Exploration campanaire, les cloches de Vinezac
Voici un documentaire sur les cloches de Vinezac, petite commune d’Ardèche, dont le centre médiéval est de toute beauté. La commune est située sur un grand axe de communication, c’est-à-dire la route nationale reliant Alès à Aubenas ; il s’avère en contrepartie que le calme village en tant que tel est à l’écart. Tout comme Vesseaux, l’on vient à délaisser la visite du hameau, ce qui est un tort évident car c’est de toute beauté.
L’église est fondée sur une base du XIe siècle et a connu d’intenses remaniements au cours des temps. En l’occurrence, le clocher se trouvait à l’époque au niveau de la croisée. Au vu de son poids, il a été remplacé par un lanternon, tandis qu’un clocher assez vaste se trouve désormais en surplomb du narthex. On y accède par un collatéral, via une trappe et en se frayant un passage en sous-toiture. L’état d’entretien est excellent.
Je remercie vivement la municipalité de Vinezac pour l’organisation de la visite, et en particulier Madame Odile Boissin pour l’accompagnement sur place.
Le clocher possède deux cloches qui au premier coup d’œil pourrait laisser imaginer un bilan que l’on qualifierait de grand classique. Il reste toutefois qu’une étude approfondie révèle une surprise. Ces cloches ne sonnent pas en volée étant donné que le beffroi, métallique, est entièrement fiché dans la maçonnerie. La transmission des vibrations entraine une destruction graduelle du bâti au fil des années. C’est notablement le cas à Berrias. Cela justifie on le comprend la suspension de toute mise en volée, même pour les rares messes. La municipalité porte un projet à bout de bras afin d’établir un tout nouveau beffroi en châtaignier.
La première cloche est une Gulliet Fils fondeur à Lyon, datant de 1884. Notons que si les Gulliet sont fréquentes en Ardèche sud, il s’avère que celle-ci est la seule, sous réserve de complétion de l’inventaire, à émaner uniquement du fils, les autres cloches signant sur la pince « père et fils ». L’épigraphie est d’un très grand clacissisme pour une Gulliet, avec une faussure richement décorée de figures esthétiques.
Il s’agit de la plus petite cloche. Elle sonne un Sol# légèrement altéré et pèse environ 420 kilogrammes. Sa dédicace est la suivante – Ligne 1 : JE M’APPELLE ELISA FRANCOISE Ligne 2 : FRANCOIS TRICHET PARRAIN ELISA BASTIDE MARRAINE Ligne 3 : EDOUARD BASTIDE MAIRE J P RIOU CURE Ligne 4 : BIENFAITEURS MR BASTIDE MME GIRAUD MR PAUL GIRAUD MR LEON GIRAUD 1884.
La seconde cloche, tout laissait penser qu’il s’agissait de même d’une lyonnaise, cependant c’était une erreur grossière. Elle émane du fondeur Chambon de Montargis et date de 1922. A noter que la mention de Montargis est erronée, de la part du fondeur même donc, car il était implanté à Chalettes (Loiret), au même titre que Ronat, fondeur des cloches de Montselgues. La cloche Chambon est la surprise, car sous réserve d’inventaire, la présence de ce fondeur est unique en Ardèche sud.
Elle sonne un Fa altéré, se localisant entre le Fa et le Fa#. Elle pèse environ 700 kilogrammes. Au vu du profil léger, une variation entre 640 et 770 kilogrammes est envisageable, si ce n’est que le poids de 700 kg sans battant semble raisonnable. Sa dédicace est la suivante – Ligne 1 : S S PIE XI PAPE MGR BONNET EVEQUE MGR NEGRE AUXILLIAIRE MR COUDEYRE CURE Ligne 2 : JE M’APPELLE JOSEPHINE Ligne 3 : PARRAIN JOSEPH BASTIDE MARRAINE JOSEPHINE MONTEIL Ligne 4 : L’AN 1922.
L’identification du fondeur CHAMBON est une certitude. Au vu de l’aire de répartition générale de la fonderie, essentiellement orientée sur le centre de la France, il appert que cette découverte à Vinezac constitue tout autant une rareté qu’une valeur patrimoniale. Ce fut donc une riche découverte.