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Exploration campanaire, les cloches de Chamalières-sur-Loire

Voici une exploration campanaire du clocher de Chamalières-sur-Loire, magnifique commune localisée en Haute-Loire. L’église, très ancienne, est d’un esthétisme intense. On y trouve 3 cloches, dont une est historique. Un immense merci à la municipalité pour l’accueil, en particulier Monsieur Tempere et aussi à Julien pour l’aide précieuse.

L’accès au clocher est réalisé par un escalier étroit, séculaire, qui ensuite vient épouser la toiture. La chambre des cloches est spacieuse et facile d’accès. Un vaste beffroi en bois – probablement en châtaignier bien que le traitement antifongique empêche de l’affirmer – est tout à fait fonctionnel, protégeant le bâti des poussées, ce de surcroît que nous chevauchons la croisée.

La cloche la plus ancienne émane d’une association de deux fondeurs : Blaise Seurot et Pierre Mare ; elle est datée 1741. Seurot était originaire de Javaugues (43) et Mare de Brioude (43). C’est une cloche très rare et même la Drac écrit des erreurs à leur sujet. Des Seurot père et fils, on connait une petite dizaine d’exemplaires et de Mare encore un peu moins. Dans le secteur, une est conservée au musée de La Chaise Dieu.

Notons que si Seurot est localisé à Javaugues en Haute-Loire, il s’agit originellement d’un fondeur du Bassigny, qui fut localisé à Levécourt (52), à côté de Maisoncelles : origine des très grands fondeurs Causard. Le Bassigny est comme on le sait un immense berceau de fondeurs de cloches, cette particularité permet à ce dernier de figurer dans la liste du très érudit Henry Ronot.


La signature du fils de Blaise Seurot : Claude Seurot.

Fait extrêmement étonnant, la commune éponyme de Chamalières (63) possède deux cloches des fils Seurot ; comme si les Chamalières se reliaient par le nom et les cloches. Quant à Pierre Mare, nous relevons une certaine récurrence à voir son nom orthographié « Pierre Maré ».

Les deux cloches les plus récentes émanent des ateliers Farnier, localisés à Robécourt (88) ; elles sont datées de 1900. L’on peut s’étonner de cette présence, car les Vosges font loin. Il est de fait qu’en cette période, ils ont écumé toutes les communes du plateau Ardéchois, pour essayer de vendre leurs cloches. Du coup il peut s’avérer relativement fréquent de les croiser, ce qui est toujours une bonne nouvelle vu la qualité des instruments.

Le poids de la grande cloche, 910 kilogrammes, en fait déjà une sonnerie conséquente ; le parfait état d’entretien du clocher rend les lieux d’autant plus agréables. L’ordonnancement de la sonnerie est un Mi(3), La(3) et Si(3). C’est d’emblée un accord que l’on peut qualifier de curieux. Il appert que la sonnerie en plenum est assez rare, celle-ci est affectée aux mariages.

La cloche Seurot-Mare est une collaboration entre deux fondeurs. Quoique cela ne soit pas en soi rare, il s’avère que le plus probable est qu’ils aient fondu un ensemble de cloches ; l’un ou l’autre s’est trouvé dépassé par l’ampleur de la tâche et a recherché du soutien. Avant les enlèvements révolutionnaires – ne laissant qu’une seule cloche pour les sonneries civiles (notamment le tocsin) – on peut supputer sans être spécialement aventureux que Chamalières possédait 3 cloches Seurot & &Mare.

La dédicace qui a été relevée est la suivante : + IHS MARIA REGINA CELI LETARE ALLELVIA A QUIA (…) MERVISTI PORTARE RESVREXIT SICVT DIXIT ALLELVIA ORA PRO NOBIS DEVMAELLEVI ALLELVIA - B.SEVROT P.MARE MONT FAICTE 1741.

Evacuées les fautes de lecture, on peut la retranscrire de la sorte : MARIA REGINA COELI LAETARE ALLELUIA A QUIA MERUISTI PORTARE. RESURREXIT, SICUT DIXIT, ALLELUIA. ORA PRO NOBIS DEUM, ALLELUIA. Il s’agit de la prière mariale Regina Caeli. L’antienne « Regina caeli » en latin, « Reine du Ciel » en français, la plus récente des Antiennes mariales (XIVe siècle) remplace la Prière de l’Angelus durant le temps Pascal car elle exprime la joie de la Résurrection du Christ.

La traduction, quoique très simple, est la suivante : Reine du Ciel, réjouissez-Vous, alléluia, car Celui que Vous avez mérité de porter dans Votre sein, alléluia, est ressuscité comme Il l'a dit, alléluia. Priez Dieu pour nous, alléluia. D’une épigraphie très lisible, même si elle est placée en hauteur, son poids estimé est de 375 kilogrammes.

En ce qui concerne la cloche Seurot & Mare, une proposition de classement est faite à la Drac, au vu de la rareté. L’épigraphie, bien qu’assez conventionnelle, se révèle intéressante par les effigies. Ces dernières sont identiques à Saint-Didier-sous -Aubenas et Vagnas, ce qui témoigne parfaitement que le père a transmis les matrices à ses deux fils. Une découverte merveilleuse, que je suis heureux de vous partager.

Référents d’étude Seurot, cloches de : Marcenat (15), Saint-Jacques-des-Blats (15), Le Vignon-en-Quercy (46), Saint-Laurent-Rochefort (42), Saint-Priest-la-Vêtre (42), Brioude (43), Saint-Didier-sous-Aubenas (07), Vagnas (07), Chamalières (63), Saint-Gengoux-le-National (71), Trélins (42), Saint-Ignat (63).
Référents d’étude Mare ou Maré, cloches de : La-Chaise-Dieu (43), Brioude (43), Autrac (43), Bulgnéville (88), Viols (34), Neussargues-en-Pinatelle (15).
Références bibliographiques : RONOT Henry, Dictionnaire des fondeurs de cloches du Bassigny, Editions Faton, 2001. Maurice THOUVENIN, dictionnaire des fondeurs de cloches du Bassigny, 2023.
Statut de la cloche Seurot & Mare : propriété de la commune.

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