Exploration campanaire, les cloches de Rochecolombe

Voici une exploration campanaire du clocher de Rochecolombe, en Ardèche. Le village de Rochecolombe comporte trois églises : la très ancienne église de Sauveplantade, la très ancienne église Saint-Barthélemy dans le vieux village, l’église relativement récente de l’Assomption. Nous visitons ici l’Assomption, à laquelle nous devons ajouter nombre de précisions.
L’église Saint-Barthélémy, aussi appelée chapelle dans certains documents, peut se voir comparée à l’ancienne église romane de Balazuc. C’est dans la même dynamique un édifice roman XIIe siècle, qui a été désaffecté du culte graduellement, du fait d’une implantation un peu compliquée. A Rochecolombe, cela se trouve dans le vieux village, pittoresque et touristique d’ailleurs. Le vieux village a été peu à peu déserté de ses habitants, pour une implantation plus aisée, quelques centaines de mètres plus bas.
L’église de l’Assomption est érigée dans cet élan. Aussi appelée Saint-Pierre-aux-Liens, elle voit sa construction achevée en 1847. Elle remplace dès lors Saint-Barthélemy, désaffectée du culte.
Ce qu’il est important de mentionner, c’est l’arrêté de péril pris par la municipalité la concernant. Elle est interdite de visite, suite aux dégâts provoqués par le séisme du Teil le 11 novembre 2019. La nef est inaccessible. Le clocher est distinct de la nef, c’est une tour campanile. On y accède par une porte située à l’arrière de l’église. La chambre des cloches est accessible par trois volées d’échelles subverticales. Plus personne ne monte au clocher, sauf la personne réalisant l’entretien.
Dans des baies ouvertes sur l’extérieur, on trouve trois cloches : une anonyme de 1611, une Dupuy Chassiers de 1632, une Pierre 2 Decharme de 1823.
La cloche de 1611. Ce qui frappe immédiatement, c’est la complète similitude avec la cloche ancienne de Saint-Sernin, dont d’ailleurs la date est la même. Le point saillant remarqué tout de suite : la présence des triangles au-dessus de la dédicace. C’est complètement typique. La dédicace de cette cloche est la suivante : + IHS . MA . SANCTE . BARTHOLOMEE . ORA PRO NOBIS . 1611. De la même manière que Saint-Sernin, on remarquera qu’elle n’est pas signée. Elle possède une très petite estampille en forme de cloche, qui ne permet pas d’identifier.
Du fait qu’elle mentionne Saint-Barthélémy, il appert qu’elle provient de l’ancienne église romane de Rochecolombe. Tout autant qu’à Saint-Sernin, elle possède une épigraphie peu soignée, dont des débords et une absence d’ébarbage, aucune effigie non plus. C’est sobre, simple. Son calvaire, ornementé de décors ondulants, reste de grande qualité.
Nous signalons un problème métallurgique majeur : un dégazage intense au niveau des anses latérales (l’anse mère semble préservée). Ces anses sont indiscutablement très fragiles. Au vu qu’aucune volée n’est pratiquée – elle ne possède pas même de battant – nous estimons le risque inexistant. En contrepartie, il est proscrit de monter ultérieurement un système de volée dessus.
La cloche de 1632. Il s’agit d’une Dupuy Chassiers. Nous préciserons au lecteur que ces cloches ne sont jamais signées. En contrepartie, les Dupuy sont des monomaniaques de la décoration. Toutes les cloches sont décorées des mêmes effigies, quelle que soit la date, quelle que soit la dimension de la cloche. Nous témoignons de cela par l’habituelle mention du « Saint-Jean-Le-Baptiste à trois jambes ». C’est notre point de reconnaissance. (C’est sa veste de chameau qui pend entre les jambes, ça donne certes un curieux effet).
Par Dupuy, nous précisons qu’il s’agit de Claude du Puy, du hameau de Montcouquiol, au nord de Chassiers.
Sa dédicace est la suivante : IHS MARIA A FVLGVRE ET TEMPESTATE LIBERA NOS (report) SANCTE BARTHOLOMI PRIES POVR NOVS 1634 (report) DOMINE. Ce que l’on traduira par les très classiques : De la foudre et des tempêtes, délivrez-nous Seigneur. Saint-Barthélemy, priez pour nous. Ce qui est plus étonnant, c’est la première fois que nous lisons une dédicace en français de leur part. En tout cas, la provenance de l’église romane est là encore très claire.
Conformément aux travaux des Dupuy, que ce soit La Souche ou Chassiers, on a une qualité métallurgique excellente et une qualité épigraphique très acceptable. En contrepartie, nous sommes quelque peu étonnés que ce soit cette cloche qui soit équipée en volée, de surcroît avec un battant de lancé franc (elle semble être en rétro-mitigé). Nous estimons que sur une cloche aussi ancienne, la volée doit être menée avec parcimonie. Trois angélus quotidiens peuvent faire beaucoup, considérant de plus qu’elle est en profil léger.
La cloche de 1823. Il s’agit d’une Pierre 2 Decharme, non signée. Elle fait partie de la série des « calvaire à l’olivier », mentionnant par là les nombreuses cloches documentées en drone, jusqu’alors restées anonymes. Bien que non signée, un élément de reconnaissance est imparable : le numéro 8 dont le sommet est très aplati.
C’est une cloche à l’épigraphie remarquablement médiocre. L’entièreté de la production du fils Decharme a été concernée. Son père faisait mieux. En contrepartie, ce fondeur issu du Bassigny, était un fin musicologue. En profil renforcé, limite lourd, il nous régale de sonorités délicieuses.
Elle ne possède pas de battant, mais par contre elle est équipée pour sonner l’heure.
Nous signalerons un point de l’ordre du jamais vu. Lorsque Pierre Decharme a décoché, il n’a pas enlevé les résidus de potée. Nous avons donc de la terre de chape, encore présente entre les lettres depuis 202 ans. C’est purement inimaginable et témoigne d’une chose certaine : c’est le côté épargné par les pluies !
La dédicace, très peu lisible est la suivante : JEAN LEYRIS DIT GRANGER PARRAIN. MARIE THERESE AUDELIN EPUOSE (sic) DE ETIENNE. ESCALIER MARRAINE. JEAN AUZIA. 1823. Au vu de la date, on peut être amené à penser que cette cloche a été fondue pour l’église. Il reste toutefois que nous trouvons quand même l’année précoce.
Le clocher amène donc de belles surprises. Nous pouvions nous attendre à trois Decharme. Rencontrer deux historiques 17e siècle, c’est un luxe plutôt rare.

























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