near the Elbphilharmonie.
Some tourist boats berthing. At the backyard, sounds of the
Hamburg shipyard.
27:52 - Annenstraße & Paulinenplatz. Children playing
in a park, with the parents.
33:12 - Hauptkirche St. Petri & Speersort. A small demonstration
in the street. One hundred people want more refugees in Germany.
Catholic speech and religious song.
36:30 - Sankt-Pauli-Elbtunnel. The tunnel establishes the link
below the Elb river. The tunnel is mostly cycleable and pedestrian.
Sound of the lifts, and crossing all the tunnel by feet.
42:52 - Planten un Blomen, Großer spielplatz. Into the
huge botanic garden of Hamburg, a colossal amount of children
playing in the park.
47:22 - Grasbrookpark at 12AM. Children playing in a park, with
the parents.
50:50 - The train going to Neuwiedenthal on evening. Some turkish
people talking loudly and a very angry woman with a bike.
58:12 - Hauptkirche St. Michaelis. The very good and pleasant
bell of this Lutheran church, ringing at 10AM. Into the park,
song of a blackbird and pedestrians walking onto the gravels.
Total duration : 65:56 mn