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L'usine Flat Glass (1/2)


Ce petit documentaire concerne une usine qui produisait du verre plat destiné à diverses applications techniques spécialisées. J'ai pris le choix de ne pas écrire le nom de la société afin de ne pas nuire à leur image, ce de surcroît que l'ensemble industriel des bâtiments vient tout juste d'être vendu (et rendu inaccessible via des plots de caméras PTZ Seris). Cela ampute le travail de mémoire, mais au vu de la localisation, sans détour spécifiquement victime de vandalisme de masse, le choix cornélien ne laissait guère de marge de manouvre. Soit, c'est dommage mais beaucoup de choses sont ainsi de nos jours. Toutefois, reste que les personnes citées dans la reconstruction de la liste du personnel se reconnaîtront.

Je lis souvent qu'il s'agit d'une usine de verre, dans la presse essentiellement. C'est un terme à franchement éviter, ça ne veut rien dire. C'est comme évoquer que l'usine est en verre. Ma foi jusqu'à présent je n'en connais pas. Il est techniquement plus juste de dire qu'il s'agissait d'un centre de production de verre plat.

Historique

L'usine a été créée en 1890. Elle a fait l'objet de fusions et de changements de processus incessants au cours de son existence. Il est peu possible d'en dire plus au vu que cela permettrait l'identification aisée du site. L'implantation industrielle a fermé ses portes en 2014, après un combat syndical brutal. Lors de la fermeture, 190 personnes ont perdu leur emploi.

L'usine a toujours produit du verre plat, ce qu'on distingue des verres creux, des fibres de verre et des verres cellulaires (isolant pour le bâtiment). Le verre plat est principalement produit par technique float, ce auquel on ne reviendra pas ici pour deux raisons, d'une part parce que c'est très bien fait ailleurs, d'autre part parce que l'usine n'en possède plus aucun vestige (donc bref, à quoi bon). Au sein de cette usine subsiste le début du process : les silos de silice, de soude ainsi que la dolomie.

Ensuite les convoyeurs, jolis et originaux, sont encore bien vaillants. Les matières sont traitées sans mélange jusqu'ici, séparées dans les silos. S'ensuivent le dosage, le mélange, le pesage, le dépoussiérage. La matière dosée s'appelle le mélange vitrifiable. On y ajoute du calcin, c'est-à-dire du verre cassé recyclé. En matière première dès lors, l'usine procédait aussi à la casse et au recyclage du verre plat issu du bâtiment. Attention, verre plat uniquement, pas de bouteilles ! Cette démarche technique permet d'abaisser le point de fusion du mélange.

Le mélange vitrifiable descend dans des silos doseurs via une noria.

Subsistent en dessous les deux fours. La fusion du verre en ligne float est assurée par du four à régénérateurs à brûleurs transversaux, portant la matière à 1550 degrés.

Tout le reste : bain de flottage float, galerie de recuisson, équarri et empilage ont été entièrement démantelés. La caisserie est vide, tout comme l'atelier d'échantillons. L'usine possédait sa propre centrale électrique (jolie, à l'ancienne, bien que fortement victime de vandalisme et de vol), son château d'eau, son laboratoire, son infirmerie et son local administratif.

Depuis assez longtemps, l'établissement produisait des miroirs, des verres feuilletés, des verres anti-feu, des verres de sécurité, ou encore des verres acoustiques. Puis, sous l'effet d'un ralentissement économique général et d'une bulle temporaire, le site a produit du verre plat pour panneaux photovoltaïques. Au gré d'un dumping féroce (merci à l'Europe, comme d'habitude), il a été laissé libre voie aux produits chinois conçus dans des conditions déplorables. Cette concurrence déloyale a plongé l'établissement dans un cycle de pertes conséquentes, ce qui en somme a mené le site de production à sa perte.

