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La péniche abandonnée

Voici la visite d'une péniche abandonnée. Plus précisément que le terme « péniche », il s'agit d'un toueur. C'est un terme de navigation fluviale définissant un bateau servant à remorquer des péniches. Le touage était effectué à l'aide d'un câble. Ce bateau échoué sur le bord du Rhône est très connu, on le trouve régulièrement dans la presse locale. Ni plus ni moins, ce bateau est pour ainsi dire le dernier vestige de ce type de technique. En réalité, il n'existe plus qu'un seul toueur. Il est localisé dans le tunnel de Riqueval, en fonctionnement d'ailleurs.

La péniche que nous voyons aujourd'hui – j'ai du mal à utiliser ce terme car je le sais relativement inexact – s'appelle l'Ardèche. L'embarcation est échouée sur le bord du Rhône au sud de Valence, au port fluvial de l'Épervière. J'ai eu de la chance de pouvoir le visiter sans encombre, car il s'avère d'après un certain nombre de photos qu'un bain de pieds s'avère pour le moins régulier. Par forme d'une chance certaine, j'ai bénéficié d'eaux très basses. Sans exagérer, il semble régulier que le niveau soit un mètre plus élevé. Cela pose inévitablement des difficultés non négligeables.

Le bateau que nous visitons a été construit en 1896. Il servait à tracter les péniches, cette fois-ci de vraies péniches, à contre-courant du Rhône. Dans ce secteur figurant parmi les plus pentus du fleuve, le courant peut-être parfois très fort. De ce fait, en huit sections successives, les péniches étaient tractées à contre-courant à l'aide d'un toueur : ils se passaient le flambeau au gré de manœuvres compliquées et surtout laborieuses. La distance parcourue par chaque remorqueur était de 12 à 15 km. C'est donc très peu négligeable si l'on puis dire ! Le câble s'enroulait sur un énorme treuil que l'on peut encore voir aujourd'hui sur le ponton.

Le touage était quand même assez répandu à l'époque ; fait spécifique du Rhône, il fallait absolument que le câble soit totalement enroulé le soir, sinon avec le courant fort du fleuve, il se faisait ensevelir sous des graviers. Cela signifie donc d'emblée, même si cela semble incroyable, que l'embarcation était tout à fait capable d'absorber, de dévorer même, 15 km de câble.

C'est avec la construction des péniches puissantes, capable de remonter les flots, que cette embarcation finit par tomber en désuétude. Après une relativement courte carrière, elle est mise en état de relégation en 1936, en tout cas en ce qui concerne son activité de traction. En effet, elle est utilisée ultérieurement par une société privée de travaux publics dans le cadre de la construction de barrages, jusqu'en 1974. À partir de ce moment-là, l'abandon devient de plus en plus profond.

En outre, l'histoire du bateau s’amorce comme étant mouvementée, à savoir plus précisément que divers instances veulent utiliser ce toueur comme élément de musée de la navigation fluviale. Cependant année après année, les fonds ne viennent pas, de ce fait le bateau se dégrade et plonge dans un abandon mortifère. Il coule, s'envase, on le comprend l'oubli enveloppe le bateau d'un linceul. Cela devient quelque peu gênant dans le paysage, En 1996 les VNF lancent alors une démarche assez offensive afin de déposséder les propriétaires de ce bateau, le but étant de livrer l'embarcation à la casse. Démonter un tel bateau représente un coup faramineux pouvant avoisiner 150.000 euros. Le poids de métal est absolument ahurissant puisque l'on peut monter en certain cas jusqu'à 300 tonnes ; celui-ci en fait 325. Ce n'est pas rien. Bref tout le monde de se renvoie la balle jusqu'à ce que le rien devienne réellement absolument plus rien. L'embarcation est dans l'abandon le plus total depuis toutes ces années.

C'est donc une visite pour le moins enrichissante que je vous propose. Il s'avère que d'un point de vue urbex pur et dur, c'est un sujet pour le moins petit. Reste toutefois que c'est le dernier représentant de ce style, à l'exception de Ricqueval. Cela vaut bien un documentaire. On notera avec une certaine forme d'amusement que la cheminée pouvait s'incliner sur un axe, effectuant dès lors une rotation, ceci dans le but de passer sous les ponts. Bref je ne vous embête plus avec des petits amusements techniques, partons désormais pour la visite, qui vaut bien le coup je trouve.

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