Le
fourneau.
La
musique des papiers commencent.
Dans
le 'gros bazar', il faut avoir le courage de fouiller dans les Mickey's et autres
papiers sans valeur.
Les
découvertes sont merveilleuses, à nouveau nous voici au coeur d'une
famille.
Dans
cette pièce très sombre, les vestes pendent encore.
On
relève le nom Masoch, mais avec une faute
d'orthographe commune, qui se retrouve même chez les expatriés.
La
toiture tient grâce aux 'étais', si on peut appeler ça comme
ça.
Un
lieu si pauvre, deux pièces pour placer toute une vie.
Mais nous ne parlerons pas de ce hameau - finalement annexe par rapport au reste - pour montrer ces lettres, bien sûr préservées comme les autres pour le musée. Nous refermerons la porte en silence et laisserons la chaise à sa tristesse.
Conedera est lavenir. Labandon est proche, présent et déjà loin. Devant lhabitation la plus au sud, il y avait des chaussons devant la porte. Cétait comme si lhabitant dormait. Ca faisait peu de temps que le jardin était déserté du pas lourd et fatigué, la mort la emporté. Il ny a aucun avenir pour les villages dont nous avons parcouru les chambres fantômes. Les murs vont seffondrer. Dans dix ans, nous reviendront, nous reprendrons les pentes abruptes. Nous glisserons sur les feuilles humides. Eventuellement même, nous chuterons dans le Pezzea. Cela nous fera rire. Mais ce sera un rire empreint de discrétion et dune tristesse floue, car nous reviendrons avec une certaine émotion : celle de voir que nous sommes arrivés là, dix ans auparavant, et ici « je te jure jai même été dans le grenier, jen ai des photos ». Devant nous il ny aura quun tas de pierre moussu, éventré par des hêtres. Nous chercherons la mémoire des Casaril dans la forêt, elle sera enterrée sous les feuilles de lautomne. Quel sera notre sentiment ? Quelle a été le leur, lorsquen 75, peut-être 1980, ils sont inévitablement revenus voir les ruines de leurs enfances, de leurs amours, de leurs rêves ?
Conedera nest quune friche parmi tant dautre. Ce sont des bouts de maisons qui peinent à tenir debout. Conedera, cest lavenir de Pattine, de Titelle et de tellement de hameaux de montagne qui sont en train de crever à petit feu. Mes mots et mes images se sont frayés une place ici pour préserver la mémoire dun pan de montagne, quelque part loin dans un vallon dItalie. Des comme ça, il y en a quinze, que ce soit en France, en Espagne, en Slovénie. Il y en a quinze que dis-je, peut-être le double du triple. Cest sans compter une immense contrée Alpine en train de se replier sur elle-même, saccagée pour le ski, revendue comme maison de vacances à des touristes et qui ny viennent que 15 jours par an. La vie est engloutie dans les villes bruyantes et sans âme. Ce documentaire se clôt ici sur les images de Conedera, précurseur dun large abandon à venir, mes mots sont à la mémoire des Casaril, à la mémoire des Bressan, à la mémoire des gens de la montagne, à la mémoire de ces solitudes campagnardes ; quand on touche à labandon, quelque part cest pour parler de la vie. Que mes mots soient à lhonneur de ces vies rurales quon oublie un peu trop vite.