Le personnel

Le personnel de cet établissement était : ABRAYEM Hafed, ABRAYEM Saïd, ALAIMO Salvatore, ALLARD Marie-Christine, ANTONINI Domenico, ASSETTA Ernesto, BARBIEUX Claude, BAUDOUX Olivier, BAZZICHI Alfredo, BECQUE Pierre, BELLOMO Salvatore, BEN BELLAT Aida, BEN BELLAT Farida, BERGER Jean-Marie, BERNIA Jean-Marie, BIENFAIT Willy, BIZET Stéphane, BOHY Georges, BOLAND Frédéric, BOSSE Jean-François, BOUCQ Yvan, BOULAL Foued, BROSTEAUX Christian, BURY Marc, BUTERA Salvatore, CALBERT Michel, CAMBIER S.-A., CAPIERRI Enzo, CAPPELAERE G., CARDONE Giovanni, CARDONE Giuseppe, CASCITELLI Antonio, CATSELUZZO Luciano, CAVALERI Rosario, CHARLIER Jean-Claude, CHAUDOIR Fernand, CHETTA Stefano, CIAVARELLA Pasquale, CIMINO Antonio, COLLURA Gerlando, CONSAGRA Salvatore, CORDIER David, CORDIER Freddy, CORDIER Frédéric, CORDIER G., CRAPEZ Cyril, CRAPS Thierry, D'ACHILLE Mauro, DAMBROISE Jean, D'AMICO Giuseppe, DAVISTER Jean-Pierre, DAVISTER Serge, DE MESMAEKER L., DEFLANDRE Jules, DEL MASTRO Daniele, DELTOUR Christian, DELTOUR Claude, DEMULDER Ida, DENAMUR Benoît, DERAVE A., DESMET Christian, DESSALE Christian, DETHYE S., DI SCIACCA Salvatore, DIERICKX Christian, DIEUDONNE Alain, DUCARME Michel, EGIZII Elisa, EGIZII Maria, FABBRETTI Mario, FABBRETTI Mauro, FANELLI David, FASQUELLE Emilienne, FAVALE Mario, FERSINI Alessio, FIEVET P., FLAMENT Eric, FLAMENT L., FRAGAPANE Giovanni, FRAGAPANE Vincenzo, FRULEUX Jean-Claude, GANGI Calogero, GASPARI Antonio, GENAUX Christian, GEPPERT Jean-Claude, GERACI Giuseppe, GERARD Viviane, GHYSELS Joël, GILLOTEAU Jérôme, GILMAND F., GIUGNO-FRAGAPANE Calogero, GOBERT Jacques, GOSSET D., GOSSET Xavier, GRECI Cosimo, GRECO G., GUERIN Laurent, GUISOLAND Jean-Pierre, GUMUS Olçay, HANCQ Lucien, HODY Jean-Claude, HONOREZ Noël, HULET C., IOMAZZO Filippo, JUMET Michel, KACZOROWSKI Xavier, KARACA Yusuf, KLEIN Bernard, LA RUSSA Silvano, LACOURT Thierry, LAENEN Françoise, LANNURIEN André-Claude, LATINO Antonio, LATTUCA Luigi, LECERF Hervé, LECOMTE Jean-Claude, LECOUTURIER Marc, LEGROS Robert, LEGROUX S., LEJEUNE David, LELLA Gaetano, LEWAITE Stéphane, LISIECKI J., LIZZO Carmelo, LOMBARDO Giuseppe, MAGHE Daniel, MARTIN Mario, MAURAGE Jean-Christophe, MEGALI Antonio, MEO Gerardo, MERCIER Robert, MICHEL Jacques, MIKSE N., MONACO Nicolino, MOREAU Edwin, MORTELETTE René, MOTTE Sébastien, MOTTET L.-P., NANNI Aladino, NARDELLA Giovanni, NOWAKOWSKI Edmond, OTTAVIANO Santo, OZKAYA Akim, PACIFICO Francesco, PARDON Eric, PATERNOTTRE Jean-Louis, PEIGNEUX Bernard, PELLEGRINI Roberto, PICCIONE Paolo, PIERARD Jean, PILAT Michel, PILIEGO C., PIRRONITTO Antonio, PLATTEEUW Pierre, PORCARO Michel, QUENON Freddy, RENATO N., ROBINSKI Christian, ROBINSKI Jean-Claude, RODRIGUEZ José, ROYER Eric, SAEY Pierre, SALAMON Gianfranco, SALOMONI Luciana, SEMOULIN Philippe, SERAFINO Leonardo, SIMONINI Primo, SMET Ludo, SOMERHAUSEN Bernard, STEFANO André, TARANTO Antonio, TARANTO Bruno, TENRET Pascal, TERRAZZANO Pasquale, TOEGAERT Alain, VAN CANGH Christophe, VAN KERCKHOVEN Bernard, VANDENBERGHE Jean-Claude, VANDERPERREN H., VASBINDER Edouard, VICINI S., VILAIN Jean-Pol, WAGEMANS Fabrice, WALLON J., WARNON Robert, WATTEAU Jean-Pol, WOJTCZYK Wieslaw, WUIDART Jean, WYNEN J., YAHAYA Dominique, YERNAUX Didier, YILMAZ Ismail, YILMAZ Muharrem, ZACCAGNINO Roberto, ZEMAN Jean-Marc. Total : 195 personnes. Malheureusement quelques listes téléphoniques ne comportent que l'initiale comme prénom, ce qui ne facilite pas l'identification. La direction technique et administrative est bien identifiée, nous en gardons la discrétion.

