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La clinique Saint-Michel de Pierrelatte

Voici la visite d’un ancien bâtiment abandonné érigé dans un style brutaliste. Il s’agit d’une carcasse de béton dont le moindre gramme de trace de vie ancienne a quitté les lieux, renouvelé par une vie envahissante, voire même foisonnante : une végétation dévorante, des oiseaux nichent dans des recoins.

Les sites de vente urbex nomment cet endroit « université uzy ». Cela relève de la connerie la plus pure, comme d’habitude.

A partir de quand peut-on dire qu’un endroit fait vraiment penser à un copain ? En effet le style brut de béton décharné m’évoque un aspect glauquelandien plus que carrément hannemique. Serait-ce dû à cette architecture brutaliste ? Ou encore à la végétation dévorant l’empire minéral ? Aucune réponse ne s’offre, et pourtant ce sentiment est immédiat. Une personne évoque : c'est à cause de la ruinudité.

Je suis sorti de cet endroit sans savoir ce dont il s’agissait. Je n’y comprenais croûte comme dirait la génialissime souris Géronimo Stilton. Alors vous mettez la magie d’internet sur le sujet, et soudainement l’information débarque à grands pas. Je dois citer le groupe « tu es de Pierrelatte si… » comme étant un nutri-score A voir même du A+++, ah pardon ça n’existe pas. Bref, quelques questions et 3 heures après, 185 commentaires.

La clinique Saint-Michel a été créée en 1946, puis fut transférée en ces locaux ci-présents en 1968. Le lieu fut créé par le docteur Weyland, c’était le rêve de sa vie. L’épouse du maire Gustave Jaume, édile  de Pierrelatte, a demandé que ce soit affublé du nom de Saint-Michel, parce que ce docteur et son épouse ont perdu un enfant de ce prénom-là. Il existait à l'entrée une évocation très moderne en fer de Saint-Michel. La construction fut dirigée par l’architecte Caco, grand prix de Rome.

Cette clinique avait une forte activité de maternité, comme en témoignent les innombrables retours en ce sens. Toutefois on y réalisait aussi de la médecine générale. C’était un petit lieu très pratique, des bons chirurgiens et radiologues, il y avait tout dans cette petite clinique. Il existait aussi un service d’accueil de nuit pour les premières urgences.

La maternité concernait exclusivement les accouchements, il n’y avait pas de service de pédiatrie. La maternité se trouvait au premier étage, avec le docteur Maurice en premier lieu, puis ensuite le gynécologue Delecloy, la sage-femme Madame, Ravaut, puis Madame Grolat. En bas c’était le service d’orthopédie du docteur Tosélot. Le docteur Théolaire prenait en charge la chirurgie. Le directeur était le chirurgien Jacques Montagnier. C’était pleinement plébiscité par la population locale, comme souvent les lieux de proximité que l’on s’acharne à supprimer de nos jours.

Tifany Ponderant évoque : mes parents et moi y avons habité durant de nombreuses années comme des gardiens. C’était un vrai plaisir d’habiter là-bas. La phrase « seul au monde » prenait tout son sens ! J’y ai même appris à conduire avec le rond-point qu’il y avait à l’intérieur du site. Si vous cherchez bien, vous devriez tomber sur l’appartement que mon papa avait rénové.

Le lieu a fermé en 1994. Il est parfois évoqué que les locaux n’étaient plus aux normes, mais au-delà de cet aspect de rénovation difficile, il s’agit surtout que l’installation est en zone inondable du Rhône. A prendre une carte, on hallucine sur la puissance du fleuve et la taille de son lit majeur.

Noyée deux fois, elle est fortement inondée en septembre-octobre 1993, ce qui signe sa deuxième évacuation. Tous les patients sont transférés en urgence à Montélimar. Depuis cette inondation, une personne évoque le fait que les caves sont fortement noyées et le restent perpétuellement. L'eau est arrivée jusqu'à l'emplacement du rond point, qui n'existait pas à l'époque. Tout le matériel, cuisine et laverie, a été détruit. L’on raconte parfois que l'assurance n'a pas pris en charge car la clinique fut construite sciemment en zone inondable.

Les propriétaires ont fini par transférer les lits vers Montélimar. Le groupe Ramsay a racheté, mais le but était uniquement de prendre et transférer l’ensemble du matériel médical vers Kennedy. Le bâti fut revendu immédiatement ensuite.

La magie d’internet va jusque là, et c’est incroyable. Témoignent le premier bébé né en cette clinique, le 10 mars 1969, Catherine, avec sa sœur jumelle qui s'appelait Michèle, en hommage à Michel, fils décédé du docteur Jaume. Un article était paru dans les journaux de l'époque.
Val Lunel Soulier, née en 1969. Elle dit, j'ai été la première « naissance » de la clinique, qui donna ensuite naissance dans le même lieu à sa fille en 1988.
Puis, Dylan Kenzo Meyron Bernardin explique qu’il fut le dernier bébé de la clinique le 30 juillet 1994.

La première, le dernier.

Tout début 2000 émerge un projet d’hôtel de luxe, puis celui-ci est abandonné. Plus tard, 2013, en grandes pompes la presse annonce la promotion immobilière : ajout d’un étage et création d’une résidence sénior. Projet tout autant abandonné l’on s’en doute. Plus tard la mairie refuse un projet de maison médicale. Puis voilà, Claudio et de nouveaux projets. On le comprend bien, tout s’écrase dans l’impossibilité : ce lieu n’est rien d’autre qu’inondable. Le bâtiment est pour ainsi dire condamné.

Dès lors émerge une végétation foldingue, le lieu est méconnaissable depuis 6 ans. La police se sert du bâti pour entrainement assez régulièrement, ce qui n’empêche pas les oiseaux de nicher dans chaque recoin. Pour un endroit qui était plus ou moins rien d’autre qu’un tas de béton, on voit qu’on arrive dans une histoire carrément folle, surtout ces naissances incroyables !

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