Exploration campanaire, les cloches de Vals-Les-Bains
Voici une exploration campanaire du clocher de Vals-Les-Bains. Un très grand merci aux paroissiens pour l’accueil aussi chaleureux, en particulier à Anne-Marie CAMBON pour avoir organisé et le Père François-Xavier LOUA et son diacre pour le magnifique fonctionnement sur place : ce fut un lieu en tout exemplaire.
C’est un sacré escalier qui nous fait monter au clocher, c’est haut ! Au sein d’un beffroi en bois très bien entretenu, on trouve deux cloches en lancé franc.
- La plus grande, une Pierre Decharme, datant de 1821.
- La plus petite, une Burdin fils aîné, datant de 1857.
Decharme est une belle découverte. Nous sommes donc en présence d’un fondeur itinérant du Bassigny en Champagne, qui jusqu’à présent et à défaut de complétion de l’inventaire, est le seul à avoir mené des campagnes en Ardèche. Conformément à ses habitudes, il fond du lourd. Quant à la Burdin, c’est un grand classique – mais qualitatif – instrument de Lyon.
La grande sonne un Fa#(3) et pèserait 640 kg. La petite sonne un La(3) et pèse 370 kg. Les poids sont donnés sous réserve, ou en tout cas pour un ordre d’idée, car la grande est en profil lourd ou au minimum en profil renforcé, tandis que la petite est un profil intermédiaire.
Le charme discret des cloches du Bassigny, c’est une partie de l’histoire campanaire qui a très peu touché l’Ardèche. Les fondeurs du Bassigny étaient des saintiers itinérants, ils n’avaient pas de fonderie fixe. A la belle saison, ils partaient avec la charrette parcourir la campagne, dans l’espoir de fondre et donc de vendre des cloches. Un voyage de saintier du Bassigny, on appelle ça une campagne.
Dans cette très petite région de la Haute-Marne, spécialisée en cloches et en coutellerie médicale, ils étaient au bas mot 300 fondeurs. Incroyable pour un territoire aussi restreint. Il est parfois évoqué que le sous-sol, riche en fer affleurant, et les denses forêts offrant le bois pour les fours, ont attisé cette activité dans les temps anciens et de révolution industrielle.
Certaines régions sont très influencées par les fondeurs du Bassigny, selon les possibilités de vente et la concurrence des fonderies fixes en place ; la Belgique et la Suisse sont de même fortement concernées. Des chercheurs tels qu’Henry Ronot ont même établi des cartes des campagnes des plus grands fondeurs du Bassigny.
En Ardèche, on ne relève, dans l’état actuel de l’inventaire, qu’un seul ambulant du Bassigny : la famille Decharme. Selon les dates, on rencontre Louis Decharme et Pierre Decharme. Les créneaux de datation se concentrent sur une grosse dizaine d’années, voire une quinzaine d’années – c’est donc un fondeur mineur. On notera que la cloche de Vals a été faite la même année que celle de Laurac-en-Vivarais. Les Decharme ont établi leur influence commerciale en Loire, Haute-Loire et Ardèche. On n’en retrouve pas en sud Ardèche, ils sont supplantés par les Baudouin d’Alès.
Les cloches du Bassigny sont en général caractérisées par une décoration plutôt sobre, les saintiers n’ayant pas le luxe de matrices tels un Gédéon Morel. La cloche de Vals n’y échappe pas. Il est à mentionner, au-delà de cette question d’aspect, qu’elle est très qualitative musicalement parlant. On se rend compte, une fois encore, que Decharme fondait du lourd. On ne lui connait pas spécifiquement des petits instruments, ou seulement en complément de lourd (Rosières Haute-Loire). Ses planches à trousser devaient être calibrées pour une gamme lourde.
L’ensemble est très harmonieux. Bien que oui, on puisse convenir que c’est une sonnerie simple, elle est mélodieuse, dynamique, agréable, couplée avec un accueil formidable. Comme je le disais en titre de la vidéo, merveille et bonheur.