Cette liste est en nombre très légèrement supérieur par rapport au nombre de personnes ayant perdu leur emploi en 2014. C'est normal, c'est dû au fait que le rapport a été établi sur base d'informations totalement lacunaires : des listes de téléphones, des e-mails, des rapports sur la sécurité. De ce fait il y eut des démissions, pensions, travaux temporaires, etc. De plus l'intervention de personnes émanant du centre R&D est possible. De la sorte et selon l'expérience que nous possédons en la matière, la liste ci-dessous reprend environ la moitié du personnel entre 2010 et 2014. Par rapport à nos habitudes, c'est déjà un résultat élevé, même si ça reste incomplet et médiocre.

Se promener dans les vestiges d'un temps passé et révolu

Quand on pense à l'acharnement de tous les ouvriers pour améliorer sans cesse le process, les efforts et le manque de reconnaissance, eux tous laissés sur le carreau au gré d'actionnaires qui s'engraissent ; c'est une histoire si banale de nos jours...

Vous pouvez écouter les ambiances de cette usine ci-dessous.



Le premier enregistrement, il s'agit d'un rougequeue furieux car je suis présent à une vingtaine de mètres des juvéniles. Dans les vastes halls vides à la réverbération intense, il manifeste son mécontentement en vue de me chasser. Le second enregistrement se situe en sommet d'une tour. Des pigeons, inquiets du fait que je suis à quelques mètres du nid, manifestent leur désarroi. Ca roucoule et vole au-dessus de l'intrus.

L'entrée dans l'usine est pour le moins une douche froide. Il s'y trouve un UAX à ce point marqué que le voisin n'a trouvé comme solution que de barricader 'son' terrain avec un énorme propriété privée. Derrière ce n'est pas la joie non plus. L'accueil n'est autre que deux plots mobiles comportant des caméras PTZ, capables d'analyser le mouvement (chevreuil, faisan, humain) et d'envoyer les informations relevantes aux personnes en charge de la protection du site. Tout ça de plus pour une immensité de halls vides ; mais soit, les gens ne reculent plus devant rien, y compris de bouter le feu. Bref, halls vides sous alarme.

