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octobre - Vallée Rose Le
début de journée est assez pénible. Le logeur n'est pas réveillé. En
Dolmuş, nous faisons le trajet jusque Çavuşin,
point d'arrêt de la veille. Il y a là deux anciens villages troglos
: un animal et un humain. Le premier, le plus au nord, semble hors de tout
tourisme. Il est au fond d'une mini-vallée, il y a des vignobles de toutes parts. C'est un
lieu agréable, il y a de très nombreux pigeonniers. Ensuite, nous montons la pente
qui mène au vieux village. Nous sommes dépassés par un cheval et sa charette. Il semble souffrir de la chaleur. Le second village
possède un gros piton rocheux complètement percé de toutes parts par des habitations
troglodytiques. Il a été abandonné il y a une trentaine d'années (de force) car
de nombreux effondrements menaçaient la sécurité. Effectivement, des immenses
fissures lézardent les restes d'habitations. Nous
sommes accueillis par une armée de Mehmet. Alors, dictionnaire ! Comment être
un bon turc ? 1/
S'appeler soit Mehmet (Number One), soit Osman, soit Mustafa, soit Süleyman.
2/ Porter un costume en toutes circonstances, des chaussures en cuir noires et
assez pointues, une moustache. 3/ Déambuler relativement nonchalamment
et de la main droite, faire passer les billes de son chapelet.
4/ Vendre gentiment mais avec insistance ses services dans un anglo-franco-germano-turc
approximatif. Without a guide, you
will see only one church. Dictionnaire,
comment être un bon touriste ? 1/
Lorsqu'on vous dit Hello, répondre d'un air un peu blasé "Merhaba",
ça casse bien toute idée que vous êtes un pigeon. 2/ S'il vous
répond, Nasilsiniz ? Burada
mi oturuyorsunuz ? Là, vous êtes évidemment un peu mal
barré... 3/ Chose essentielle : savoir dire non-merci : Hayir, teşekkur ederim ou bien combien ça coûte : kaş
lira ?
Dire "merci", c'est apprécié aussi, parfois.
Les touristes habituels
visitent en circuit fermé. Ils descendent du bus, payent l'entrée du
site à visiter et s'en vont au bout de trois minutes. C'est vrai, on
l'a vu, tout le monde le reconnaît sur place, le touriste habituel n'est
pas tant que ça en contact avec les Mehmet.
Sortir des sentiers battus, c'est les rencontrer de toutes parts, pas
forcément dans des situations très confortables, on s'est fait entuber
une paire de fois. C'est aussi le but du jeu, c'est
le partage des culture.
Donc à l'entrée de Çavuşin,
il y a du Mehmet. Rien de bien insistant ni de très
gênant. Le piton rocheux est assez intéressant à visiter, mais effectivement,
nous loupons la petite église planquée dans les décombres. Ce n'est pas très grave.
Midi approchant, et avant de partir pour une longue promenade, nous mangeons dans
un Mehmet-Shop. Des ânes qui braient, un paysan qui
donne de la fourche, une ambiance calme.
Le grand piton troglodytique de Çavuşin. |
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Ainsi,
nous partons pour les hyper-réputées vallées rose et
rouge de Göreme. C'est sensé être un véritable enfer
touristique, une fournaise de bus et de touristes glauques. C'est peut-être le
cas en été, là nous aurons vu peu de monde ; justes quelques idiots visitant la
vallée en quad, ils n'ont véritablement rien compris
à l'ambiance calme et magnifique de cet endroit. La
vallée rose n'est pas difficile à trouver, il y a un panneau qui l'indique. Sur
le chemin, une église un peu cachée, ne manquant pas de charme. Je signale qu'à
chaque fois que quand je parle d'église, il s'agit de petites églises creusées
à même la roche, dans des pitons rocheux ou des falaises. Ce sont des lieux souterrains,
souvent décorés de peintures âgées d'un millénaire. Progressant
dans la vallée, nous trouvons la première véritable église, Ayvali
Kilise. Elle est gardée par un Mehmet,
comme partout ailleurs. Les entrées sont généralement de 2 liras (1,3 euros).
Les peintures sont comme partout ailleurs très maillochées.
Les iconoclastes se réfugiaient dans ces églises pour y pratiquer leur adoration
des icônes. Or, les catholiques romains étaient contre. Ils sont passés un peu
partout pour détruire les visages. Les églises en bon état sont donc quasiment
inexistantes. Ca reste malgré tout très intéressant. Dépassant
cette église, ça devient le désert, plus un seul touriste et peu de traces de
passage. La vallée devient de plus en plus étroite et de plus en plus pentue.
Il n'y a pas vraiment de fin. Il y a juste un moment où le tuf devient tellement
pentu que la promenade se transforme en trek dangereux. Donc, il y a un moment
où ça devient limite, il faut savoir s'arrêter, ce n'est pas toujours évident.
Rebroussant chemin, on finit par trouver un peu par hasard et avec beaucoup de
chance un passage vers la vallée rouge. Ca grimpe dur et la vue est superbe. La
vallée rouge est à peu près parallèle. Elle est très belle aussi mais je la trouve
un peu moins intéressante. En fait, elle n'est pas vraiment rouge... Après une
église un peu passable, nous passons dans des passages souterrains créés
par le passage de l'eau. Ca sillonne dans tous les sens et c'est Walibi
là-dedans ! Un peu plus bas, une église fermée (dommage) puis un magnifique secteur
de meringues. J'appelle des meringues les formations rocheuses blanches faisant
penser à de grosses pâtisseries appétissantes !
La vallée rose. |
La vallée rouge. | La
fatigue commence à se faire sentir. On fait une pause dans une mini-église
en hauteur, puis on continue dans la Meskendir Valley.
Très blanche, pitons très pointus, meringues magnifiques, armées de peupliers.
Plein sud ensuite pour le chemin du retour, dans ce que je suppose être Zindan Önü. La nuit tombe et on
est lessivé. Ayant un peu la frousse de se perdre (réflexe : on évite à tout prix
le Paumage-Paldiski), on décide de faire demi-tour.
On a bien fait. On voit des gens grimper au loin, c'est le chemin du retour, vers
Göreme.
| Après
un passage dans des paysages encore une fois à couper le souffle, on arrive exténués
au village de Göreme. On s'arrête au premier restaurant,
appelé comme par hasard "SOS restaurant". Le repas est à peu près correct,
sauf les manti, des macaronis ultra-gras,
au yaourt et au citron, a priori à éviter. Attention, Pastas ou Pastanas, ça signifie
pâtisseries. Les pâtes, ça se dit Makarna.
Près de Göreme. |
Le soir est
bien tombé. Il n'y a plus vraiment de bus pour Avanos.
On se fait embarquer plus ou moins sans comprendre dans un bus pour Nevşehir.
On aura un changement pénible et un retour pour Avanos.
Plus d'une heure pour dix kilomètres. Ca aurait été plus vite en stop... Enfin
peu importe, on est à destination. Ici dans cette part de Turquie, il y a
des dizaines et des dizaines de chiens errants. Ils sont loin d'être agressifs,
ils sont plutôt distants, quasiment redevenus à l'état sauvage. Ils ont souvent
l'air piteux. Depuis Zelve, on les appelle les guides.
Dans le bus, lorsque je demande pourquoi certains ont les oreilles coupées, on
me répond que c'était parce que les chiens de berger devaient garder les troupeaux
et se battre contre les loups. C'était pour qu'ils ne se fassent pas mordre les
oreilles. Deux personnes me disent ne pas apprécier cette pratique. De
retour, le marchand de sable passe immédiatement. |