Car de halls il est clair qu'ici, ce sera le mot à employer. Le site est un gigantisme de halles en sheds, construites empiriquement les unes à côté des autres, à la hâte, sans repère architectural. Aucune n'est semblable, tout est accolé selon les besoins du moment. Dès lors en l'absence complète de repère (c'est absolument, mais absolument vide !), il est difficile de s'y orienter. Même dans les halls les plus anciens, et en fin de compte probablement abandonnés depuis des lustres, c'est globalement propre au point d'avoir été récuré. A cela s'ajoute que des démolitions et dépollutions ont eu lieu. En gros c'est raclé.

La seule curiosité - et c'est en outre ce qui fait la célébrité de ce site - ce sont les deux fours. Par acte de vandalisme (de vengeance ?), en tout cas d'une situation passée que nous ignorons complètement, la dernière fournée n'a pas été vidée. Le verre a solidifié sur la sole, aisément sur un mètre vingt d'épaisseur. Ça rend les fours totalement inutilisables, sauf à engager des travaux conséquents. Le contenu forme une couche de verre vert, laquelle est venue s'effriter en gros blocs informes contre les portes, ces dernières totalement arrachées. Le paysage industriel est inévitablement esthétique, le verre forme un tableau saisissant ; en tout cas pour nous car techniquement, il est indéniable que c'est un désastre.

Ce qui est à voir en fait se trouve là devant nous, et au-dessus. Une tour qui était affectée au mélange comporte encore un gros convoyeur assez curieux, lequel était placé dans un tuyau du fait que le mélange était poudreux en granulométrie très fine. Là-haut se trouvent des doseurs, lesquels renvoient les quantités voulues sur une noria particulièrement esthétique. Le silo existe encore, ainsi que quelques pots de purge, plantés comme décor au milieu d'escaliers très poudreux.

Quant au reste, il s'avère en fin de parcours que cette immensité vide en prendrait quasiment un charme, tant c'est une ville dans la ville. Du fond du site et sur les toitures, traverser la totalité de l'usine sur un chemin perché de caillebotis donne une drôle d'impression. En fait, la structuration de cette implantation industrielle efface quasiment le monde extérieur, encore aujourd'hui malgré que le site soit inoccupé. Au centre ce n'est plus qu'un déluge de toitures diverses et variées, à n'en plus finir. Ces grands espaces sont colonisés par les oiseaux, qui trouvent bon compte dans ces abris désertés.

Partons maintenant à la découverte de ces halls industriels.


L'entrée de l'usine à front de rue.


Le comité d'accueil, c'est ce hall vide.


Et autrement dit ça s'enchaîne sur des dizaines de la sorte, je vous les épargne.


Certains locaux sont fermés avec des légos afin d'être un minimum protégés.


Les zones de transport sont indiquées. On imagine bien que le transfert et la manutention de caisses de grande taille ne devait pas faciliter la sécurité générale du site.


Dès lors les locaux affectés à la sécurité sont nombreux. En voilà un.


Vestiges d'un autre temps.


Les murs se prennent au jeu de devenir des oeuvres d'art.


Chacun a son petit charme désuet.


Ou bien son style un peu grunge.


Rendons-nous donc vers les fours.


C'est encore une fois du hall vide et démantelé.


Cependant dans un petit coin discret subsistent les fours.


Ils offrent un spectacle de toute beauté.


La matière vitrifiée est hypnotisante. A priori ce serait de la kryptonite ;-)


C'est vert comme un bijou, comme un trésor.


Les deux fours sont dans le même état.


Porte sur chaudière.


Un chemin tortueux permet de grimper au-dessus des fours.


Les toiles d'araignées étaient nombreuses !


Au-dessus du four en fait on remonte le process. Ici le silo doseur.


La noria est particulièrement esthétique.


Au sommet de la tour, l'acheminement des matières.


La noria, descendant vers le doseur.


Le fameux convoyeur, visible dans son hublot de bateau.


Détail sur la noria.


Installation de dépoussiérage.


Tout est maculé de fines, qui fuient sous les pieds.


Dans cet espace confiné, les installations sont nombreuses et entassées.


Escalier imbriqué.

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